Niché à l’extrémité ouest du promontoire surplombant la ville et regardant de haut la vallée du Loir, le château de Châteaudun ouvre ses portes à une exposition de tapisseries, à cet artisanat tellement inscrit dans notre patrimoine qu’il en devient un art.
“Confluencia” cl Rosa Tandjaoui
Cette exposition intitulée “Au fil du temps” est le fruit d’une collaboration intelligente, entre la Cité internationale de la tapisserie d’Aubusson, le Centre Pompidou et le Château de Châteaudun, nous permet de découvrir sous un nouveau jour, à la fois, l’édifice et les pièces mises en scène dans ce lieu exceptionnel !
Dès l’entrée, nous sommes fascinés par « Confluentia », une illusion d’écoulement d’eau imaginée par l’architecte et designer parisienne : Bina Baitel. Le tissage est réalisé par l’Atelier Françoise Vernaudon dans la Creuse, les deux meubles en chêne créés par La Fabrique à Lyon et le montage de la tapisserie sur les meubles par les Ateliers Charles Jouffre à Lyon ; nouvelle preuve, s’il en est, de la dynamique de nos territoires.
Cette œuvre ; Grand Prix de l’appel à création contemporaine de 2012, est la parfaite illustration de l’ambition de la Cité internationale de la tapisserie d’Aubusson : créer un mouvement de coopération, entre un artiste qui produit du sens à travers la réalisation de son œuvre, une entreprise qui produit de la valeur en fournissant la ressource nécessaire à la création et les pouvoirs publics qui produisent du symbole en exposant l’œuvre dans l’espace public.
Rappelons ici la genèse de la Cité de la tapisserie, qui fut imaginée en 2009, à la suite de la décision de l’UNESCO, d’inscrire les savoir-faire de la tapisserie d’Aubusson au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité et inaugurée en 2016, par le Président de la République de l’époque : François Hollande.
Portée par un syndicat mixte réunissant le Conseil Départemental de la Creuse, la Région Nouvelle-Aquitaine et la communauté de communes Creuse Grand Sud, elle valorise un patrimoine présent depuis le 15e siècle, par le biais d’un musée et d’une bibliothèque, mais abrite également un centre de formation et de soutien aux entreprises, tout en lançant régulièrement des appels à projets en création contemporaine.
Quelle ironie de l’histoire, de voir le succès de ce lieu, dans un département : la Creuse, le moins peuplé de France, touché par un chômage de masse et dont la revue (très parisienne) Technikart publiait, en 2012, un reportage intitulé «La bouse ou la vie », où les habitants de Guéret étaient traités « de ploucs, de viocs et de bovins en surnombre » croupissant dans un « désert culturel ».
En continuant la visite, à la découverte de tapisseries beaucoup plus anciennes : du 18e siècle, notamment, en passant par les 24 divans du monumental « Auditorium » de Franz West et finissant par la collection d’assiettes de la Faïencerie de Gien, on réalise, à quel point, cet art est inscrit dans l’histoire de notre patrimoine.
Une parfaite collaboration entre des hommes et des femmes aux intérêts, aux métiers et aux savoir-faire divers et parfois antinomiques. Mais sans chacun d’eux, rien ne nous parviendrait du passé et nous ne laisserions rien à notre futur.
Il me reste à vous signaler, au passage, que si la visite du château et de ses jardins est libre, celle du donjon nécessite la présence d’un guide et de trois visiteurs au minimum : j’en escaladerai les cent cinquante marches lors d’une autre visite.
Je vous donne donc, rendez-vous à Châteaudun, pour une déambulation que je vous souhaite aussi instructive qu’agréable.
Rosa Aoudia-Tandjaoui
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