Théâtre d’Orléans : Shaeirat, des poétesses arabes sur scène

La Scène nationale propose deux soirs de poésie arabe. Avec les auteures, quatre femmes de langue arabe, qui viennent performer sur scène leurs poésies. Henri jules Julien les a aidées à monter ce projet. Magcentre lui a demandé d’en raconter la genèse et les dispositifs scéniques.

Propos recueillis par Bernard Cassat

Carol Sansour (détail photo Dirj Jan Visser) et Soukaina Habiballah ( détail photo Hind Alilich)


Comment a été créé ce spectacle et quel est votre rôle dans son élaboration ?


J’ai des fonctions différentes à chaque performance spécifique. Ça fait plus de 10 ans que je vis dans les mondes arabes, j’ai longtemps habité en Egypte et maintenant au Maroc. Je traduis depuis 7 ou 8 ans de la poésie contemporaine arabe, c’est un travail à deux avec une amie égyptienne. De fil en aiguille, ces traductions ont fini par être publiées dans des revues, des magazines, puis en volumes. Cette poésie arabe contemporaine, très peu connue en Europe, me paraissait de toute première qualité. L’Europe, la France en particulier, a une certaine obsession avec les Arabes, les musulmans, on entendait autre chose qu’une parole sur la poésie. D’où l’idée de construire une forme scénique à partir de ces poèmes. Je me suis dit que la meilleure manière d’y parvenir, c’était d’inviter les auteur(e)s à venir sur scène et de performer dans leur langue leurs poèmes. Donc de trouver un environnement scénique pour faire entendre ces textes dans d’autres langues, pour qu’un public francophone par exemple, puisse suivre et comprendre tout en captant la très belle musique de la langue arabe, qui ne suffit pas à elle seule.

Pour cela, on a créé une plateforme qu’on a appelée Shaeirat, qui veut dire simplement poétesse. Elle est collectivement dirigée par deux poétesses, Carol Sansour et Soukaina Habiballah, et moi-même. Nous aidons les auteurs à créer leurs performances et leur recherchons les possibilités de les montrer.


Une création en Avignon l’été dernier


Ça a d’abord été uniquement en Europe. En fait c’est moi qui ai initié tout cela, et il se trouve qu’en tant que Français, j’ai beaucoup de connexions avec la scène française. L’acte de naissance de Shaeirat a été Avignon en juillet dernier. Pendant une semaine, tous les jours, il y avait une performance à 11h, une à 12h30, etc., quatre fois par jour. Et puis ensuite on a construit les tournées française et suisse de ce printemps. A l’automne, on va créer le premier festival dédié à cette forme au Maroc, en Algérie et en Egypte. Ce qui est totalement inédit. Personne n’a jamais fait ça. Il y a eu des lectures de poésie arabe, mais isolées. Le fait de les grouper, d’en faire des spectacles, c’est vraiment une première, aussi bien en Europe que dans le monde arabe.

Rasha Omran. Détail photo Dirk Skiba


Sous quelles formes ces performances deviennent spectacles ?


On part du poème. Ensuite, le principe, c’est l’auteure sur scène dans son poème, et un moyen de traduction dans une autre langue. Collectivement avec les poétesses mais aussi avec d’autres artistes qu’on a invités, on a cherché pour chacune des solutions scéniques pour faire passer le poème à la fois en arabe et en français. Pour ce programme orléanais, il a quatre poétesses, quatre textes d’esthétique et de thématique différentes, et quatre solutions scéniques qu’on a cherchées dans le poème lui-même. D’où quatre manières différentes. La plus simple, mais néanmoins spectaculaire, c’est Carol Sansour, la Palestinienne. C’est une lecture à deux voix avec elle-même en arabe et une actrice française, Christelle Saez. On a travaillé pendant six mois pour trouver le bon équilibre. Ce n’est pas d’abord l’arabe puis la traduction, on imbrique les deux langues. On a vraiment créé une dynamique. Deuxième exemple, Soukaina Habiballah. Son poème est un dialogue entre une petite fille et sa grand-mère. Elle s’auto-traduit, car elle parle parfaitement français. Et elle a travaillé avec un musicien marocain, Zouheir Atbane, qui à partir d’enregistrements de berceuses marocaines, a monté un environnement sonore qui créé la performance.

Carol Sansour et Christelle Saez. Photo Shaeirat

Shaeirat #1
À la saison des abricots (Palestine)
Poèmes en arabe Carol Sansour
Poèmes en français Christelle Saez
Lecture dirigée par Henri jules Julien

Mishwâr (Palestine)
Lecture performée/concert
Poèmes en arabe Lulu Rafat
Cordophone Sophie Agnel
Spectacle en langue arabe surtitré en français

Jeudi 11 mai 20h − Salle Vitez
Tarifs de 5€ à 20€, détails et renseignements ici
Durée 2h15 avec entracte

Shaeirat #2
Dodo ya Momo do (Maroc)
Poèmes en arabe et en français Soukaina Habiballah
Son Zouheir Atbane
Dramaturgie Henri jules Julien

Celle qui habitait la maison avant moi (Syrie)
Poèmes en arabe Rasha Omran
Poèmes en français Nanda Mohammad
Chant Isabelle Duthoit
Lumières Christophe Cardoen
Mise en scène Henri jules Julien


Vendredi 12 mai 20h − Salle Vitez
Tarifs de 5€ à 20€, détails et renseignements ici
Durée 2h15 avec entracte

Henri jules Julien. Photo Chakir Boudjabi

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