La dernière déclaration au journal Le Parisien du chef de l’état parlant “d’emmerder les non-vaccinés” pose, de façon pour le moins outrageante, la vraie question de de la solidarité vaccinale. En supprimant la validité d’un test négatif, jusqu’alors accepté en lieu et place du passe sanitaire, le passe vaccinal peut être considéré comme une obligation vaccinale qui ne veut pas dire son nom. Dans les pays totalitaires, on décide, on oblige et c’est réglé. Les faux-semblants ne sont pas nécessaires. Dans une démocratie d’autres procédés moins abrupts sont utilisés.
Par Jean-Paul Briand
Après l’échec d’une période de conseils, d’explications, de pédagogie, d’incitation, le gouvernement en est arrivé à des mesures coercitives qui ne sont pas bien loin de la contrainte. Avatar de la théorie des « nudges », qui semble avoir conquis les sphères du pouvoir en France, le gouvernement a choisi l’obligation du passe vaccinal pour faire évoluer les comportements des opposants aux vaccins anti-Covid qu’il n’a pas réussis à convaincre. Si le Parlement doit voter, pourquoi ne pas préférer y discuter de l’obligation vaccinale et sortir ainsi de cette hypocrisie pernicieuse et manipulatrice ?
La solidarité est un égoïsme intelligent
La perplexité initialement concevable vis à vis de l’efficacité et sur l’innocuité des vaccins à ARN messager ne tient plus aujourd’hui. Le principe de précaution et le scepticisme n’ont plus lieu d’être après plusieurs millions de personnes vaccinées contre le sars Cov 2 à tous les âges. Alors que ce cache-t-il derrière le refus de la vaccination ? Ne cherchons pas de faux-semblants duplices. C’est un symptôme de l’hyper-individualisme de celles et ceux qui ont oublier le mot de « fraternité » inscrit au fronton des mairies françaises et qui implique d’être solidaire. Dans notre société tous les individus sont interdépendants y compris dans leur vulnérabilité. Comment peut-on l’oublier dans un pays qui a inventé la Sécurité Sociale ? Notre vie, notre protection sont liées à celles des autres. Si la solidarité de mon voisin est bonne pour moi, la mienne est bonne pour lui. Le philosophe espagnol Fernando Savater souligne astucieusement que « la solidarité est un égoïsme intelligent ». Elle nous protège, supprime la peur de l’autre et produit de la complicité.
La liberté de chacun est bornée par des devoirs
La liberté individuelle ne peut pas être invoquer par les opposants au vaccin contre le coronavirus. Si j’ai le droit de faire ce que je veux, je ne peux pas le faire au dépend d’autrui ou au risque de lui nuire. En France, dans le cas du refus d’être vacciné et ainsi risquer d’être atteint d’une Covid 19 grave, nécessitant une hospitalisation voire des soins intensifs ou une réanimation, on n’assume pas les répercussions délétères de ses choix. C’est la collectivité qui endosse solidairement les éventuelles conséquences financières d’un refus vaccinal. C’est l’hôpital et son personnel qui, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, prennent en charge, sans état d’âme, le récalcitrant. Ce sont parfois d’autres malades qui seront pénalisés et qui verront leurs explorations, leurs analyses, une consultation, une chimiothérapie ou une intervention, différées voire annulées dans les services saturés.
La liberté individuelle n’est jamais illimitée. Au delà de ce qui est permis ou interdit par la Loi et les institutions, la liberté de chacun est bornée par des devoirs. Mépriser ses devoirs de solidarité envers les autres met en danger la collectivité toute entière et la démocratie.