Après un examen en commission des affaires sociales réussi, la loi présentée par la députée de la 1ère circonscription du Loiret remporte son passage en première lecture à l’Assemblée Nationale le 18 janvier dernier. Voté par une assemblée aux rangs trop clairsemés, ce texte de loi souhaite améliorer l’accès aux soins des Français.
Par Jean-Paul Briand
La loi « portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé » a été votée en première lecture par 62 voix contre 3. Elle doit être examinée par le Sénat le 14 février 2023. Cette loi va permettre l’accès direct aux infirmièr(e)s de pratique avancée (IPA), aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes.
Cette nouvelle « loi Rist » est rejetée par les syndicats des praticiens libéraux mais aussi par l’Ordre des médecins. Lors de ses vœux, le président de l’Ordre national des médecins, le Dr François Arnault, en présence de la ministre déléguée chargée des professions de santé, a fustigé le texte de la députée loirétaine en rappelant qu’« aucun professionnel ne saurait se substituer au médecin pour permettre de le contourner dans ses fonctions régaliennes de diagnostic et de choix thérapeutique ».
Le docteur Arnault a affirmé qu’il était contre une médecine à deux vitesses mise en place par cette nouvelle loi Rist. Il oublie un peu vite que cette médecine à deux vitesses existe déjà avec les tarifs conventionnels et le secteur II à honoraires libres.
Les infirmier(e)s de pratique avancée
Pour la députée Rist, son texte de loi devrait lutter contre les déserts médicaux. Dans une récente interview pour Magcentre, elle expliquait qu’il va « favoriser un meilleur accès aux soins ». Pas si sûr.
Si les syndicats médicaux craignent, sans le dire, la concurrence des IPA, qu’ils soient rassurés. Ce n’est pas pour demain. Un(e) IPA doit déjà obtenir son diplôme d’infirmier(e) avec 3 ans d’études. Après 3 années minimum d’expérience, il est possible de valider après une formation de 2 années supplémentaires un diplôme d’IPA dans les domaines d’intervention choisis. Dans le meilleur des cas, il faut donc 8 ans pour former un(e) IPA. Ces professionnels ne vont pas résoudre les difficultés actuelles d’accès aux soins.
L’accès direct aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes
Pour les kinésithérapeutes, l’accès direct n’est pas anodin. Au fil des années d’exercice, chaque médecin tisse des liens de confiance avec quelques kinésithérapeutes. L’accès direct va faire disparaître ces liens. Que fera un kiné, sans la pression amicale de son médecin prescripteur, lorsqu’en accès direct il pourra choisir entre le massage d’un jeune sportif et la rééducation malaisée d’une personne très âgée ?
Pour les orthophonistes déjà « surbooké(e)s », que se passera-t-il quand arriveront, en accès direct, sans aucun triage préalable, une multitude d’enfants en échec scolaire pour autres choses que des difficultés de parole, de langage ou de communication ?
La prochaine loi Rist risque de ne pas être la solution efficace et cohérente pour obtenir rapidement des soins de kinésithérapie ou d’orthophonie.
A la proposition de loi de la députée orléanaise a été ajouté un amendement obligeant les médecins à organiser des gardes sur tout le territoire national pour que la population ait « la garantie d’un accès aux soins non programmés pendant les horaires de fermetures des services hospitaliers et des cabinets médicaux ». Devant ce qu’ils estiment des attaques intolérables les syndicats médicaux ont décidé de quitter la table des négociations conventionnelles en cours avec la Caisse nationale d’assurance maladie…
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