Le Nefertiti Quartet devait venir un samedi après midi, il y a deux ans. Et puis tout a été annulé. Et le revoilà en soirée, ce vendredi 28 octobre, dans une salle Vitez comble, au Théatre d’Orléans. Heureux de jouer, la pianiste et leader Delphine Deau l’a répété avec enthousiasme. Et la musique le disait aussi.
Par Bernard Cassat

Le quartet Nefertiti. Photo Fabien Breuil
Le Nefertiti Quartet s’est mis dans l’ombre inspiratrice de Wayne Shorter. Et il a fait du chemin, pendant la dizaine d’années de son existence. Les quatre musiciens totalement complices ont construit un son bien à eux. Sur une rythmique qui roule avec la régularité d’un train, piano ou saxo ou les deux dessinent des paysages, des atmosphères riches dans lesquelles chacun s’exprime. Camille Maussion au saxo, souvent au ténor, fait monter l’intensité et se promène dans la mélodie, avec des volutes magnifiques qui constamment essayent de rester dans les hauteurs, de faire durer ces moments intenses de plaisir musical en respectant le son du groupe. Et chacun fait de même pour transmettre un jazz vigoureux, nerveux, vivant, qui va vite et fort, au cœur du plaisir de cette liberté seulement contrainte par sa propre existence : ne pas s’arrêter, ne pas tomber. Et pourtant tout a une fin. Leur morceaux souvent n’en ont pas vraiment, arrêtent sans conclusion. Mais leur énergie repart sur un autre titre, sur une autre image.
Des mélodies romantiques
La pianiste, comme souvent dans les quartets de jazz, participe soit de la mélodie, soit de la rythmique. Elle sait prendre la main et emmener ses coéquipiers dans des virées originales. Mais la contrebasse de Pedro Ivo Ferreira sort souvent du rythme pur, cherche des sons qui eux aussi créent des univers. Pierre Demange à la batterie se lance dans des bruitages féconds, débouche sur un fleuve pas vraiment tranquille, pouvant aller jusqu’à l’orage. Suivi bien sûr par ses comparses. Après quoi Camille nous ravit d’une petite mélodie après tempête, un air lyrique d’un romantisme absolument touchant. C’est cette gymnastique stylistique qui fait la plus grande originalité du groupe et crée son plaisir d’écoute. Le charme des mélodies sensuelles, la puissance de l’énergie, la volupté de l’écoute.
Lauréat de Jazz Migration, entre autres, le Nefertiti Quartet a déjà trois enregistrements derrière lui. Ces jeunes musiciens sont donc bien installés dans le paysage du jazz contemporain. Ils en tirent une substantifique moelle originale et très au point, qui va certainement les nourrir pour longtemps et les amener loin.
Nefertiti Quartet
Dernier cd : Frameless
Delphine Deau : piano, compositions
Camille Maussion : saxos
Pedro Ivo Ferreira : contrebasse
Pierre Demange : batterie
Scène nationale d’Orléans