État d’urgence pour l’eau en région Centre Val de Loire

En quantité comme en qualité, la ressource en eau est menacée dans les rivières comme dans les nappes. La situation pourrait être catastrophique dès cette année si les nappes ne se rechargent pas. Pour tirer la sonnette d’alarme, le conseil régional organisera des « assises de l’eau » le 7 novembre à Tours.

Par Jean-Jacques Talpin


C’est à Chambray-lès-Tours pour cause de travaux dans l’hémicycle d’Orléans, que le conseil régional se réunit ce jeudi.
Plusieurs dossiers sont inscrits à l’ordre du jour : contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles, renforcement de la politique en faveur de la vie associative, nouvelle stratégie de développement touristique régional. Mais c’est une communication sur les
« enjeux de l’eau en région » qui devrait d’abord focaliser les élus.
 Car il y a aujourd’hui urgence. 

Le changement climatique, renforcé cette année par la douceur hivernale, va nous priver à l’horizon 2050 de 30 à 40% de l’eau disponible. En plus de la non-recharge des nappes phréatiques, un des signes de ce changement est visible à Naussac où le barrage sur l’Allier qui alimente l’été l’étiage de la Loire n’est rempli qu’à 35% contre 72% l’an passé. A ces problèmes quantitatifs s’ajoute la dégradation de la qualité : seuls 19% des cours d’eau de la région sont en bon état écologique (contre 44% à l’échelle nationale). Ce qui signifie que 81% des masses d’eau de surface « ne sont pas en bon état écologique » à cause « des pollutions diffuses, essentiellement agricoles de synthèse ».

La Loire au plus bas à Orléans, un scénario que l’on devrait revivre cet été. Photo Magcentre

Assises le 7 novembre

Et ce n’est guère mieux pour les eaux souterraines qui alimentent à 90% les captages d’eau potable : 41% sont « en état chimique médiocre ». « Ce problème de l’eau doit nous conduire à réinterroger notre manière de vivre et de produire, estime le président régional François Bonneau, mais il faut une appropriation politique de ces questions ». C’est en effet à tous les acteurs, agence de bassins, collectivités, associations de trouver des parades pour que « ce bien commun qu’est l’eau » ne devienne pas à court terme un bien rare et donc cher. C’est pourquoi la région Centre veut mobiliser tous ces acteurs au cours des « assises de l’eau » qui se tiendront le 7 novembre sans doute à Tours. Même si la région possède peu de leviers d’actions dans le domaine de l’eau, elle peut au moins, via ces assises, jouer un « rôle d’animation et de concertation ». « Il faut un constat partagé par tous pour définir un cap », poursuit François Bonneau. Car l’eau est une question éminemment politique qui questionne nos pratiques agricoles, énergétiques ou industrielles. Aujourd’hui 55% des masses d’eau sont utilisées pour l’irrigation agricole, 34% pour la production d’énergie essentiellement nucléaire et seulement 7 % pour l’eau potable des habitants. En quantité comme en qualité, l’eau impacte donc notre vie quotidienne, mais aussi la biodiversité et globalement l’aménagement du territoire.

La « zéro artificialisation nette » contestée ?

L’artificialisation des terres et l’imperméabilisation des sols contribuent en effet fortement à la raréfaction de la ressource. Entre 1990 et 2018, les terres artificialisées dans la région ont augmenté de 38 000 hectares alors que les territoires agricoles ont régressé de 59 000 hectares. Dans la région, les 173 000 ha de terres artificialisées
« représentent potentiellement un manque d’infiltration vers nos nappes d’environ 300 millions de m3, ce qui représente un peu plus de 50% de notre consommation d’eau tous usages confondus ».
 Face à cela, l’État a lancé le programme de « zéro artificialisation nette » que récusent nombre de communes qui s’estiment bridées dans leur développement. « Dans ce domaine il faut intervenir intelligemment, insiste François Bonneau, si l’on veut que cet objectif soit partagé par tous, il doit être mené dans la concertation et le dialogue ». Le débat pourrait donc être chaud ce jeudi car tous les élus ne partagent ni le même constat, ni la même ambition. On pourrait en particulier assister à un débat intéressant entre écologistes et élus de gauche face au conseiller régional Marc Fesneau, par ailleurs ministre de l’Agriculture… souvent soupçonné d’être inféodé au lobby de l’agro-business.

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Commentaires

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  1. L’éducation minimum des citoyens associée à la mise en place d’obligation d’autorisation de travaux des propriétés privées devrait permettre d’aller dans le bon sens, en endiguant cette vogue actuelle d’artificialisation à outrance des sols de chacune des parcelles détenues par des particuliers, incluant les maisons individuelles.

    Combien d’entre nous tous observons des particuliers, comme des voisins, faire réaliser des travaux de chapes de bétons, de pose de pierre scellées par un enduit béton, de dalles imperméables, …, sur les allées d’accès véhicules, terrasses, espace de stationnement, …

    Nous sommes une majorité de citoyens à continuer de favoriser le ruissellement des eaux pluviales, plutôt que la pénétration dans le sol, en rendant volontairement imperméable nos sols, simplement par souci d’esthétique, pour ne pas avoir à désherber, pour mettre au carré son domicile, …

    Pour ceux qui ne résident pas en maison individuelle, baladez-vous dans les quartiers autour de vous et constatez par vous même.
    Il en va de personnes déjà avancées dans l’âge, comme de jeunes couples qui ne font nullement attention aux conséquences de leurs travaux.

    Dans la mesure où les citoyens ne sont pas naturellement et spontanément pas raisonnables ou insuffisamment insensibles au sujet, il serait souhaitable de légiférer pour obliger les citoyens à déposer des demandes d’autorisations de travaux, avec un service préfectoral centralisé, traitant de façon fluidifiée, toutes les demandes d’un département, pour éviter le clientélisme inévitable et passe droit octroyés par certaines collectivités locales.

    Nous n’avons plus le temps d’attendre que les citoyens deviennent raisonnables. C’est un utopie, il ne le deviendront pas spontanément et nous n’avons plus le temps d’attendre qu’ils soient éduqués.

    Il faut légiférer et mettre la barre de telle façon que nous arrêtions collectivement de continuer à autant mal nous comporter. Certains diront qu’il s’agit de mesure liberticide et en même temps, ne sommes-nous pas liberticides nous même, en ne songeons pas à la liberté du droit aux jeunes générations d’avoir un éventuel avenir possible ?
    Quid de la mesure et de nos comportements actuels est-elle le plus liberticide ? Franchement ?

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