En 2000, le modèle sanitaire français était considéré par l’OMS comme le meilleur. Depuis il a chuté dans les classements. Si la qualité de notre médecine reste excellente, son organisation est à l’agonie. C’est l’opportunité d’en finir avec toutes les rustines palliatives qui ne font que retarder le moment où notre système de santé va s’effondrer.
Par Jean-Paul Briand
Les symptômes d’un mal profond
Les hôpitaux sont en perpétuelle crise. La pénurie de personnel y est chronique. Beaucoup d’agents épuisés tombent en arrêt maladie. Ne pouvant plus mener une vie familiale en lien avec leur vie professionnelle, de nombreux hospitaliers démissionnent. Des services ferment. Pas de mois sans que des Urgences arrêtent momentanément leur activité.
Les déserts médicaux n’épargnent aucune spécialité médicale, ni aucun territoire. Croyant découvrir le remède souverain, régulièrement des élus militent pour interdire la liberté d’installation des libéraux ou de contraindre leur activité. Alors que les hôpitaux sont en grande difficulté, la médecine libérale, se sentant méprisée et agressée, déclenche des grèves qualifiées d’irresponsables qui perturbent un peu plus les services d’urgence.
Les communes entrent en concurrence déloyale pour récupérer sur leur territoire des toubibs mercenaires. Comme en temps de guerre, on affrète des avions pour mettre en place des mini ponts sanitaires interurbains. Les collectivités territoriales déversent de l’argent dans des maisons médicales souvent longtemps vides de professionnels ou occupés par des médecins débauchés dans des pays où ils manquent cruellement.
Une loi réinvente les officiers de santé et fait exploser la coordination des soins. Ulcérés et désemparés, les syndicats de médecins, arc-boutés sur leurs prérogatives et revendications tarifaires, claquent la porte des négociations conventionnelles avec l’assurance maladie.
Toutes ces tensions exacerbées, dont on pourrait allonger la liste, sont les symptômes d’un mal profond qui détruit notre système de santé.
Définir qui fait quoi
Avant de désigner des boucs émissaires, de proposer des potions magiques contreproductives, il serait bon de ne pas ignorer un principe médical de base : « Primum non nocere ». Mais surtout reconnaître que notre modèle d’accès aux soins souffre d’une désorganisation chronique mortifère.
Les décideurs semblent avoir enfin compris que le numerus clausus était une ineptie surtout avec le vieillissement de la population et l’accroissement des maladies chroniques. Il convient maintenant qu’ils s’interrogent sur la façon dont doivent s’harmoniser médecine de ville et médecine hospitalière, privé et public, généralistes et spécialistes. Plutôt que laisser ou favoriser des concurrences coûteuses et délétères, il faut construire une authentique coordination et une alliance apaisée entre hospitaliers et professionnels de ville, entre médecins et paramédicaux, entre salariés et libéraux. Définir enfin qui fait quoi.
Lors de ses vœux aux acteurs de la santé, le ministre François Braun, a souhaité « sortir de l’enchaînement infernal des crises, et casser cette spirale dépressive qui touche tous les acteurs et toutes les composantes de notre système ». Cette crise peut être une chance d’y parvenir. Il faut la saisir pour tout mettre à plat et partir d’une page blanche afin de réinventer, avec les usagers et les professionnels, un système solidaire, cohérent et compréhensible, au service de la population.
Plus d’infos autrement sur Magcentre : Premier round gagnant pour Stéphanie Rist, députée du Loiret