Depuis 15 ans, l’opérateur Orange est victime de vols de cuivre sur son réseau de téléphonie fixe. Mais aujourd’hui, ces vols explosent en raison du prix de la tonne, notamment dans le Loiret, département le plus touché du Centre-Val de Loire. La Gendarmerie, qui a renforcé ses dispositifs de surveillance, fait appel à la vigilance des citoyens.
Par Estelle Boutheloup
Franck Griffon (g.) et Rémy Colaprète d’Orange tiennent une section de câble de cuivre d’un mètre qui permet de raccorder 224 foyers. Photo EB
Le dernier en date remonte au 7 décembre : un nouveau vol dans le Loiret, sur la commune de Chevillon-sur-Huillard, un peu moins de 300 mètres de câbles en cuivre. « Les chiffres bougent presque tous les jours. Ce n’est plus anecdotique maintenant, c’est devenu un vrai fléau », souligne Rémy Colaprete, délégué Régional Orange Centre-Val de Loire. Sur la table, un échantillon d’un mètre sous gaine de 1,7 kg, « la section de câble la plus volée et qui permet de raccorder 224 foyers. » Et une coupure de câble, c’est plus de ligne de téléphone fixe, voire plus de télévision ni d’Internet, impactant non seulement les abonnés d’Orange mais potentiellement les clients des autres opérateurs raccordés au réseau historique d’Orange.
Des techniciens en mode réactif
« Une recrudescence de vols qui va de pair avec l’explosion du prix de la tonne de cuivre d’environ 8 000 €. Forcément ça ouvre l’appétit ! » Ainsi pas moins de 134 vols ont été dénombrés depuis le début de l’année en région Centre-Val de Loire dont la moitié dans le Loiret, essentiellement en zones rurales, en général vers 23h ou entre 2 et 4 heures du matin. « Un record absolu avec une hausse de 33% par rapport à 2021. Soit 78 km de câbles volés (119 tonnes), l’équivalent de la distance Blois-Orléans. »
En attendant la remise en état des infrastructures, les abonnés Orange peuvent récupérer 200 gigas octets mis à disposition par l’opérateur ainsi qu’une clé de 4 gigas en boutique. Car il faut compter une petite semaine de réparation hors délais de fourniture d’une durée moyenne de trois semaines : « il n’y a plus de stock, le marché est en tension », explique Franck Griffon responsable Unité d’intervention Orange des départements 18, 28 et 45. Et le contexte en Ukraine ne favorise pas l’approvisionnement. Pour autant, les techniciens sont réactifs. « Dès la remontée d’alarme, une équipe est dépêchée sur place pour constater les dégâts. Car le vol s’accompagne de détériorations des infrastructures de génie civil : chambre, plaque de chambre… » Une plainte est déposée et le chantier est planifié : « un travail manuel, minutieux et chronophage. Il faut repasser le câble, et reclipser une à une les 224 paires de fil de cuivre… Autant de temps que l’on ne passe sur d’autres opérations. »
Colonel Médard de la Gendarmerie Région CVL et Rémy Colaprète. Photo EB
Délinquance d’opportunité ou réseaux organisés
Techniques d’ouverture de chambres, systèmes d’alarme, caméras et autres surveillances discrètes… même si des moyens sont en place, le phénomène s’accentue depuis une dizaine d’années, amenant l’opérateur à se rapprocher et à coopérer de façon importante avec la Gendarmerie. « Le Loiret, surtout dans l’Est, est le plus touché, avec l’Eure-et-Loir car ils sont proches du réseau autoroutier et de la région parisienne, souligne le Colonel Olivier Médard, Gendarmerie de la Région Centre-Val de Loire. Ça va de la délinquance d’opportunité à des réseaux organisés qui peuvent venir de l’étranger. On a un œil aussi sur des personnes doctrinales et sur des périmètres de retraitement et d’évacuation du cuivre avec des filatures qui peuvent aller jusqu’en Belgique depuis l’Eure-et-Loir ».
Au-delà des patrouilles régulières sur les routes, des échanges d’informations et des dispositifs de surveillance, la gendarmerie mène des actions de prévention et de pédagogie auprès des particuliers et des collectivités territoriales via notamment des conventions sur mesure en fonction des spécificités régionales : « il faut rendre la société la plus attentive possible à ce genre de délinquance et cela passe par la vigilance citoyenne. En cas de soupçons, on fait le 17. Nous avons une mission de protection des populations, et nous devons faire en sorte que l’on ne désorganise pas la société. » Car les volumes de câbles augmentent avec le tout numérique (réseaux bancaires, télésurveillance, paiements chez les commerçants…).
Quant à la solution ? « La sortie c’est la fibre déployée par Orange à vitesse grand V, le verre n’a pas de valeur marchande, ni de réutilisation possible », conclut Rémy Colaprete.
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