Le vernissage de la nouvelle exposition du centre Charles Péguy consacrée à Pierre, livre de jeunesse inachevé de l’écrivain Péguy, a fait salle comble ce vendredi 13 janvier 2023. Avec la surprise de voir réunis autour du grand homme Serge Grouard et Jean-Pierre Sueur, l’actuel et l’ancien maire d’Orléans.
Par Sophie Deschamps
Serge Grouard et Jean-Pierre Sueur, deux maires complices autour de Charles Péguy. Photo Sophie Deschamps
Ce n’est pas tous les jours que l’on peut voir côte à côte Serge Grouard et Jean-Pierre Sueur, tout sourires, voire complices. C’était pourtant le cas ce 13 janvier pour le lancement de l’exposition Naissance d’un écrivain : « Pierre », un manuscrit de Charles Péguy pour les 150 ans de sa naissance. L’actuel maire d’Orléans a rappelé l’importance du Centre Charles Péguy « créé en 1964 à un moment où Charles Péguy était peut-être un peu marginalisé dans la pensée générale française. Il est revenu depuis et c’est tant mieux. Ce centre a l’immense mérite de réunir l’essentiel de son œuvre. Je tiens à dire que Péguy participe au rayonnement d’Orléans. Et ce qui me marque en tant que citoyen, c’est sa liberté de pensée totale qui l’amenait souvent à se fâcher avec beaucoup de monde ».
Reconnaissant « qu’il est difficile de bien connaître Péguy », Serge Grouard a salué les personnalités qui en sont des spécialistes dont l’ancien maire Jean-Pierre Sueur au moment même où celui-ci entrait dans la salle, déclenchant l’hilarité des nombreuses personnes présentes. Le sénateur a rappelé, entre autres, que « Péguy a vécu dans une grande pauvreté. Il publiait ses livres dans ses Cahiers de la Quinzaine, imprimés à 1 200 exemplaires avec beaucoup de désabonnements, car il voulait écrire la vérité et surtout rester indépendant. » D’où cette célèbre phrase : « Dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, dire bêtement la vérité bête, ennuyeusement la vérité ennuyeuse, tristement la vérité triste. »
Pierre, une œuvre de jeunesse inachevée
Cette exposition est signée Oriana Gatica-Demey, la nouvelle directrice du centre Péguy. Soulignant le sous-titre étrange du livre “commencement d’une vie bourgeoise”, elle a expliqué le choix de Pierre. Un manuscrit écrit en 1898 alors que le jeune Péguy âgé de 25 ans est encore inconnu. Il devait comporter quatre parties. Cependant, seule celle sur l’enfance orléanaise de l’auteur existe : « C’est la première tentative autobiographique de Charles Péguy. Il y parle de sa scolarité orléanaise, de son enfance, de sa famille. De son milieu modeste avec la description minutieuse de sa maison, celle d’une rempailleuse de chaise (située au 23 rue du Faubourg Bourgogne et détruite en 1923, NDLR).
Un manuscrit qui ne sera pas publié de son vivant mais qui marque un temps fort de la vie de l’écrivain. »
C’est le livre de Péguy qui peut paraître le plus abordable mais comme le note avec humour Oriana Gatica-Demey : « Avec Péguy, les choses ne sont jamais si simples puisque ce texte se prête à différents niveaux de lecture, à découvrir dans l’exposition. C’est aussi une invitation à lire Péguy et à découvrir ses autres textes. »
Car il faut venir bien sûr au centre Charles Péguy voir tous les documents présentés pour cette expo : photos, pages manuscrites où l’on découvre l’écriture parfaite de l’écrivain tant par le style que par la calligraphie.
Comme d’habitude, le public pourra repartir avec un petit livret gratuit, richement illustré. Avec la possibilité sur place et dans le fascicule d’écouter des textes de Péguy lus par le comédien orléanais Éric Cénat grâce à des QR code. Et Pierre sera bientôt disponible en librairie grâce aux éditions Corsaire.
Mais il ne faudrait pas oublier que Péguy avait aussi ses zones d’ombre. Notamment, ses écrits devenus haineux vis-à-vis de Jaurès et cités dans l’article de Magcentre de 2014, Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?
Extrait de Pierre
Sa grand-mère, vivant à Moulins, vient de revendre sa fabrique d’allumettes désormais interdite par l’État. Elle décide alors de descendre à Orléans par l’Allier :
Maman s’amusa beaucoup à voyager dans ce bateau (…) Ma grand-mère s’amusait beaucoup moins, et se demandait sérieusement si elle pourrait gagner son morceau de pain ; elle avait choisi Orléans non pas seulement parce que le pays bas est toujours plus facile que le pays haut, non pas seulement parce que l’on descend naturellement, mais aussi parce qu’Orléans était la première grande ville que l’on trouvât en descendant, et parce que les grandes villes sont un peu moins dures à ceux qui sont dans la misère.
Exposition Naissance d’un écrivain : “Pierre”, un manuscrit de Charles Péguy.
Jusqu’au 29 avril 2023 au Centre Charles Péguy, 11 rue du Tabour à Orléans
Ouvert du mardi au samedi de 14h à 18h, entrée libre.
Plus d’infos autrement sur Magcentre : Jean-Pierre Sueur : lettre ouverte d’un sénateur qui n’aime pas le CDN d’Orléans