En attendant le déconfinement cinématographique, on continue à dévédiser…

Rien n’est encore acquis pour une réouverture des salles obscures au mercredi 19 mai. De toute façon, elles ne seront pas accessibles à 100%, une jauge sécuritaire étant obligatoire dès cette reprise, et ce, pour…x jours, encore. Alors, en attendant, on peut encore visionner des DVD. Sur le plan régional, «Chambord», de Laurent Charbonnier, tient une bonne place au hit parade, devant un autre localier, l’orléanais Karim Braire, vedette du film «La Source», par acteur interposé…

Nul n’est prophète en son pays et encore moins quand il n’y a pas de vagues pour voguer dessus. Car naître aux bords de la Loire, même dans le quartier des Blossières, à Orléans, et avoir vécu à La Source, cité créée par Roger-Secrétain, maire au siècle dernier, à la suite d’un voyage dans le nouveau monde à l’Ouest, ne prédisposait pas Karim Braire à devenir dompteur de rouleaux aquatiques…

L’histoire de ce jeune Orléanais a de quoi faire rêver. Elle commence par quelques montées en puissance dans la délinquance et les petits trafics qui vont le mener vers les lycéens et autres scolaires huppés de la ville de Jeanne d’Arc où il deale. Son avenir est bien compromis dans la société jusqu’au jour où la Mama l’oblige à accompagner l’une de ses jeunes sœurs à la médiathèque, en body-guard… Trompant son impatience, il tombe en arrêt, comme un chien de chasse face à son gibier, devant une photo d’un surfeur planant au-dessus des flots de l’Atlantique déchaîné, du côté des Landes et du Sud-Ouest de la France. Coup de foudre. Pet au casque. Gros éclairs et tonnerre de Zeus. Il sera surfeur…

Mais, quand on ne sait pas nager…ou qu’on nage comme un fer à repasser, il y a de quoi prendre son mal en patience ou renoncer. Têtu comme un brêle (âne indigène au Maghreb), fan de Jeanne d’Arc «qui appartient aux Orléanais et pas à Le Pen», il s’accroche à son rêve, bataille, réussit à prendre des cours, grâce à une personne compréhensive, «flotte», boit plusieurs tasses et part à l’aventure aidée par un coach local, qui existe en vrai, à Orléans, et son épouse en mal d’enfant…

Sur les pas de Karim

Quelques années plus tard, Karim Braire écrit le livre de sa vie, de son odyssée, de la réalisation de ses espoirs les plus fous et les plus cinglés. «Zaram Sunset» connaît un relatif succès. Il est interviewé et notre consœur orléanaise de France 3 Centre-Val de Loire, Corinne Bian Rosa, l’approche, le cerne, l’apprivoise «car rien n’était évident au premier abord», se penche sur son cas. Le reportage «Un caïd sur les planches» (disponible sur You Tube) sort Karim d’un premier anonymat. Il devient une star, est jalousé et l’un de nos confrères le définit comme «le meilleur surfeur in the world» alors qu’il aurait dû utiliser l’accroche «l’un des meilleurs surfeurs au monde». La polémique enfle. On se bagarre sur les réseaux sociaux, et ailleurs, jusqu’au jour où Rodolphe Lauga, en quête de son premier film, le réalise avec Karim (Sneazzy) en vedette et Christophe Lambert (le coach), en second rôle très fort.

«La Source», un titre qui coule de source, sera tourné à Angoulême. Distribué par la société Apollo (groupe CGR), qui avait déjà accompagné «Guy» (un autre Orléanais…) et produit par Nolita (www.nolitacinema.com/longsmetrages), le film est sorti sur les écrans, fin juillet 2019. Assez bien accueilli, il a poursuivi sa carrière par le bouche à oreille et les réseaux. Il prouve, comme dans le livre, qu’on peut réussir sa vie, avec un peu de bonne volonté, beaucoup de courage, énormément de rêves et de la ténacité à revendre, à condition de trouver des mains secourables destinées à vous sortir de la mouïse. En s’extrayant des eaux troubles des petits arrangements entre amis et en côtoyant l’écume des rouleaux sains de l’Atlantique en furie, Karim Braire laissera sa trace dans une œuvre sympa à voir. Ce n’est donné à tout le monde. Et comme tout se termine bien, malgré quelques contestations sans trop d’intérêts, laissons les chiens aboyer et la caravane passer. Les ânes pourront braire dans le désert de l’indifférence de Karim qui aura vécu, les yeux ouverts, un rêve américain. Car peu de trentenaires au monde ont eu une œuvre cinématographique consacrée à leurs vies, pendant leur passage sur terre.

Et si c’était cela le miracle de ce quartier neuf de La Source voulu par le visionnaire Secrétain, si critiqué à l’époque du lancement de son idée ? Qui sait ?

Jean Morris

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