Dans une tribune publiée voilà quelques jours, la région Centre Val de Loire et diverses personnalités dénoncent l’engrillagement galopant en Sologne. Une pratique qui, au regard de l’évolution du climat, augmente les difficultés lors des potentielles interventions des pompiers en cas d’incendies dans les landes et massifs forestiers de ces territoires.
Par Fabrice Simoes
Les clôtures enterrées et trop hautes ne facilitent pas l’accès des services d’intervention en cas d’incendie@DR
En Sologne, ailleurs aussi mais à un niveau nettement moins prégnant, l’engrillagement est un sujet qui fait débat depuis des lustres. Le climat en est un autre tout autant clivant. Une certitude, l’humain a un rôle dans l’un et l’autre. Au delà de la chasse en enclos, plaie ouverte même dans le monde des chasseurs, l’engrillagement, et ses conséquences, risque fort d’impacter l’avenir même de la Sologne. C’est ce que veut démontrer la tribune co-signée par le président de la région Centre Val de Loire, François Bonneau, et diverses personnalités, déjà très acteurs sur ce sujet à l’image du réalisateur Nicolas Vanier, du député du Cher François Cormier-Bouligeon ou de l’acteur François Cluzet, pour lutter contre ce qui peut être qualifié de fléau. D’autant que la déshydratation des sols liée à la répétition des sécheresses et des canicules facilite la propagation des incendies. Comme souvent écrit de ci delà, les forêts sont face à un défi climatique mais aussi à une ingérence négative et coupable de leur propriétaires/utilisateurs. L’engrillagement forcené, encore et toujours pratiqué actuellement, va au-delà de la simple « Réserve de chasse » ou du droit à la propriété. Ce dernier argument est d’ailleurs devenu passe-partout pour dénoncer une pratique qui n’a rien de concret et ne reflète que rarement la réalité du terrain.
Rapport du GIEC et capacités d’intervention
Dans leur tribune, François Bonneau et les signataires invitent à engager une « nouvelle étape de la mobilisation pour que cesse l’engrillagement de la Sologne le Jeudi 8 septembre 2022 à Orléans ». Ils s’appuient sur un rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) qui établit que des territoires autrefois à l’abri des incendies pourraient être de plus en plus fréquemment frappés par les effets du réchauffement climatique. Ce rapport explique, selon ses projections, que le risque des incendies va s’étendre, et « augmenter … notamment dans les régions Pays de la Loire et Centre–Val de Loire où l’on va assister à une hausse significative des incendies dans le futur.»
La Sologne pourrait même devenir une mauvaise référence dans les années à venir. « Alors que les incendies ont ravagé la Gironde, montrant des pompiers freinés dans leur intervention par des grillages et des animaux piégés dans une forêt en feu, l’impérieuse nécessité d’agir sans délai s’impose partout et notamment pour sauver notre Sologne ! Son engrillagement, principalement lié à l’horrible et intolérable pratique de la chasse en enclos, prend au piège les animaux et défigure la nature… » assurent-ils. Confirmation est donné sur le terrain par des responsables de centre de secours solognots qui ont vu les clôtures, pour la plupart enterrées et dépassant largement les dimensions réglementaires, se multiplier. « Il va être très délicat d’intervenir avec des clôtures comme celles installées depuis quelques mois. Déjà que, en cas d’intervention, nous ne sommes pas à l’abri de « plainte » pour ne pas être entré au bon endroit ou d’avoir circulé sur les secteurs autres que ceux que les propriétaires nous désignent ! C’est déjà arrivé par le passé… Si l’on doit se cantonner aux bords de route, voire d’allées forestières, cela va être compliqué de choisir entre attaquer un feu ou attendre qu’il vienne à nous. » explique-t-on sans fard en Sud Sologne.
Autre sujet qui préoccupe les pompiers c’est la mise en place des allées « pare-feu » obligatoires sur de tels territoires mais dont l’existence n’est pas beaucoup vérifiée. « Trop de friches, un nettoyage aléatoire et des coupe-feux qui n’existent pas, en cas de départ de feu cela fait beaucoup d’éléments négatifs qui s’additionnent… »
Et ce n’est pas la possible capacité d’intervention des Dash de Châteauroux (voir encadré), spécialisés dans la dispersion de produit retardant qui tempère l’inquiétude des premiers concernés lors des opérations sur site.
La Sécurité civile française dispose de douze hydravions bombardiers d’eau Canadair (6.000 litres embarqués) et de cinq avions Dash (10.000 litres). Depuis 2020, sur le site de l’aéroport de Châteauroux-Déols, existe un pélicandrôme. Ces structures comportent des aires d’accueil techniques et de ravitaillement. sur l’ensemble du territoire. Pour la région Centre-Val de Loire, le pélicandrôme castelroussin compte des cuves de stockage ( quatre grands réservoirs de produit retardant de 1.600 m3 chacun). Elles sont en capacité d’alimenter des Dash 8, du constructeur Bombardier. Ces avions sont spécialisés dans la dispersion de produit retardant et peuvent charger jusqu’à 10 000l lors de chaque rotation.
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