Alors que s’ouvre mercredi au palais de justice de Paris le procès fleuve des attentats du 13 novembre 2015 Sylvie et Erick Pétard n’ont pas souhaité se porter partie civile ni demander réparation. Ils sont les parents douloureux de Marion, 27 ans et Anna 24 ans tombées sous les balles des terroristes de Daesh alors qu’elles dînaient à la terrasse du Carillon rue Alibert dans le 10ème arrondissement de la capitale. L’aînée achevait ses études de musicologie à la Sorbonne, la cadette était graphiste. Les deux jeunes femmes avaient décidé de passer la soirée avec une amie qui a été grièvement blessée dans l’attentat.
Au moment de l’attentat Sylvie et Erick Pétard étaient bouchers-charcutiers réputés à Chailles, une commune proche de Blois. Un an après le drame qui les a terrassés ils ont revendu leur commerce et pris leur retraite à Monthou-sur-Bièvre commune où Erick Pétard a grandi, où ses filles sont enterrées et où depuis septembre 2016 l’école maternelle est devenue l’école « Marion et Anna ».
Ces parents dévastés n’ont plus d’avocat et n’attendent plus rien de la justice : « On sait le rôle joué par les personnes qui seront jugées, on leur reproche d’avoir hébergé ou prêté une voiture aux terroristes mais nous nous désintéressons totalement de leur sort. Ce procès ne changera rien à notre existence et ne nous ramènera pas nos filles. Pour nous c’est du néant, c’est sans valeur. Nous sommes complètement hors de tout cela. Ce n’est pas notre combat » , ont-ils déclaré à nos confrères de la Nouvelle République. Ils n’assisteront pas aux audiences. Que Salah Abdeslam, le seul terroriste encore vivant à pouvoir répondre de ses actes soit dans le box des accusés, ne change rien à leur décision.
La foi, leur refuge
Très croyant ce couple soudé et fusionnel a trouvé dans sa foi chrétienne une nouvelle raison de vivre et d’espérer. Son quotidien s’organise autour de temps de prière « qui nous aident à passer la journée et à rester dans l’espérance », de jardinage et de visites de proches et d’amis. Il vient d’éditer un livre (dont nous rendrons compte dans les jours prochains), écrit à quatre mains, destiné « à entretenir la mémoire de nos filles et à les faire revivre à travers ces lignes, pour qu’on n’oublie pas ce qui s’est passé. »
Après cette horrible soirée du 13 novembre 2015, plusieurs attentats ont continué à ensanglanter la France. « À chaque fois, on se dit que ça ne s’arrêtera jamais. Il ne faut pas que ces drames se transforment en simples faits divers. », dit le couple en colère contre les pouvoirs publics et les personnalités politiques qui, de son point de vue, n’ont pas mis tout en œuvre pour empêcher les attentats.
F.C.
Encadré ou papier annexe
Un procès hors normes
A partir du 8 septembre 2021 et au moins jusqu’au 15 avril 2022, au palais de justice de l’île de la Cité se déroulera le procès des attentats du 13 novembre 2015. Il concerne les attentats survenus dans la salle du Bataclan, aux terrasses du 10e et 11e arrondissement de la capitale et au stade de France qui ont fait 131 morts et plus de 400 victimes. Verdict attendu le 25 avril 2022, prononcé par des magistrats professionnels et non par un jury populaire.
Vingt personnes seront jugées dont Salah Abdeslam, seul survivant des commandos terroristes et mutique jusqu’ici. Elles seront interrogées une première fois en novembre.
Ce procès historique compte 1 800 parties civiles et 300 avocats pour les représenter. Plusieurs centaines de victimes ou de proches devraient témoigner chaque jour du procès à partir de la fin septembre et courant octobre lors des audiences qui doivent se tenir du mardi au vendredi à partir de 12h30 avec suspension lors des vacances scolaires et autour du 13 novembre.
Une salle d’audience qui sera ensuite démontée a été construite pour ce procès hors normes pour un coût total de 7,5 millions d’euros. Forte de 750 mètres carrés elle peut accueillir jusqu’à550 personnes.
Un web radio (système de diffusion sonore via une connexion internet) doit permettre aux parties civiles qui ne souhaitent pas se déplacer au palais de Justice ou sont dans l’incapacité de le faire d’écouter les débats à distance.