Venu présenter son film Les Harkis en avant-première au cinéma Les Carmes le mardi 27 septembre, Philippe Faucon nous a expliqué sa démarche dans une interview exclusive. Son histoire personnelle le rend proche de ce sujet, mais il a beaucoup travaillé l’histoire de cette période, la fin de la guerre jusqu’au cessez le feu et au rapatriement.
Par Bernard Cassat
Intervention des supplétifs dans un village. Photo Pyramides Distribution
En 2006, Philippe Faucon a réalisé La Trahison, un film qui part d’un livre de Claude Sales écrit quelques années auparavant. Il avait donc beaucoup travaillé cette question de la guerre d’Algérie et des supplétifs engagés par l’armée française. Il nous raconte cette démarche qui a constitué un axe important de réflexion et de transmission sur ces épisodes « pas très glorieux et très douloureux », comme il dit pudiquement.
Il revient sur les raisons qui ont poussé des jeunes musulmans à trahir la cause de leur peuple, la misère, l’horreur de la violence du FNL, la torture qui fait accepter n’importe quoi, l’idéologie aussi. Le film commence en 1959, époque ou de Gaulle révèle petit à petit ses intentions d’aller vers l’autodétermination, donc la fin de l’Algérie française, et va jusqu’à l’été 1962, au moment de l’exode des pieds noirs vers la métropole et du drame terrible des supplétifs abandonnés par l’armée à une mort certaine. Certains officiers, comme celui joué par Théo Cholbi dans le film, décident courageusement de désobéir et de tenter de sauver certains de leurs hommes.
Le film met en parallèle aussi, et Philippe Faucon le précise dans l’interview, les cérémonies de remises de fusils aux nouveaux recrutés musulmans, avec officiels, discours et gratitude de la France en 1959, et leur désarmement deux ans plus tard, en cachette, la nuit, pendant qu’ils dorment. Terribles images d’une mère patrie abjecte et qui le sait !
Et entre ces deux moments, Philippe Faucon suit ces hommes devenus totalement schizophrènes, traitres souvent par la force des situations, utilisés par l’armée pour contrôler la population. Tournées au Maroc, les images donnent à voir, au-delà de l’Histoire, la réalité magnifique des pays d’Afrique du Nord.