A l’issue d’une crise de plusieurs années, une nouvelle équipe et un nouveau maire, sans doute Thierry Charpentier, devraient gérer cette ville de la périphérie d’Orléans. Mais l’extrême droite pointe son (faux) nez et aura des élus dimanche soir.
Par Jean-Jacques Talpin
Après le mariage, souvent le divorce. Pour se présenter aux municipales, il faut parfois associer la carpe et le lapin afin de composer une liste complète attractive à présenter aux électeurs, quitte ensuite une fois élue à se déchirer et à se séparer. C’est le lot fréquent dans nombre de communes comme Courtenay dans le Loiret qui a longtemps arboré la palme de la plus ravageuse guerre fratricide.
Mais aujourd’hui le pompon revient incontestablement à Saint-Jean-le-Blanc, commune de 9 000 habitants du sud de la Métropole d’Orléans administrée depuis des lustres par la droite. En 2020 une liste conduite par Françoise Grivotet avec à ses côtés le pharmacien Thierry Charpentier l’avait emporté. Classée divers droite (« divers centre » selon les classifications de la préfecture) elle avait reçu le soutien (mais non l’étiquette) de LREM qui a vite retiré ses billes quand le bel édifice s’est lézardé. Tout semblait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes avec un mariage qui annonçait de beaux projets. Mais cette majorité s’est vite fissurée avant de voler définitivement en éclats. Cris d’orfraie, insultes, diffamations, menaces pèsent sur les élus du Conseil municipal depuis maintenant deux ans.
Thierry Charpentier, l’associé de Françoise Grivotet, devenu adjoint, a rapidement compris que la coexistence pacifique avec la nouvelle maire serait difficile voire impossible. Le budget a d’ailleurs été rejeté à trois reprises obligeant la Chambre régionale des comptes à se mêler au jeu.
A 18 voix près…
La logique aurait voulu que Françoise Grivotet, dont l’opposition dénonce la « gestion autoritaire et inhumaine » et les abus de « pouvoir personnel », démissionne. Mais refus absolu de la maire : « Quand un bateau sombre le capitaine est le dernier à sortir du bateau ». Et de dénoncer l’attitude de son ancien allié et premier adjoint « frondeur et pompier pyromane qui prétend éteindre le feu qu’il a lui-même allumé, mais qui n’a toujours eu qu’une seule ambition, celle de prendre ma place. »
Thierry Charpentier est donc entré en dissidence à la tête d’une équipe d’adjoints (à qui la maire avait retiré leurs délégations) et de conseillers municipaux frondeurs puis démissionnaires. D’où la nécessité d’une nouvelle élection municipale dont le gong final raisonnera ce dimanche 5 février avec vraisemblablement l’élection de la liste Charpentier dont le chef de file deviendra maire la semaine prochaine.
Les électeurs étaient donc appelés aux urnes ce dimanche 29 janvier pour départager trois listes en présence conduites par Françoise Grivotet, Thierry Charpentier et Valentin Blelly. Évidemment les relents d’une telle pétaudière ne sont pas de nature à booster la participation électorale. Et effectivement dimanche ils n’ont été que 2 320 à venir voter, soit 37,2% des 6 261 inscrits.
Malgré tout, le résultat a été clair : la liste de Thierry Charpentier est arrivée nettement en tête (1 087 voix soit 49,26%) devant Françoise Grivotet qui plafonne à 30% et 667 bulletins. En fait il n’a manqué que 18 voix à Thierry Charpentier pour dépasser la majorité absolue et l’emporter dès le premier round. Ce second tour dimanche 5 février réunira à nouveau les trois compétiteurs.
L’extrême droite bien présente
Un troisième larron, Valentin Blelly, est en effet venu s’immiscer à la dernière minute dans cette bataille à la tête de la liste « pour un avenir serein à Saint-Jean-le-Blanc ».
Une arrivée surprise et plutôt réussie avec 457 bulletins à son nom soit 20,67%. Il est vrai que le trentenaire Blelly, malgré sa jeunesse, n’est pas un inconnu. Classé aujourd’hui « divers droite », il serait plutôt à ranger dans « la droite extrême » : membre du Rassemblement national entre 2014 et 2015, puis adhérent LR, enfin coordinateur Loiret de Reconquête, le parti de Zemmour avant de s’en faire éjecter. Il était notamment présent à ce titre lors de la venue de Marion Maréchal à… Saint-Jean-le-Blanc.
Valentin Blelly n’est pas isolé au sein de sa liste de 29 coéquipiers dont plusieurs seront élus dimanche. Le collectif antifasciste d’Orléans a ainsi découvert parmi les candidats plusieurs proches de l’extrême droite, catholiques ou intégristes (familiers notamment du désormais célèbre « Goldofaf » alias Yves Alphé) ou de nationalistes comme Sabrina Khider référente pour le Loiret des Patriotes, le groupuscule de Florian Philippot.
Dimanche Saint-Jean-le-Blanc se choisira donc un nouveau maire et une nouvelle majorité mais au prix d’une porte entrouverte à l’extrême droite.
Un recours déjà en préparation ?
La paix et la sérénité post-électorales ne sont pas assurées dans cette commune. La maire vient en effet de déposer plainte pour « provocation à l’abstention de vote par manœuvre frauduleuse ». Un carton contenant un millier de cartes d’électeurs aurait en effet été dissimulé dans une pièce de la mairie empêchant bon nombre d’électeurs de satisfaire à leur devoir électoral. Françoise Grivotet estime qu’il s’agit d’un « acte manifestement frauduleux (…) fait de manière intentionnelle ». Et donc de nature à fausser le résultat de dimanche soir qui ne devrait guère être favorable à la maire sortante.
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