Invités par la Scène nationale d’Orléans, la compagnie X-Press et son leader Abderzak Houmi sont venus rappeler mardi 18 et mercredi 19 qu’Y’a plus d’saisons. Dans un dispositif scénique impressionnant, les sept danseurs-euses ont évolué dans la neige et la pluie. Mais la danse s’est un peu effacée derrière les éléments.
Par Bernard Cassat
Danser sous la pluie. Photo Carmen Morand
Abderzak Houmi et sa compagnie X-Press ont entamé le travail sur leur nouveau spectacle au printemps 2021, après le covid, à l’Espace Malraux de Tours. Abderzak expliquait alors à notre confrère de la Nouvelle République que sa réflexion était très technique. « C’est l’aboutissement d’un cycle débuté en 2013 avec un travail sur tapis rebondissant. »
Et effectivement. Y’a plus d’saisons nous montre des danseurs qui évoluent sur un un sol mou, dans la neige, dans la glace ou sous la pluie. Avec des dispositifs techniques invisibles et incroyables, la scène se transforme en un matelas gonflé gorgé de neige ou d’eau. Les effets visuels sont impressionnants. Les sept danseurs évoluent dans des nuages de neige et bien sûr en jouent, lancent des jets de flocons qui miroitent dans la lumière et font un brouillard blanc merveilleux. Cette neige renforce la mollesse du sol que l’on ne voit quasi plus puisque les baches gonflables sont recouvertes de grains blancs. Les danseurs-euses se lancent par terre, rebondissent, sautent tous ensemble ou chacun séparément. Prouesses techniques qui créent de très belles images, des moments époustouflants, inhabituels sur une scène de théatre.
La saison des pluies. Photo Carmen Morand
Mais ces images ont du mal à raconter une histoire qui capte l’attention. Au début pourtant, on rentre doucement dans la magie de la danse. Ils arrivent tous les sept sur une pelouse, apparemment sans ordre et soudain ils sont en rang et dansent tous ensemble. Le groupe est formé, la puissance de la danse est là, la musique aux thèmes connus, ceux de Vivaldi qu’on arrive à saisir, enchante ces corps qui n’en font qu’un. La puissance du spectacle est en place.
La technique prend le pouvoir
Mais quand le spectaculaire prend le dessus, quand la neige envahit la scène, la danse devient presque secondaire. La magie du début s’efface, les corps jouent avec le décor, se coulent dans la neige, se lancent sur le matelas gonflé, pirouettent et virevoltent. Parfois, un accord à deux ou trois fait renaitre l’esprit de la danse. Mais il disparaît vite, submergé par la technique. Et dans la dernière partie, sous l’eau qui tombe à verse, la danse devient totalement secondaire, se résumant à une gesticulation certes mise en valeur par l’eau et la lumière, mais sans profondeur, sans âme. Une fois la surprise passée, cette averse semble bien longue…
Les quelques intermèdes qui indiquent une narration, les sacs plastiques colorés entre autres, ne racontent pas assez pour qu’on suive un déroulement et restent mystérieux. Dommage. Un tel effort théâtral, un tel dispositif aurait pu enchanter aussi l’esprit. La salle, comble à la représentation de mardi 18, a cependant été enchantée. Le public jeune, voire très jeune, en a reçu plein les yeux avec bonheur. Belle initiation à la magie du théâtre, qui aurait pu être aussi celle de la danse.
Scène nationale d’Orléans