Place d’Arc, entre le tram et la gare des bus, quelques sdf avaient planté leurs tentes, trouvant là un abri précaire aux intempéries tout en exposant aux passants leur misère dérangeante. Ils furent au bout de quelques jours expulsés comme il se doit pour rétablir la tranquillité purement visuelle des passants. Quelques barrières furent alors disposées pour éviter toutes velléités de retour intempestif, en attendant l’arrivée promise d’arceaux pour les vélos arceaux restés inaccessibles et finalement démontés.
“La reconquête” F. Lavrat cl GP
Mais c’était sans compter la volonté de promotion culturelle de la Métropole qui décida d’y implanter une œuvre d’art, dévolue évidemment à une Jeanne d’Arc exhibée soudain dans ce recoin exiguë, œuvre de l’artiste local François Lavrat intitulée “La Reconquête”, entourée de blocs de béton dont la finalité dissuasive ne laisse aucun doute. Et au cas où le badaud n’aurait pas compris la métaphore du “recyclage“, une plaque (rédigée par qui ?) a été ajoutée pour inscrire l’œuvre dans le cadre des Assises de la Transition Ecologique organisées par la Métropole et ainsi mobiliser la “fougueuse” Jeanne dans cette tâche.
Reste pourtant ce message subliminal auquel on ne peut s’empêcher de penser, induit par le souvenir récent de l’occupation de ce lieu par des sans-abris, occupation remplacée par ces blocs de béton bien peu artistiques et en tout point identiques à ceux installés ailleurs pour interdire l’installation de ces tentes d’infortune. Et comment interpréter cette phrase pour le moins ambiguë justement à cet endroit: “Une réaction en 3D à la pollution envahissante“, phrase inscrite sous le thème d’une “Reconquête” johannique ? Implicites ou délibérés, les sous-entendus de cette installation sont troublants et devraient, pour le moins, interroger le président socialiste de la Métropole quant à l’opportunité du choix curieux et contestable d’implanter à cet endroit cette œuvre d’art.
Gérard Poitou