La découverte en Lorraine d’un important gisement d’hydrogène naturel fait la une de nombreux médias. Ils s’enflamment tous pour cet éventuel « nouvel eldorado » qui pourrait solutionner l’épineux et conflictuel problème de l’énergie durable et non polluante. En matière de stratégie énergétique, cette découverte va-t-elle modifier les choix des décideurs politiques ?
Par Jean-Paul Briand
Pendant des années, ce gaz, découvert en 1766 par le chimiste Cavendish, ensuite baptisé « hydrogène » par Lavoisier, a été longtemps considéré comme rare, voire inexistant à l’état naturel. Souvent combiné à d’autres corps, il est l’élément le plus abondant de l’univers. Ainsi on le trouve dans chaque molécule d’eau, dans tous les végétaux et animaux. Malgré sa grande inflammabilité, il est possible de le stocker et de le transporter sous forme gazeuse ou liquide. C’est surtout un remarquable vecteur énergétique. Il est possible de récupérer son énergie, sans polluer, grâce à sa combustion directe avec de l’oxygène qui dégage de la chaleur ou sous forme d’électricité en passant par une pile à combustible.
Les conflits et liens d’intérêts
La cause essentielle de la rareté supposée de l’hydrogène naturel est qu’il n’est pas recherché. Il est vrai que tous les zélateurs respectifs des différentes productions d’énergies, qu’elles soient fossile, solaire, nucléaire, éolienne ou autres, n’y ont aucun intérêt.
Le gourou médiatique qui parle à l’oreille des puissants, Jean-Marc Jancovici, affirme régulièrement dans ses conférences que l’hydrogène naturel n’existe pas. En mai 2021, un article de Magcentre dénonçait le rapport du Ceser dans lequel il était dit que l’hydrogène « n’existe pas à l’état libre dans la nature ». Il est vrai que l’auteur, directeur d’EDF Loir-et-Cher, ne pouvant pas être accusé d’incompétence, avait quelques « liens » avec l’électricité nucléaire qui orientaient probablement ses écrits.
Les couleurs de l’hydrogène
L’hydrogène est réparti en trois classes : le renouvelable, le bas-carbone et le carboné. En fonction de sa provenance on lui associe officieusement toutes sortes de couleurs :
- L’hydrogène noir créé à partir du charbon.
- L’hydrogène gris, le plus courant et le moins cher, est fabriqué à partir du méthane fossile avec de l’eau à haute température (vaporeformage) pour obtenir un gaz de synthèse contenant de l’hydrogène.
- L’hydrogène bleu dérivé de l’hydrogène gris, par captage et stockage du CO2 produit.
- L’hydrogène vert élaboré à partir d’électricité d’origine renouvelable par l’électrolyse de l’eau. Il se développe et bénéficie de nombreux financements gouvernementaux.
- L’hydrogène rose également produit par électrolyse de l’eau mais avec de l’électricité nucléaire.
- L’hydrogène blanc (encore appelé naturel ou natif) « prêt à l’emploi » est présent sous terre, très souvent à de grandes profondeurs.
Une feuille de route à reconsidérer
Si l’objectif des élus du Centre-Val de Loire est de promouvoir l’hydrogène décarboné, « l’hydrogène blanc » ne peut plus être ignoré. Le gisement d’hydrogène naturel découvert récemment dans le bassin de Folschviller apporte un argument de poids afin de modifier la feuille de route pour le déploiement de l’hydrogène en région. L’hydrogène natif existe peut-être dans le sous-sol du Centre-Val de Loire. Le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM), implanté dans le Loiret, a lancé le 13 février 2023 le programme de recherche dans le bassin parisien : « Sous-sol, bien commun ». Espérons une bonne surprise…
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