Il est 20h, le Printemps de Bourges s’éveille

Les balayeurs ont déposé les balais, Jacques Dutronc, le dauphin de la place Dauphine, et le fiston ont rempli la grande salle démontable du W. La place Séraucourt ne faisait pas du tout grise mine. Alors que la 46e édition du Printemps de bourges-Crédit Mutuel a vécu sa soirée inaugurale, il ne reste bien que les ouvriers à être un peu déprimés… mais ce n’est pas la faute du festival.

Par Fabrice Simoes

Duo de choc avec Dutronc Père et fils, maison fondée en 1943. Photo Fabrice Simoes

La première phrase de la dernière newsletter du Printemps de Bourges-Crédit Mutuel (PdB) se voulait interrogative. Avec un « Est-ce que vous êtes chaud·es ? » de la qualité d’un animateur dans un stade de foot de Nationale, ou de l’unique soirée dansante annuelle de la ville galloise de   Llanfairwllgwyngyllgogerychwyrndrobwllllantysiliogogogoch – là-bas ils disent « Ydych chi’n boeth? » – le ton de cette édition du PdB était donné : elle se devait d’être festive tellement que ça nous a manqué depuis deux ans… Un modèle festif du « quoiqu’il en coûte » et du « en même temps » ?  Une méthode Coué de l’événement culturel ? Une volonté de croire au retour du monde d’avant mais pas vraiment pareil ? Tout cela à la fois probablement. Depuis plusieurs mois, le service com’ a fait le taf pour rendre au mieux l’éclat possiblement oublié, comme tous les autres, du premier festival de la saison, celui de Bourges.

Boris Védel, le boss du Printemps, et Yan Galut, le boss de Bourges, ont ouvert en commun le Printemps de Bourges 2022. Photo Fabrice Simoes

À force de répéter « I’ll be back » comme un Schwarzenegger en mode Terminator, le Printemps de Bourges a enfin pu titrer « Le Retour » en face du numéro 46 comme le nombre d’éditions depuis son lancement en 1977. Et malgré la semi-obligation officielle de faire la fête, le Berruyer moyen, le gros et le petit aussi, tout comme les festivaliers d’ici et d’ailleurs, se sont retrouvés dans les allées de merguez frites – qui sent toujours le graillon mais plus côté chichis vous voyez – sur les rives de l’Auron et sous la toile du W itou.

Gaëtan Roussel donne le bon ton

Toujours en opposition avec un supposé diktat printanier, on s’apprêtait à vivre le premier concert de cette reprise genre attentif au moindre défaut, à la moindre anicroche, au brin d’herbe qui dépasse, au plus imperceptible des larsens. C’est que Gaëtan Roussel seul, même si cela fait un moment maintenant, en ouverture ça pouvait vite passer en mode self-défense alors qu’il vient de Louise Attaque. C’est que Dutronc et Dutronc ça pouvait vite devenir un concert karaoké. On en a déjà vu des soirées où c’était Cappella qui prenait le dessus sur la vedette. Dans un bar spécialisé, pour un montant identique au prix d’un billet d’entrée du PdB, on pouvait se payer, en plus, un fût de bière, à consommer avec modération bien évidemment. C’était certain, au moindre écart, on allait pouvoir écrire comme un plumitif sans scrupule derrière son clavier d’ordinateur. Comme un utilisateur des réseaux sociaux en quelque sorte.

Gaëtan Roussel bras ouverts sur un PdB de renouveau. Photo Fabrice Simoes

Salle pleine, public assis, chaises soigneusement disposées, ouvreuses comme au cinéma, rien à redire, les jeunots n’étaient pas habitués, les quadras n’en revenaient pas, les nostalgiques des sixties étaient à la cool. On éteint les lumières et… Il aura suffi d’à peine deux morceaux pour qu’une partie des chaises deviennent vides. Il aura suffi d’à peine deux chansons pour que derrière les barrières de la fosse plusieurs rangées de jeunes, de moins jeunes, et de nettement moins jeunes se pressent et tapent des mains, et tapent des pieds, et bougent et se trémoussent. Une chanson même douce, comme ne me chantait pas ma maman, en concert ça devient souvent rock & roll et ça fait du bien. Gaëtan avait donné le ton. Un peu fort mais bon et sans arrête. Il aura suffi d’à peine deux morceaux pour se rendre compte que ça serait difficile de dire du mal comme la Lucienne et la Gisèle des Vamps. Ne restait qu’aux Dutronc père et fils d’assurer.

Et les Dutronc assurent...

Les Dutronc au Printemps, c’est la première des grosses scènes de la tournée de Jacques et Thomas. Le boss, c’est le fiston. À l’inverse, la star, c’est le père. Un peu comme Jésus et Dieu, quoi. C’est le premier qui présente l’autre et pas l’inverse. Au lendemain de Pâques, voilà bien comme un signe ! Part belle à Dutronc père, plus que jamais Vieille Canaille à la moue iconoclaste. De l’Opportuniste face à une levée de drapeaux au slogan vengeur de “Votez Dutronc, pour l’augmentation du goût de la vie” à un Paris s’éveille évident ou un J’aime les filles, du Berry of course, jusqu’à Merde in France devenu rock ultime avant les chansons du rappel, on a fait le tour des tubes du temps des années boomers. Même l’hommage à Françoise hardy est passé à travers une de ces compos dès ses années guitares, ce Fort Chabrol devenu Le temps de l’Amour.

Un slogan, un seul “Votez Dutronc et Dutronc”. Photo Fabrice Simoes

Alors Jacques se repose sur Thomas comme Dieu sur Jésus pour que la messe soit dite. C’est bien fait, pour eux, et ça fonctionne à la transition près. Si on ajoute le son clair des pros et méticuleux membres du Corsica Band, des artisans perfectionnistes et multirécidivistes de la planète Dutronc, au dernier accent de l’ultime morceau, il se murmure que les 8000 personnes du W sont reparties nourries de façon miraculeuse avec cinq pains et deux poissons. Ce qui serait beaucoup mieux que Jésus. Lui, avec les mêmes ingrédients, il n’avait fait que 5000 personnes… D’accord, ça vaut pas. Il n’avait pas de guitare ! 

Sages comme des images, les quadras, les quinquas, etc. Photo Fabrice Simoes

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