[Rétro] Max Nublat, grande figure du Montargois et du Loiret, s’en est allé

La trêve des confiseurs est pour Magcentre aussi l’occasion d’un coup d’œil dans le rétroviseur de l’année 2022. Nous vous proposons de relire quelques articles qui ont marqué cette année…

 

Disparu le 17 septembre 2022, Max Nublat a laissé son empreinte sur toute la région. Il était alors le symbole du communisme municipal triomphant, d’abord à la mairie de Chalette-sur-Loing puis à celle de Montargis, qu’il dirigea de 1989 à 1997. Passionné par sa ville, il était un des initiateurs du rapprochement avec la Chine dont le dirigeant Deng Xiaoping fut employé à Hutchinson.

Par Izabel Tognarelli

 

Qui aurait dit à ce petit enfant, orphelin de père et de mère, handicapé par une poliomyélite, que son nom figurerait un jour dans le Maitron, dictionnaire biographique du mouvement ouvrier et du monde social et syndical ? Né en 1931, Max Nublat avait perdu sa mère, femme de ménage, alors qu’il avait deux ans. Quant à son père, chauffeur, il est mort deux mois après la mobilisation, en août 1940. Une telle enfance aurait pu le laisser brisé, mais il n’en fut rien grâce à son entourage familial, et plus particulièrement ses grands-parents maternels qui lui prodiguèrent soins et affection.
« C’est grâce à eux que je suis toujours en vie » rappelait-il.

Une vie, une trajectoire

Mais de là à ce que le petit garçon claudiquant – de cette démarche qu’il garda toute sa vie et qui faisait qu’on le reconnaissait de loin, immanquablement – devienne la figure politique reconnue et respectée y compris de ses adversaires, il y avait un pas, ce qui n’est pas peu dire quand on garde les séquelles d’une telle maladie. Cahin-caha, « un pied en 36, l’autre en 43, ce qui fait que je chausse en moyenne du 39,5 », comme il aimait à le répéter avec une pointe de malice, le jeune Max Nublat a tracé son chemin jusqu’à être accueilli à bras ouverts, en Chine, par un grand chef d’État.

Si la dureté de ses premières années dans l’existence ont eu raison d’une éventuelle foi naissante (son grand-père était « un mécréant », mais sa pieuse grand-mère avait voulu qu’il soit enfant de chœur), elle n’entama en rien sa volonté d’apprendre. Il faut dire qu’à cette époque, dans le sillage de 1936, l’ascenseur social fonctionnait à plein régime et les enfants de milieux modestes pouvaient espérer s’extraire par l’instruction. Ainsi, le jeune Max Nublat, qui en raison de sa maladie avait passé une partie de sa scolarité à la maison, prit le chemin de l’École Normale, à Orléans, là où l’on formait les instituteurs. Sa vocation syndicale a commencé dès ces années-là, en 1947, avec son inscription au Syndicat national des instituteurs : il n’avait que 16 ans. Son inscription au PCF a suivi dans la foulée, en 1948. Son implication dans ce parti politique, son militantisme, sont peut-être une autre clef pour comprendre l’ascension de ce jeune homme qui avait grandi à Mareaux-aux-Prés.

Mais dans ce destin, tout se noua à Châlette-sur-Loing, puis à Montargis. Sa première affectation l’amena à Châlette, où l’usine Hutchinson faisait travailler 5 000 ouvriers. Beaucoup étaient d’origine étrangère, des Russes, des Ukrainiens, des Italiens, des Espagnols, en fonction des vagues d’immigration. Des dizaines de nationalités se côtoyaient ainsi, dans cette petite ville de l’agglomération montargoise. A tous, il enseignait le français et les matières fondamentales, avec cette manière qu’il avait de s’intéresser aux autres, sa personnalité chaleureuse, à l’écoute, et cet humour qui ont fait de lui une figure populaire et estimée, bien au-delà du Montargois.

Bien sûr, on pourrait écrire longuement sur cette carrière politique, sur son élection à la mairie de Châlette, d’abord comme conseiller municipal, en 1964, puis comme maire en 1971. On pourrait aussi narrer le pari politique qui le conduisit à prendre les rênes de la mairie de Montargis une première fois de 1977 à 1983, puis de 1989 à 1997, date de sa démission pour des raisons de santé (la fonction de maire d’une ville comme Montargis étant particulièrement lourde) et du passage de flambeau à son successeur, Jacques Reboul. On pourrait ourler sur ses mandats de conseiller général (1967-1973 ; 1998-2004) et de conseiller régional, mais ce qui compte par-dessus tout, c’est le souvenir que laisse Max Nublat dans l’esprit de ceux qui l’ont connu. « Depuis le décès de Max, les souvenirs se bousculent dans ma tête », nous confie Jacques Reboul, qui a fait sa connaissance en 1968, alors qu’il avait vingt ans. « C’était un homme aimé. Les gens l’aimaient car il vivait près d’eux, comme eux, proche d’eux. C’est ce que je pense profondément ».

La rencontre avec Deng Xiaoping

Entre 1920 et 1927, futur dirigeant de la Chine, Deng Xiaoping a passé sept ans en France en tant qu’étudiant, dans le cadre du mouvement Travail-Études. Au même titre que d’autres jeunes intellectuels chinois de ce même mouvement, le jeune Deng a travaillé à Hutchinson, à « l’atelier godasses ». Il n’est un secret pour personne qu’il était plus inspiré par le syndicalisme que par la nature du travail pour lequel il était alors rémunéré. Une soixantaine d’années plus tard, à l’été 1982, l’étudiant devenu dirigeant de la Chine invite une délégation de maires des villes de France qui ont accueilli les étudiants du Mouvement Travail-Études. Max Nublat – alors maire communiste de Montargis – se retrouve ainsi dans la délégation, avec les maires de villes comme Orléans, Tours, Nantes, Lille et Lyon. A Pékin, au sortir de l’avion, il est accueilli avec une banderole sur laquelle sont écrits ces mots « Bienvenue au maire de Montargis ». Max Nublat fut emmené à l’Assemblée du Peuple où Deng Xiaoping lui donna l’accolade et lui accorda un entretien. En présence d’un interprète, le leader chinois lui raconta ses souvenirs et mésaventures à Châlette et Montargis. Quels fabuleux destins !

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