Directeur de la Halle aux Grains – Scène nationale de Blois depuis le 1er avril dernier, Frédéric Maragnani revient pour Magcentre sur ses objectifs pour faire vivre et développer ce lieu culturel, en particulier la construction d’une nouvelle salle de spectacle et de théâtre qui devrait voir le jour à court terme.
Magcentre. Comment se passe le début de saison ?
Frédéric Maragnani. C’est une belle reprise. La billetterie fonctionne bien. Les spectacles sont remplis tant ceux en extérieur gratuits que les payants à la halle. On revient sur l’étiage 2019 (20 000 places) après les années sombres 2020-21. Les abonnements reviennent plus lentement. C’est sans doute du à un changement de pratiques. Il est aujourd’hui compliqué de s’engager pour une saison de 8 mois.
Je déroule la saison préparée par Catherine Bizouarn, j’écoute, je regarde. Et, je constate que la HAG possède un public curieux, chaleureux et bienveillant, ce qui n’est pas le cas partout. Il y a une confiance sincère envers les choix même quand ils sont pointus et dérangeants. Ici, les artistes, les équipes et le public ont du talent.
Magcentre. Quels sont vos axes de travail ?
Frédéric Maragnani. Ils sont au nombre de quatre. J’entends en premier lieu, construire une ligne éditoriale fondée sur les humanités et l’histoire au sens large. Il s’agit d’une mise en regard pour interroger notre époque qui touche sur de nombreux sujets comme les identités, notre géographie, l’exil, l’histoire des territoires …
Je vais accentuer les spectacles vivants qui posent ces questions avec une proposition de spectacles documentés. En second lieu, nous allons travailler avec six compagnies associées pour les accompagner dans leur création jusqu’en 2026 : Simon Mauclair (Cie Cornerstone), Agnès Carré (théâtre à l’Envi), Julie Delille (théâtre des trois Parques), Émilie Prévosteau & Amine Adjina (Cie du Double), Mickaël Phelippeau (BI-P Association) et Élise Vigneron (théâtre de l’Entrouvert).
J’aimerais aussi construire un fonds mutualisé solidaire pour aider à la production. Notre région compte deux centres dramatiques, deux centres chorégraphiques, quatre scènes nationales et plusieurs scènes conventionnées mais peu de projets communs voient le jour. Avec cet outil, la création serait facilitée et les compagnies disposeraient de plus de moyens.
Magcentre. Quid du nouvel équipement culturel ?
Frédéric Maragnani. C’est mon quatrième sujet. Il s’agira de construire une nouvelle salle d’une capacité de 500 places frontales pour accueillir différents spectacles de théâtre, danse, musique …. L’hypothèse est aujourd’hui de la construire à l’intérieur de la HAG. Le projet se réalisera sous maîtrise d’ouvrage de la ville de Blois propriétaire de ce lieu patrimonial. Cette seconde salle nous permettra de mieux remplir nos missions de création, d’accueil d’artistes en résidence et de diffusion. Il faut savoir qu’aujourd’hui, nous n’accueillons que 40 % du répertoire de création. Les spectacles nécessitent notamment de plus en plus de techniques et technologies. L’hémicycle de 630 places restera en place mais pendant les travaux, nous organiserons une saison « hors les murs ».
Magcentre. Quelle pourrait être l’échéance du projet ?
Frédéric Maragnani. Le comité de pilotage associant les différents partenaires (Etat, région, ville …) devrait faire une annonce au cours de la saison. La dead line est de toute façon la fin de la convention pluriannuelle d’objectifs 2023-2026. J’ai bon espoir car il y a une volonté politique et les budgets. Le nouvel équipement marquera une nouvelle étape culturelle pour Blois, l’agglomération mais aussi le département. Il facilitera aussi notre travail car depuis 30 ans, on monte et on démonte …
Magcentre. Vous être un homme de théâtre puisque vous avez été metteur en scène pendant 20 ans. Quels sont vos auteurs favoris ? et quel est votre regard sur la création ?
Frédéric Maragnani. Il y a une vraie richesse des artistes en France, un foisonnement de projets. Les compagnies ont beaucoup créés pendant le confinement. Elles sont souvent sorties des cadres de la mise en scène traditionnelles pour proposer des spectacles multiples. Il y a aujourd’hui une sorte d’hybridation des arts que je trouve stimulante.
Notre pays est fracturé, il y a un vrai danger d’accident démocratique. Il est important de construire collectivement un récit, de travailler ensemble pour inventer des spectacles qui font société y compris sur le mode burlesque. La culture peut jouer un rôle pour parler et comprendre notre histoire. Il n’y a pas que la parole politique.
Personnellement, j’apprécie le travail de Pierre Guillois (Les Gros patinent bien), de Joël Pommerat (Ma chambre froide) ou le théâtre documenté d’Emilie Rousset (Le Grand débat).
Plus d’info autrement: Halle aux grains de Blois Frédéric Maragnani va succéder à Catherine Bizouarn.