Ce lundi soir, le conseil de Tours Métropole risque d’être mouvementé car les rumeurs de départ du président LR Frédéric Augis, empêtré dans une affaire d’injure raciste, vont bon train dans le microcosme politique local depuis quelques jours. Et il faut bien dire que cela ne fait pas que des malheureux à droite.
Par Joséphine
En effet, le « nouvel » exécutif métropolitain d’Augis, construit en mars 2023 avec la participation d’une partie de la majorité d’Emmanuel Denis à Tours, essentiellement autour d’EELV et du PS, est fortement contesté par une partie de la droite qui était tout à fait satisfaite d’avoir réussi à exclure de manière inespérée la gauche des organes exécutifs de la collectivité depuis juillet 2021.
Cette opposition en termes de stratégie est à replacer dans un contexte plus large d’inimitiés internes au parti Les Républicains, sur fond de rivalités entre les clans Briand/Augis et Paumier, rivalités vieilles de 30 ans mais très structurantes à droite en Touraine. Pire, la tenue d’élections sénatoriales à l’automne ne fait qu’exacerber les tensions entre clans, d’autant plus que Jean-Gérard Paumier semble vouloir s’offrir une retraite dorée au Palais du Luxembourg, maintenant qu’il est assuré que Serge Babary, sénateur LR sortant, ne rempile pas et que les Centristes pourraient perdre leur siège, fractionnant leur vote entre Vincent Louault – fils du sénateur sortant Pierre Louault – et Gérard Bobier, issu de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat et qui se rêve une trajectoire à la Babary, lui-même issu de la Chambre de Commerce et d’Industrie.
Une ligne de fracture
Le long de cette ligne de fracture qui pourrit l’ambiance depuis deux ans à la métropole, donnant une impression de mort cérébrale et de mise à l’arrêt du moindre projet, viennent s’agglutiner tout un tas d’autres intérêts disparates. Ainsi, quelques personnalités isolées tels Benoist Pierre ou Régis Salic qui ont pu bénéficier du hold-up de juillet de 2021 pour obtenir des vice-présidences malgré leur très faible influence, en veulent à mort à Augis de les avoir débarqués en mars dernier et rêvent de sa chute prochaine. De son côté, l’opposition de droite à Tours s’est également déchirée autour de cette question, certains ayant pactisé en 2021 pour obtenir un poste, d’autres se posant en opposants résolus à ces arrangements, tel Christophe Bouchet, cornérisé depuis, mais toujours à l’affût d’un buzz.
Plus étonnant, une ancienne génération de membres du PS et d’EELV, élue dans les communes péri-urbaines de la Métropole, voit d’un mauvais œil la stratégie d’union de la gauche portée par Emmanuel Denis depuis 2020 et désormais incarnée au national par la NUPES. Malgré leur faible influence, ces quelques élus qui n’ont de gauche ou d’écologiste que le pin’s de leur parti, pourraient bien participer à faire tomber la majorité métropolitaine actuelle contre la promesse d’un poste et des indemnités qui vont avec, tout en affaiblissant la dynamique unitaire à gauche, vécue comme un insupportable virage à l’extrême-gauche, signe des traces durables des dégâts du Hollandisme et de ses reniements.
Pour succéder à Augis, les candidats ne sont pas légion. Et oui, qui voudrait récupérer les clefs d’une collectivité à l’arrêt, sclérosée d’intrigues et incapable de se projeter, tout en ayant à assumer le bilan forcément minable lors du prochain scrutin en 2026 ? On entend cependant deux noms sortir du chapeau : M. Christian Gatard d’une part, maire PS (très soft) de Chambray-lès-Tours et clairement anti-Nupes et M. Laurent Raymond, maire peu connu du très huppé Saint-Avertin. Le premier a l’avantage de l’expérience et de fournir l’illusion d’une métropole de compromis droite-gauche, mais il semble pris dans des soucis de ressources humaines dans sa mairie, ce qui pousse à la prudence ; le second est un lieutenant de Paumier à qui il doit beaucoup, mais souffre d’un déficit de notoriété… ce qui pourrait devenir finalement un avantage, évitant de faire de l’ombre aux ténors de la droite qui attendent les clarifications à venir en 2026-2027. La grande inconnue reste l’attitude de Philippe Briand, grand manitou de la droite locale et magnat de l’immobilier, qui n’est pas satisfait de la situation de blocage de cette collectivité qu’il considère un peu comme son bébé, mais reste à savoir s’il lâchera Augis et dans quelle mesure il s’investit dans les tractations qui ont déjà lieu en coulisses.
La fiscalité métropolitaine
Signe de la nervosité ambiante, la semaine passée, lors d’une commission métropolitaine, la profonde fracture politique a éclaté au grand jour autour de la question de la fiscalité métropolitaine. Augis et l’équipe Denis ont plaidé pour une augmentation des recettes fiscales qui, du reste, sont parmi les plus basses, comparées aux autres métropoles de même rang, et ce afin de financer des projets pour le reste de la mandature. Mais en face, Philippe Briand, Laurent Raymond, Jean-Gérard Paumier et quelques conseillers métropolitains vert très pâle, se sont montrés inflexibles face à ce qu’ils considèrent être une ligne rouge, donnant à voir une belle cohésion politique malgré les inimitiés passées. Taxer le foncier ? Mais vous êtes fous ! Les investisseurs vont fuir face à cette politique qui rappelle les heures les plus sombres du castrisme. Et tant pis pour la situation du logement dans la métropole, où les investisseurs privés et les grands groupes dominent la promotion et la propriété immobilière, cumulant des revenus et bénéfices outranciers et alors même que les prix au mètre carré ont augmenté de 30% en 5 ans, gonflant confortablement le capital des propriétaires et leur rente. Taxer les entreprises pour financer la deuxième ligne de tram ? Mais vous n’y pensez pas, elles qui sont déjà tellement prises à la gorge. Et tant pis si cette ligne permettra à leurs salariés de venir plus facilement au travail, avec moins de bouchons et donc de retards et avec moins de parkings à construire pour les entreprises, tout en participant au sacro-saint rayonnement par la modernité, sans même évoquer la question de la pollution atmosphérique.
Bien sûr, rien n’est joué car la mollesse légendaire de la cité de Balzac pourrait faire traîner la situation encore quelques mois, histoire de gâcher définitivement la mandature, laissant l’occasion à nos politiques de s’étonner du taux d’abstention lors des prochaines élections. Mais il semble que le péril fiscal puisse bien précipiter les choses…
Plus d’infos autrement sur Magcentre : Tours Métropole : Réélection de Frédéric Augis, mais que fait la gauche ?
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