Malgré les aléas du temps, malgré la réduction des jauges, malgré la diminution du nombre de concerts et d’artistes, malgré tout ça et bien d’autres choses encore, la 45ème édition du Printemps de Bourges Crédit Mutuel version été a rempli toutes ses promesses. Après de nombreux mois aphone, le monde du spectacle vivant a retrouvé scènes, sonos, spectateurs, et tutti quanti. Les masques peuvent maintenant tomber.
Un début de festival berruyer sous la pluie, rien d’anormal. Une fin de festival berruyer sous la pluie itou, rien d’anormal non plus. Pourtant cette 45e édition était autre, toute autre. Pourtant allégée comme un yaourt, elle en avait cependant conservé toute son onctuosité et sa saveur. Celle d’un retour à la vie d’un réseau artistique sévèrement impacté par la pandémie. Malgré les premières ondées, les sourires sont revenus sur le visage des artistes, sur celui des spectateurs aussi et une grande partie de la filière musicale était enfin réunie sur les rives de l’Auron.
Alors que les jauges étaient réduites à 65 % de la capacité normale des salles, tandis que les concerts étaient passés à 37 au lieu des 90 habituels, pendant que les terrasses ne pouvaient, normalement déborder sur la chaussée, on pouvait craindre à une édition grande échelle de la kermesse paroissiale plus qu’à un festival proprement dit. Que nenni. Chacun à sa manière a pris son plaisir, souvent dans une même communion. Comme assuré dans le communiqué de presse final, oui, il était solaire le bonheur dans les yeux de Pomme, Gaël Faye, Flavien Berger, November Ultra, Mélissa Laveaux et Obi, réunis le temps d’une soirée de communion sur la scène du Palais d’Auron, dans ceux de Uèle Lamore, Yan Wagner, Lou Doillon, Sandra Nkaké, Victor Solf, Malik Djoudi, dont l’exaltation du premier album de Portishead a ébloui le public de la Cathédrale Saint Etienne.
D’un autre monde à la création
Comme tous les ans, le Printemps aura tenu toutes ses promesses et afficher ses convictions essentielles, celles d’un festival de découvertes, de créations et d’émergence artistique. Revendiquer aussi une culture accessible et partagée par tous, avec la Live Zone où étaient retransmis gratuitement les concerts du palais d’Auron, entre autres. L’inauguration du village Demain le Printemps, préfiguration des transformations à venir participe du devenir du PdB : un festival plus responsable, plus inclusif, qui résonne dans toute sa ville, en n’oubliant personne. Le Printemps, dimanche, a tirer définitivement le rideau sur cette édition si spéciale. Celle d’un Printemps estival, annonciateur des beaux jours, lors duquel tous les publics se sont retrouvés pour chanter et vivre à nouveau les émotions de la musique sur scène.
On est passé d’Un autre Monde à la Jean-Louis Aubert aux créations avec le Glory Dummy Portishead en célébration du premier album du groupe pop anglais et terminé avec les engagés de Tryo. On s’est laissé embarqué par Feu ! Chatterton, les ex-iNOUÏ devenus grands. Eux-mêmes se laissent bien aller dans des morceaux débutés façon Mona Lisa et terminés en mode Shaka Ponk pour un délire final. On a pris la saucée des averses berruyères et le soleil estival dans une merguez-street toute vide. On a gardé les masques, aspergé les mains de gel hydroalcoolique et foncé au pied de la scène pour se coller à son voisin, à sa voisine. On a été à la cathédrale Saint-Étienne et pu vérifier que son acoustique est une aubaine pour tous les ingés son du monde. On a mangé une galette aux patates sur son parvis et bu un coup en terrasse, même si elle débordait un peu moins que d’habitude sur le pavé berruyer.
Côté scène comme côté public, le Printemps a dansé avec l’été et entraîné avec lui jeunes talents émergents et artistes confirmés dans une même impulsion : malgré de longs mois sans scène ni répétitions, toutes et tous ont tenu à répondre à l’invitation, et partager, pour certains, des œuvres inédites, à l’instar de S+C+A+R+R et son univers particulier, Silly Boy Blue et sa fraîcheur ou des 33 iNOUïS du PdB. Parmi ces derniers, 3 petits jeunes ont eu des prix : Annael, le prix du Printemps de Bourges-Crédit Mutuel – iNOUïS 2021, Vikken celui du Jury et Ekko celui du public Riffx.
Le PdB 2021 était autrement et pourtant il reste le 1er festival des musiques actuelles, rendez-vous incontournable de la filière musicale. Et c’est les organisateurs qui le disent eux-mêmes : « Le Printemps de Bourges Crédit Mutuel annonce le renouveau artistique et la venue des beaux jours en ouvrant la saison des festivals. ». Finalement, tel un Perceval des temps modernes, on peut l’affirmer : c’est pas faux …
Fabrice Simoes