Laïla in Haïfa, Amos Gitai très bavard, très gauche

[Ça-me-dit-cinéma]  Dans un lieu multiculturel et multiracial, des personnages badinent avec les idées de gauche. Il ne se passe rien malgré une image soignée. Amos Gitai nous promène sans nous intéresser.

Lors de la première édition du festival Récidive* en 2019 (alors intitulé “Cannes 39” en hommage à la première édition de c festival voulu par le ministre Jean Zay) , Amos Gitai, alors président du jury, avait donné une « leçon de cinéma », puisque le festival en demandait aux cinéastes (https://www.magcentre.fr/185785-cannes-39-amos-gitai-president-du-jury-le-cinema-et-la-paix/). Il confiait, à un moment : « J’aime bien le documentaire parce que j’aime observer, mais je n’aime pas les documentaires manipulateurs ou doctrinaires, et si je vois des choses trop manichéennes pour la bonne cause, je commence à me poser la question sur la cause elle-même. » On se dit que son dernier film, Laila in Haifa, qui n’est pas un documentaire, pourrait susciter le même doute.

Tsahi Halevi le photographe et Maria Zreik la galiériste. Capture écran

Sorte de huis-clos dans un lieu branché, une galiériste, Laïla, expose le travail d’un photographe sur le conflit avec les Palestiniens. Voilà, en fait, toute l’histoire du film. Tout le reste n’est que badinages intellos ou sentimentaux dans un monde de juifs de gauche et de quelques arabes friqués. La caméra danse au milieu de ces gens, passe de l’un à l’autre, du photographe seul aux couples reconnus ou non. L’image est belle mais le propos creux, sans intérêt parce que trop général, trop désincarné. Et trop vaste : dans le catalogue de sujets abordés, la situation du pays, bien sûr, l’engagement de l’art dans la politique, la drague interraciale, l’ambition personnelle. Plus toutes les questions de chacun sur sa propre vie. C’est plus le café du commerce que des analyses construites.

Ce fatras intellectuel ne mène nulle part, le film s’étire en longueur et la qualité d’image n’empêche pas l’ennui. La première séquence, où le photographe se fait tabasser, est d’une violence qui nous place directement dans l’atmosphère du pays, sans que l’on comprenne qui tape sur qui, est-ce personnel ou politique ? Cette violence initiale sera un peu vaine dans la suite du film : les conflits verbaux qu’il va y avoir ne répondent pas à cette violence, ils sont au contraire feutrés et sans autre enjeu que politique. Même le personnage de la palestinienne agressive et revèche, qui semble travailler pour son peuple, ne convainc personne.

Dommage qu’Amos Gitai, qui reste un grand cinéaste, soit ici passé à côté de son art.

*Récidive

Rappelons que la deuxième mouture du festival Récidive (qui fait suite au succès de Cannes 39) aura lieu du 8 au 14 novembre 2021 au cinéma Les Carmes et au Théâtre d’Orléans. Il est tourné cette année vers les films de 1940-1941. Une rétrospective Benoît Jacquot et un hommage à Bertrand Tavernier complètent la programmation.

Bernard Cassat

 

Laila in Haifa

Réalisateur Amos Gitai

Scénariste Amos Gitai et Marie-José Sanselme

Interprètes Tsahi Halevi, Maria Zreik, Khawla Ibraheem, Naama Preis, Makram Khoury

Directeur photo Eric Gauti

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