Gare de Pithiviers, nouveau lieu de mémoire de la Shoah

Inauguration officielle le 17 juillet 2022 d’un nouveau lieu de mémoire de la Shoah  dans la gare de Pithiviers à l’occasion des 80 ans de la Rafle du Vel d’Hiv des 16 et 17 juillet 1942. Aujourd’hui désaffectée, c’est pourtant bien de cette petite gare de province que sont partis à l’été 1942 six convois vers Auschwitz-Birkenau dont certains avec des femmes et des enfants à bord, et dont aucun n’est revenu.

Par Sophie Deschamps 

Gare de Pithiviers, nouveau lieu de mémoire de la Shoah dans le Loiret, qui sera inauguré le 17 juillet 2022. Photo Sophie Deschamps

De l’extérieur, c’est une petite gare de province comme il en existe des milliers en province. Mais en s’approchant du batîment fraîchement ripoliné, on tombe à gauche  de la porte principale sur une grande plaque. Celle-ci explique sans détours que de ce lieu des milliers d’enfants, de femmes et d’hommes juifs sont partis ou ont transité avant de rejoindre trois jours plus tard le sinistre camp d’extermination d’Auschwitz. 

Une plaque qui est le premier élément d’information de ce lieu aménagé par le Mémorial  de la Shoah de Paris, une institution privée qui est le plus grand centre d’archives d’Europe sur l’histoire de la Shoah. 

Plaque commémorative de la gare de Pithiviers, rappelant que des milliers de juifs, enfants, femmes, hommes sont partis de ce endroit entre 1941 et 1942 vers Auschwitz. Photo Sophie Deschamps.

Un lieu de mémoire, pas un musée 

Même si l’exposition présentée dans cette gare se visite comme un musée, c’est avant tout un lieu de mémoire. Comme l’a expliqué Jacques Fredj, directeur du Mémorial de la Shoah qui était à Pithiviers le 11 juillet 2022 pour la présentation du lieu à la presse : « Ce projet est né en 2017 quand la SNCF a voulu se séparer de la gare de Pithiviers. Et donc cette gare venait au bon moment pour compléter ce que le Cercil accomplit. De plus, la gare est véritablement un lieu de mémoire qui a été le témoin de toute l’histoire du camp de Pithiviers, de toutes ses phases, y compris les épisodes les plus dramatiques, avec huit convois qui sont partis du Loiret vers Auschwitz, six de Pithiviers et deux de la gare de Beaune-la-Rolande »

L’exposition retrace bien sûr l’histoire de ces convois et rappelle qu’à partir du convoi 5 du 28 juin 1942 et des cinq suivants, de plus en plus d’enfants internés à Pithiviers et Beaune-la-Rolande, soit 972, se retrouvent dans les wagons plombés pour les camps de la mort, après avoir été cruellement séparés de leurs mères par les gendarmes français quelques semaines plus tôt.

Estampe de l’arrivée des enfants en gare du Bourget-Drancy en 1942 par Horan-Koiransky, interné à Drancy, puis à Pithiviers et Beaune-la-Rolande, et exposée à la gare de Pithiviers. Photo Sophie Deschamps

Pour redonner un visage à tous ces déporté·e·s un écran diffuse, convoi par convoi, les photos de ces personnes et de ces familles disloquées et anéanties par la folie nazie.

Enfin la dernière salle donne à voir les témoignages d’enfants déportés et d’habitants de Pithiviers qui tous témoignent avec une très grande dignité.

Pas un doublon du CERCIL 

Pour Annaïg Lefeuvre, directrice du Cercil Musée-Mémorial des enfants du Vel d’Hiv ce nouveau lieu de mémoire n’est en rien un doublon de celui Orléans :  « Cette gare et le Cercil sont complémentaires. À Orléans, on parle des camps d’internement du Loiret mais le récit ne se fait pas à l’endroit où il s’est produit. Donc depuis trente ans, le Cercil amenait des groupes à Pithiviers et ça permettait de reconstituer la mémoire par le vide par les archives et les photos puisque les lieux des camps de Pithiviers n’existent plus. Et maintenant, il y a un lieu qui permet de réancrer l’histoire et le récit à l’endroit même où elle s’est déroulée.

Puis elle poursuit : « Ici c’est une focale particulière très intéressante qui permet de voir comment une gare et une situation locale va s’arrimer au contexte européen d’un génocide. C’est à mon avis le lieu le plus pertinent pour mesurer cette bascule-là.»

Et la seule gare transformée en lieu de mémoire, en France.

 

L’inauguration de la gare de Pithiviers aura lieu officiellement le dimanche 17 juillet 2022 à 15h, peut-être en présence du Président de ka République mais sa présence n’est pas encore confirmée.

De son côté le Cercil Musée-Mémorial des enfants du Vel d’Hiv prévoit une série d’événements autour des 80 ans de la Rafle du Vel d’Hiv à découvrir ici,  et notamment la projection au Cinéma les Carmes d’Orléans à 18h du documentaire de David Korn-Brzoza La Rafle du Vél d’Hiv, la honte et les larmes en présence de l’historien Laurent Joly, spécialiste de la Shoah. Un film visible également ce lundi 11 juillet à 21h10 sur France 3.

 

Les camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande sont ouverts en 1941 par l’administration française pour interner les hommes juifs arrêtés à Paris lors de la rafle du Billet vert, en mai 1941.

À l’été 1942 les rejoignent 8 000 personnes, des familles, victimes de la rafle du Vél d’Hiv. Au total, entre mai 1941 et juillet 1943, 16 000 hommes, femmes et enfants juifs transitent par ces camps, avant leur déportation vers les camps d’extermination d’Europe de l’Est. 

Parmi ces déportés : près de 4700 enfants. Aucun d’entre eux n’a survécu.

(texte de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah)

Commentaires

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  1. Bonjour, Il est dommage qu’aucune référence ce soit faite à l’enquête menée par Christian, fondateur de Mag Centre, et Régis Guyotat alors journaliste au Monde sur la responsabilité de l’Etat français dans l’organisation des camps de Beaune et Pithiviers et les départs vers les camps de la mort. Enquête qui leur avait valu de passer devant la XVIIe chambre à Paris pour diffamation. Il ne fait pas bon d’avoir raison trop tôt.
    Anne Lessard.

  2. A titre informatif, je souhaitais vous signaler en écho à l’ouverture du Mémorial dans la gare de Pithiviers, la réalisation d’une série de photographies brodées intitulée « Lettres mortes » sur la rafle du Vel ‘hiv et l’histoire de Marie Jelen, enfant déportée à Pithiviers puis assassinée à Auschwitz. La série “Lettre morte ” sur : https://1011-art.blogspot.fr/p/lettre.html
    Et aussi une série de 100 photographies plus directement sur les camps français, dont les camps de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande :” Enfant de parents ” à découvrir sur : https://1011-art.blogspot.fr/p/enfant-de-parents.html
    Ces deux séries sont présentées à Grenoble cette année pour la date anniversaire de la rafle du Veld’Hiv.

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