Michel Mothmora est un cas unique dans la boxe française. Champion de France de boxe à 37 ans, il a fini par raccrocher les gants en 2021 pour se consacrer à son métier de traiteur. Jusqu’au dernier round, un documentaire émouvant coréalisé par Thomas Larabi et Anthony Audureau lui rend un hommage mérité.
Par Jean-Luc Vezon
Projeté en avant-première au cinéma Les Lobis le 19 décembre devant une salle comble, le film a ému aux larmes le champion aux 27 victoires (dont 15 par KO) et au palmarès long comme le bras : champion du monde WBF (2016), champion intercontinental WBF (2015, 2016), champion international WBF (2013, 2014) et champion de France 2019. Même si la World Boxing Foundation (WBF) n’est pas la fédération la plus connue (1), Michel Mothmora est un grand boxeur.
« Je n’ai pas de regrets, je voulais laisser une empreinte, je suis fier du travail accompli avec l’aide de ma famille », a déclaré Michel Mothmora à l’issue de la projection de ce film très réussi produit par la jeune société de production parisienne Trois heures moins le quart avec le soutien de Ciclic Centre Val de Loire et de TV Tours.
Né à Fort de France, le garçon est un adolescent turbulent et bagarreur. Installé à Ormes, dans la périphérie orléanaise, il enfile les gants à 13 ans et rejoint le CB Ormois. « La boxe m’a sauvé et a canalisé mon énergie », assure le Martiniquais de 42 ans qui sera par la suite licencié au Ring Giennois. Malgré cinq défaites pour ces cinq premiers combats, Michel persévère et, à force d’entraînement et de détermination, conquiert ses premiers titres avec en point d’orgue une ceinture de champion de France en 2019. Il aura fallu sept tentatives au Phénix pour réaliser « le rêve de sa vie ». Souvent victime de décisions arbitrales contestables, Michel n’a jamais lâché l’affaire.
Le documentaire restitue parfaitement cette carrière en filmant au plus près ce champion élégant, véritable gentleman des rings. On le découvre à l’entraînement où il passe des heures à courir, soulever des poids, sauter à la corde, nager dans un bassin ou à frapper dans un punching-ball. Ses programmes d’entraînement ludiques, adaptés à sa faiblesse des poignets, en disent long sur son abnégation. Ignoré de la fédération française de boxe, Michel Mothmora s’est construit seul en organisant sa vie autour de la boxe. Son domicile sera sa salle de boxe et sa femme Vanessa sa partenaire de tous les instants pour atteindre ses objectifs. A Ouzouer-le-Marché puis à Blois, il consent d’immenses sacrifices financiers pour réussir dans le noble art bordurant parfois la précarité.
Bien que professionnel, il doit travailler en parallèle, d’abord comme charcutier-traiteur (son métier de base) puis comme professeur technique de cuisine à la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Avec son association, le MMBC, il finira par organiser ses combats.
Poussant la porte des vestiaires, la caméra de Larabi-Audureau nous fait aussi entrer au cœur du combat pour le titre national des moyens contre Francis Tchoffo en 2019. La violence des coups et la difficulté de ce sport apparaissent alors durant les dix rounds du combat que Michel Mothmora remporte à l’unanimité des trois juges.
Reconversion réussie
Michel finit par arrêter sa carrière le 6 novembre 2021 à Blois après une défaite un peu amère. Celui qui aurait aimé participer aux JO de 2024 se consacre désormais à sa femme Vanessa, à ses trois enfants et à son travail. Passionné de cuisine, il a ainsi repris son activité de traiteur en créant Michel Mothmora artisan charcutier traiteur tout en donnant des cours d’EPS au CFA de Blois.
« La boxe a été ma première maîtresse. Mais désormais, je lui ai dit au revoir » nous dira Michel en souriant. Soucieux de transmission, il répond néanmoins aux sollicitations de diverses associations, maisons de quartier, SEGPA, maisons d’arrêt pour témoigner de son parcours et donner l’envie aux jeunes de boxer et faciliter l’insertion. Titulaire d’une licence professionnelle Développement social et médiation par le sport, Michel Mothmora a la fibre sociale chevillée au corps et croit aux vertus de la boxe éducative.
Jusqu’au dernier round sera diffusé sur les antennes de TV Tours-Val de Loire et sa plateforme internet.
(1) Par rapport à la WBA, WBC, l’IBF et WBO.