Fin février, à Tours, l’Intersyndicale nationale des internes de médecine générale (Isnar-IMG) avait organisé son congrès réunissant plus de 600 participants. Deux semaines plus tard, l’Isnar-IMG interpelle tous les candidats à la prochaine présidentielle en présentant ses propositions sur l’accès aux soins, la formation médicale, l’écologie, le numérique et la santé publique.
Par Jean-Paul Briand
Concernant la démographie médicale l’Isnar-IMG tient à souligner que non seulement aujourd’hui plus de 72% de la population française réside en zone sous-dense mais les effectifs des médecins généralistes continueront à décroitre jusqu’en 2028. Les travaux de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) ainsi que les habitants de la région Centre-Val de Loire, championne de France de la désertification médicale, peuvent en témoigner. Il faut donc chercher à renverser cette tendance à la chute du nombre de praticiens de première ligne et de proximité que sont les généralistes.
Les représentants des internes en médecine générale soulignent que « la coercition, qui consiste à mettre fin à la liberté d’installation, est une mesure contre-productive qui non seulement ne permettra pas de corriger la problématique mais qui risque, de plus, de détourner les jeunes générations de l’exercice de la médecine générale ». Malheureusement, il semble qu’il existe encore des prétendant(e)s au trône républicain ou aux élections législatives qui proposent, par démagogie ou incompétence, un aménagement répressif de la liberté d’installation des futurs médecins libéraux.
De nombreuses propositions peuvent être reprises dans les territoires en désertification médicale
Afin d’améliorer l’accès aux soins des populations en zones sous-denses et attirer de jeunes médecins, les internes font de nombreuses propositions dont certaines peuvent être valablement reprises dans les territoires en désertification médicale :
- Créer dans chaque département des guichets uniques dédiés à l’attractivité médicale du territoire.
- Pour les jeunes médecins s’installant en zone sous-dense, mettre à disposition un secrétariat.
- Permettre aux internes de se rendre dans les territoires en accordant une augmentation de l’Indemnité Forfaitaire de Transport (IFT) et déployer un maillage territorial étendu des Hébergements Territoriaux des Etudiants en Santé (HTES).
- Proposer un local de fonction aux médecins qui réalisent la permanence des soins ambulatoires.
Ce n’est qu’en 2009 que la Loi a imposé la nomination des premiers professeurs de médecine générale
Ces futurs généralistes, en cours d’internat, ne sont pas systématiquement opposés à exercer en zone isolées et sous-denses. Afin de s’y projeter pour une installation future, ils souhaitent les découvrir. Pour tous les territoires, l’Isnar-IMG propose que les internes en stage puissent effectuer des gardes et ainsi faire l’expérience de la Permanence des Soins Ambulatoires (PDSA) tant redoutée par nombre d’entre eux. Ils demandent d’améliorer leur savoir et la connaissance des territoires par des stages auprès d’autres personnels médicaux (sage-femmes, gynécologues, pédiatres). L’Isnar-IMG reprend une revendication ancienne des généralistes mais toujours ignorée par le centralisme hospitalo-universitaire : Augmenter le nombre d’enseignants et de Maîtres de Stage des Universités (MSU) en Médecine Générale et accroitre le nombre de postes universitaires dédiés à la Médecine Générale, parent pauvre des études médicales. En France, ce sont les Centres hospitaliers universitaires (CHU) qui déterminent et gouvernent la formation des médecins et la pensée médicale. Les grands patrons des CHU, tous hyper-spécialistes, ignorent la médecine générale qu’ils n’ont jamais pratiquée. Ce n’est qu’en 2009 que la Loi a imposé, bien difficilement, la nomination des premiers professeurs de médecine générale dans les facultés de médecine.
Les postulants à la présidence seraient bien inspirés de lire la contribution des internes de médecine générale
Le livret de propositions des internes en médecine générale se termine par toute une série d’actions intéressant la santé des Français et la lutte contre la précarité. En santé mentale, particulièrement en souffrance, « des mesures fortes dans ce domaine sont indispensables » revendiquent les internes qui souhaitent une formation type « Premier Secours en Santé Mentale » durant leur cursus. Pour l’amélioration de la prise en charge des personnes âgées, ils proposent des stages en EHPAD, que soit instauré « une consultation médicale de suivi à 45 ans, dédiée à la prévention, puis à 65, 75 et 85 ans » et le dépistage de la perte auditive, etc.
Les postulants à la présidence comme à la députation seraient bien inspirés de lire la contribution des internes de médecine générale et leurs cinquante cinq propositions cohérentes et pragmatiques, dont certaines peuvent rapidement et durablement améliorer la santé des Français.