Une lecture théâtralisée pourrait ne pas attirer les foules. Pourtant, le public ormois présent à l’auditorium de musique s’est régalé avec un petit bijou proposé par le couple d’artistes, Vicky Lourenço au texte et au chant, et Sacha Gillard à la musique.
Par Bernard Thinat
La romancière Lola Lafon s’est penchée sur la gymnaste roumaine, Nadia Comaneci, qui a révolutionné la gymnastique féminine aux Jeux olympiques de Montréal en 1976, étant la première à obtenir aux Jeux la note de 10/10, réalisant des figures jamais vues auparavant, et raflant au passage 3 médailles d’or individuelles sur 5 possibles, dont le concours général, devançant toutes les favorites soviétiques et américaines. Nadia n’avait que 14 ans à Montréal.
Lola Lafon a écrit un roman, « La petite communiste qui ne souriait jamais », retraçant sa vie, des Jeux de 1976 jusqu’à son exil aux USA. Vicky Lourenço a divisé le roman en 4 parties, soit 4 épisodes. Les Ormois (et quelques autres) ont eu droit au second, un petit bijou. Si le premier présenté dimanche 5 mars à Saint Jean de la Ruelle focalisait sur les jeux de Montréal, le second à Ormes, s’il revenait rapidement sur les Jeux grâce à un flash-back de Lola Lafon, évoquait beaucoup plus longuement l’après jeux.
Il y eut donc le retour triomphal à Bucarest, et les années suivantes où les journalistes occidentaux découvrent, avec effarement semblerait-il, que Nadia devient une jeune fille avec quelques kilos de plus et ses règles (à l’époque et encore aujourd’hui, évoquer les règles d’une sportive de haut niveau est tabou). Lola Lafon jette au lecteur les années Ceaușescu lorsque ce dernier, condamnant l’invasion militaire de la Tchécoslovaquie, est honoré plus que de raison par les chefs d’Etat occidentaux, puis la famine s’installant en Roumanie, l’interdiction formelle de tout avortement et la création d’une brigade spéciale de médecins chargée de vérifier si chaque femme en âge de procréer n’aurait pas eu recours à l’aiguille à tricoter. Certaines en sont mortes. On connaît la fin !
Il y a encore l’affaire du Championnat d’Europe de gymnastique à Prague en 1977, quand après la poutre que Nadia venait de remporter, le dictateur donne l’ordre à la délégation de rentrer sans que Nadia et les autres gymnastes roumaines ne puissent terminer leurs concours.
Et puis, juste après Montréal, cette mode aux Etats-Unis et ailleurs, de publier des photos de très jeunes filles de 10/12 ans, aux regards aguichants. La pédophilie rôde, thème plus largement évoqué dans cet autre roman de Lola Lafon, « Chavirer », dont je conseille vivement la lecture.
La lectrice et le clarinettiste – Photo B.T.
Le texte dit par la voix superbe de Vicky Lourenço, enrichi par la musique improvisée de Sacha Gillard, à la clarinette, au clavier-synthé et à la flûte népalaise, donne vie à Nadia, tient en haleine chaque spectateur, lequel découvre des éléments d’histoire qu’il avait pu oublier. Mais ce que retiendra avant tout le public, outre la vie de Nadia Comaneci, c’est la parfaite entente, la complicité entre la voix claire et chaleureuse de la lectrice et l’arrangement musical improvisé du clarinettiste.
* Dans le texte de Lola Lafon
La genèse du spectacle
A la base, me dira Vicky Lourenço, c’est une commande d’Annie Monnoury, responsable du pôle culturel à la mairie de Saran, qui a proposé à la Compagnie Ouvem’Azulis, de s’emparer de ce texte dans le cadre des Festiv’Elles dont le thème est « Femmes et sport » dans la perspective des JO de Paris en 2024. La Compagnie a pensé à Vicky, laquelle a accepté aussitôt, et très naturellement a pensé à Sacha Gillard comme partenaire musical.
Prochain épisode (n°3) : Samedi 18 mars à 16 heures à la médiathèque de Saran
Dernier épisode (n°4) : Samedi 25 mars à 16 heures à la salle des Cérémonies de Semoy
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