L’Oratoire de Germigny-des-Prés, un incontournable lieu de visite

Cet article a été réalisé par les élèves de la classe de première, spécialité Histoire-geo, géopolitique, sciences politiques, du lycée Jacques Monod de Saint-Jean-de-Braye (Loiret). Cela dans le cadre d’un projet d’éducation aux médias et à l’information, initié par Magcentre, soutenu par la Drac Centre-Val de Loire et coordonné par la journaliste Elodie Cerqueira, en collaboration avec Séverine Auchère et Patrick Vitte (enseignants).

Parmi les lieux incroyables de la région Centre-Val de Loire, l’Oratoire carolingien de Germigny-des-Prés, près d’Orléans (45), se démarque particulièrement. Non loin du fleuve royal, dans le Val d’Or, cette église – une des plus ancienne de France – est à la croisée de plusieurs grands circuits touristiques : routes des Châteaux de la Loire et Vallée des Rois. Un trésor régional qui abrite la seule mosaïque carolingienne conservée en France. Une histoire qui remonte au IXe siècle.

Par Cléa Burguet, Manon Burguet et Maud Maurin

Oratoire de Germigny-des-Prés. Photo Office du tourisme du Val de Sully

Vu de l’extérieur, l’Oratoire de Germigny-des-Prés, dans le Loiret, ne ressemble pas vraiment aux églises du coin : on se croirait plutôt en Provence ! Quand on sait que le nom de ce village tient son origine d’une villa gallo-romaine érigée par Germinacus, on comprend qu’on ne se trouve pas dans un lieu commun. Il est même classé monument historique. Mais surtout, ce qui fait la fierté de ce village d’environ 750 âmes, outre la bâtisse, c’est le précieux trésor qu’elle cache en son sein. Pour y accéder, le mieux est d’en faire le tour en empruntant le petit chemin qui traverse les tamaris et quand on est accompagné par la guide de l’office du tourisme, Justine, on peut s’attendre à vivre un moment historique…

Elle se réjouit toujours de faire découvrir l’étonnant trésor de cet oratoire à ses visiteurs : l’unique mosaïque carolingienne conservée en France ! Et le plus remarquable, c’est qu’elle n’est pas dans un musée, derrière une vitrine, mais toujours dans son église, lovée dans l’abside orientale. Elle abrite une incroyable histoire remontant à quelques siècles de notre époque. Cachée sous un badigeon en 1792, elle est découverte, par hasard en 1820, lorsque le curé de la paroisse s’est aperçu que des enfants du village jouaient avec des cubes de verres colorés, trouvés dans l’église. Une grande surprise pour le village, le curé et surtout les archéologues !

Mosaïque carolingienne de l’oratoire de Germigny-des-Prés. Photo Cléa Burguet

Commence alors une campagne de restauration de la mosaïque, en 1830. Et en 1840, l’oratoire est classé monument historique ; il subit une seconde restauration en 1867 sur l’ensemble de l’édifice. Pour Justine, le thème représenté est unique : l’Arche d’Alliance (coffre qui, dans la Bible, contient les tables de la loi données à Moïse sur le mont Sinaï).

Cet oratoire du IXe siècle, fut élaboré par Théodulf, homme de lettre, poète de culture antique, mais aussi théologien et proche conseiller de Charlemagne. C’était un grand homme religieux, évêque d’Orléans et abbé de Fleury, à Saint-Benoît-sur-Loire en 798. Il est à l’origine de la construction de l’oratoire, la chapelle privée du maître construit par Eudes de Metz (architecte arménien), a résisté aux affres du temps.

Une mosaïque composée de 130 000 tesselles

Et si la mosaïque ne recouvre aucune représentation humaine, uniquement la présence d’ange c’est précisément parce que Théodulf était iconophobe. Il refusait les images de Dieu, du Christ, de la Vierge et des Saints dans les églises de peur que celles-ci ne mènent à l’idolâtrie. C’est pour cette raison que l’Arche d’Alliance a été représentée, symbole de la présence de Dieu et de sa parole. La mosaïque est composée de 130 000 tesselles qui ornent le cul de four (une voûte rappelant la forme du four à pain) de l’abside, un pur chef d’œuvre ! Dans les arcatures (arcades) aveugles situées sous la mosaïque se trouvent quelques restes d’autres mosaïques. Les stucs ont été remplacés au XIXe siècle, lors de la restauration de l’oratoire. « Quelques fragments des stucs d’origines sont encore visibles au musée archéologique d’Orléans », précise Justine.

                Retrouver la villa, une propriété de l’abbaye, est la priorité des archéologues. Elle a été réhabilitée pour eux en lieu de repos. « Théodulf a voulu créer sa chapelle à côté de la villa très certainement », ajoute Justine. Il travaillait à Saint-Benoit-sur Loire et venaient à Germigny-des-Prés pour se reposer. Pour le décor de l’oratoire, il s’est inspiré de la chapelle palatine à Aix la Chapelle, palais de Charlemagne. La guide revient sur les changements qui ont eu lieu durant toutes ces années : l’oratoire n’avait pas la forme actuelle. En effet, il y avait quatre absides, qui faisaient le tour, aujourd’hui il n’y en a plus que trois visibles, puisqu’une a été supprimée pour laisser place à la nef, construite au XIe siècle.

Nef de l’église de Germigny-des-Prés. Photo Maud Maurin

L’oratoire est devenu une église paroissiale au XIIe siècle, après avoir été incendié à la fin IXe siècle. Jugée trop petite pour accueillir les gens du village, l’église est agrandie au XIXe siècle. C’est grâce à Just Lisch, architecte français, que quelques modifications ont été réalisées, sur la partie datant du IXe : la tour lanterne, à l’extérieur, a été abaissée car l’édifice menaçait de s’effondrer. Il a aussi fait disparaître les deux absidioles disposées de chaque côté de l’abside à l’Est.

                Chaque année, l’oratoire accueille près de 30 000 visiteurs. Remarquable pour un si petit village ! « C’est l’une des plus anciennes églises de France. Ils ne restent que très peu de vestiges de l’époque carolingienne donc c’est quelque chose d’assez unique, s’enthousiasme Justine. Les visiteurs sont fascinés par la thématique de l’Arche d’Alliance et les autres décors : les statues qui ont été ajoutées entre le XIXe et le XXe siècle, les vitraux en 1981 et les lustres, derniers éléments posés dans l’oratoire en 2003. » Un lieu chaleureux où les vitraux laissent entrer une douce lumière.

Des événements et des projets à venir

Un monument historique que l’office du tourisme modernise avec des projets et des évènements à venir. Ainsi, la salle d’exposition, qui accueille des artistes chaque mois, sera transformée en musée. Il s’agira d’y exposer les œuvres pour l’heure stockées dans les réserves : mosaïques, statues… L’oratoire fait toujours l’objet de recherches archéologiques. Cette exposition permettra une mise en valeur des objets trouvés et pourra ainsi compléter la visite. Mais pas seulement !

D’autres projets sont en discussion, nous confie la guide. Comme une projection sur la façade de l’oratoire, un mapping avec des éléments historiques. Outre les événements religieux – mariages, baptêmes et enterrements – en juillet, chaque dimanche, des concerts sont organisés dans l’oratoire. Un lieu surprenant qui n’a pas encore dévoilé tous ses secrets. Les archéologues retrouveront-ils un jour la villa de Théodulf ? C’est une affaire à suivre…

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