Le Festival d’Avignon, c’est d’abord la Cour d’Honneur du Palais des Papes, dite « la Cour » pour les habitués. Mais il y a le reste, dans le IN et le OFF. Quelques commentaires sur les spectacles qui m’ont marqué, et rien sur les déceptions. Bah non !
Par Bernard Thinat
La Cour était proposée au dramaturge russe Kirill Serebrennikov, emprisonné sous Poutine et vivant aujourd’hui en Allemagne, lequel avait en mai dernier présenté « la femme de Tchaïkovski » au festival de Cannes. Il a choisi d’adapter une nouvelle fantastique de Tchekhov, « le Moine noir ». Spectacle créé à Hambourg, et recréé en Avignon, l’immensité du plateau ne permettant pas une simple transposition. Et il faut bien reconnaître que de ce point de vue, l’artiste russe a parfaitement su occuper tout l’espace de la scène.
Les saluts après “le Moine noir” – Photo B.T.
Sorte de spectacle total, mêlant théâtre, danse et chœurs russes admirables, c’est l’histoire d’un riche paysan qui veut marier sa fille Tania à Kovrine, un jeune intellectuel, mais en espérant que le jeune couple reprenne l’entretien de son jardin et de ses serres, ce dont manifestement Kovrine n’a que faire. Et quand ce dernier devient fou en découvrant un moine noir face à lui, les choses ne s’arrangent pas. Magnifiques scénographie et chorégraphie, l’ensemble faisant émerger les thèmes de l’écologie, de la folie, de l’obéissance et de la liberté. La Cour d’honneur a follement applaudi ! On a quitté le lieu vers 1 heure du matin, dans la douceur avignonnaise.
Et dans le Off…
Dans le OFF, catégorie théâtre, il y eut « Incendies », texte exceptionnel de Wajdi Mouawad sur la guerre au Liban : un frère et une sœur jumeaux, sont sommés par leur mère qui s’est tue depuis cinq ans et qui vient de mourir, de partir à la recherche de leur père et de leur frère qu’ils n’ont jamais connus. La fin vous glace le sang. La pièce était interprétée par de jeunes artistes de l’atelier théâtre de l’école alsacienne de Paris.
Les saluts après la pièce “Sans tambour” – Photo B.T.
Aux Doms, théâtre de nos amis belges, « Qui a peur », c’est un couple à la ville et sur scène, plus très jeune, qui voit débouler un jeune couple (à la ville, on ne sait pas), racisé comme certains disent. L’affrontement aura lieu, mais pas comme on pourrait s’y attendre, l’humour est radical, on y parle théâtre bien sûr, on confond « la Mouette » et « Hamlet », c’est savoureux à souhait.
Côté danse, « Dividus » est fabuleux. Croisant le contemporain et le hip hop, les sept danseurs nous entraînent sur le thème « les vivants, on ne les met pas en boîte ». Ils nous viennent du côté de Martigues.
Mais le sommet en danse fut le roman de Koltès « Dans la solitude des champs de coton », entièrement chorégraphié par l’ancienne étoile de l’Opéra de Paris, Marie-Claude Pietragalla, pour deux danseurs, Julien Derouault et Dexter.
Un chanteur découvert, Ben Herbert Larue avec un contrebassiste et un autre jonglant du clavier à la trompette, le chanteur s’emparant parfois du piano à bretelles. C’est un chanteur à textes, comme il en reste quelques-uns. Un régal !
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