Deux ensembles s’étaient donné rendez-vous dans la belle salle de l’Alliage à Olivet ce vendredi 13 janvier, et pas des moindres. Les Folies Françoises se sont associées à Musique de Joye pour des « échos vénitiens » qui ont ravi un public venu nombreux pour cet embarquement immédiat vers la cité des doges.
Par Anne-Cécile Chapuis
Les Folies Françoises en concert à l’Alliage Olivet. Patrick Cohen-Akénine, violon et direction, Benjamin Chénier, violon, Sophie Cerf, alto, François Poly, violoncelle, Béatrice Martin, clavecin, Frédéric Desenclos orgue. Photo AC Chapuis
La salle est belle et accueillante et, comme le souligne Patrick Cohen Akénine, directeur musical et violon solo des Folies Françoises, elle a une acoustique généreuse et conviviale. Toutes les conditions sont réunies pour un beau concert. Et ce fut le cas.
Venise y est célébrée et, à tout Seigneur tout honneur, c’est Monteverdi (1567-1643) qui ouvre la séance, avec le beau prologue de l’Orfeo (la musica) composé en 1607 par ce « déclencheur de nouvelles pratiques » précurseur d’une musique expressive et théâtralisée. Magnifiquement mise en valeur par les cordes et continuo des Folies, la jolie voix de la soprano Violaine Le Chenadec vient conter le voyage d’Orphée aux enfers, avec une réplique des vents venue du fond de la salle.
La soprano Violaine Le Chenadec devant l’ensemble Musicque de Joye, à droite : Arnaud Brétécher, sacqueboute, Jean-Charles Legrand, sacqueboute et direction, Jean-Pierre Canihac et Serge Delmas, cornets à bouquin. Photo AC Chapuis
Le décor est planté
Le spectateur est saisi, le décor est planté, nous sommes à Venise, emportés par l’effet de double chœur qui en était la spécialité, avec les musiciens qui prenaient place dans les deux tribunes encadrant le chœur de la basilique Saint-Marc.
Et pour renforcer le dépaysement, des projections de photos sur grand écran entraînent le spectateur dans les méandres de la cité des doges, avec ses vues mythiques qui ont fait le tour du monde, mais aussi avec des détails ou détours où le promeneur aime à se perdre.
Place ensuite à Gabrieli, Palestrina, Lassus, dans un mixage fort bien orchestré qui donne la parole aux cordes, voix, vents, offrant un chatoiement de couleurs savamment dosé par les différents musiciens.
Une heureuse rencontre
La rencontre des Folies avec Musique de Joye, ensemble fondé en 1986 par Alain Recordier et aujourd’hui placé sous la direction artistique de Jean-Charles Legrand, est récente et elle est heureuse. Les sons rauques des cornets à bouquin renforcent la subtilité des cordes, la suavité des saqueboutes s’accorde avec l’orgue et le clavecin, et tous encadrent une soprano expressive à la voix cristalline et tout en nuances.
Violaine le Chenadec à l’Alliage Olivet. Photo AC Chapuis
C’est un déferlement de musique baroque, avec les affetti inhérents à l’époque, avec la virtuosité qui semble couler de source malgré la performance, avec les effets d’écho qui se jouent de l’acoustique pour entrer dans un dialogue enchanteur. Soulignons au passage les soli de cornet à bouquin par Serge Delmas dans « Suzanne un jour » de Lassus et ceux de Patrick Cohen Akénine au violon dans Palestrina : deux grands moments de temps suspendu.
Un bis rassemble les musiciens avec brio dans un extrait des Scherzi musicali de Monteverdi, intitulé la Bellezza. Comme son nom l’indique.
Les échos vénitiens peuvent se prolonger dans le hall du théâtre d’Orléans où les photos de Bertrand Deshayes et les peintures de Carole Melmoux sont visibles jusqu’au 30 janvier 2023.
Saluons en tout cas le bel alliage (sic) de la programmation Scène Nationale avec celle de l’Alliage Olivet, dans des échos vénitiens qui promettent de résonner longtemps encore.
Pour en savoir plus : Musicque de Joye Orléans
Plus d’infos autrement sur Magcentre : La belle saison des Folies Françoises