Produisant de l’électricité grâce à la force du vent, l’éolien a du mal à se défaire de ses critiques. En région Centre-Val de Loire, de nombreuses associations et collectifs ont vu le jour pour lutter contre leur propagation tandis que des hommes politiques prennent position contre l’implantation de nouvelles éoliennes à l’approche du scrutin des régionales et départementales des 20 et 27 juin.
S’il y a un élément qui ne fait pas consensus dans la transition énergétique, c’est bien celui de l’éolien. Avec leurs immenses mâts allant jusqu’à plusieurs centaines de mètres, ces éoliennes poussent pourtant comme des champignons ces dernières années en région Centre-Val de Loire, comme partout sur le territoire national. Vantées pour leur capacité à produire de l’électricité grâce à la force du vent et donc d’être une énergie totalement renouvelable, reste que leur installation passe souvent par de fortes oppositions locales qui s’organisent en collectifs ou associations.
Défiguration du paysage, dévalorisation immobilière, nuisances visuelles et sonores, production uniquement intermittente vendue plus chère, mise en danger de la faune et de la flore, etc., les arguments des détracteurs des éoliennes ne manquent pas. « Très concrètement, nous reprochons à l’éolien d’être bâti sur le mensonge, raconte Michel Davacens, président de l’association Tempête en Beauce. L’Allemagne, pourtant championne de l’éolien avec plus de 38000 installées, a relancé ses centrales à charbon pour palier leurs défaillances car une éolienne ne produit de l’électricité que 25% du temps. C’est aussi une très bonne opération financière pour les promoteurs étrangers puisqu’EDF est obligé d’acheter prioritairement l’électricité produite à un tarif très élevé fixé par l’Etat lui-même. »
Même tonalité du côté de Vincent Pasquier, président de l’ADECTE (Association pour la Défense de l’Environnement Charnizéen et des Territoires Environnants), un collectif formé au sud de la Touraine. « C’est un combat de longue haleine mais on n’a pas beaucoup d’armes pour lutter, soupire-il. On espère un réveil des consciences car c’est vraiment dommage de mettre autant d’argent dans un truc pareil… C’est dommage que l’Etat se soit désengagé. On laisse ce secteur aux mains de n’importe qui voulant faire de gros profits. »
De son côté, Maggy Ernst, membre du collectif Vent contraire Touraine-Berry tient à souligner que « le rapport AUBERT confirme tous ces faits et demande l’abandon des aides aux EnRI (énergies renouvelables intermittentes, NDLR) payées par le consommateur avec les taxes sur les carburants et leur facture d’électricité car l’argent des éoliennes provient de la poche du contribuable avec la TCIP et nos factures d’électricité ! »
Les politiques s’en mêlent
Aujourd’hui, plus de 70% des projets d’installation d’éoliennes font l’objet de recours. Cette mobilisation citoyenne a poussé les hommes et femmes politiques à s’emparer de ce sujet. Un sujet pour le moins clivant en pleine période électorale avec l’échéance des régionales et départementales des 20 et 27 juin prochains. Ainsi, à droite et à l’extrême droite, on s’affiche ostensiblement contre l’implantation de nouvelles éoliennes. Nicolas Forissier, actuel député de l’Indre et tête de liste (LR) pour la Région Centre-Val de Loire, a co-signé une tribune dans le journal Le Monde avec Gilles Platret (maire (LR) de Chalon-sur-Saône) et Nicolas Florian (ancien maire (LR) de Bordeaux). Les trois candidats aux Régionales appellent « à un moratoire absolu et immédiat sur tout nouveau projet d’éolien terrestre dans nos régions » pour ce qu’ils considèrent être une « aberration » économique, environnementale, démocratique et pour la souveraineté industrielle.
Cependant, l’idée n’est pas nouvelle puisqu’elle provient notamment de leur collègue et député (LR), Guillaume Peltier, lui candidat à la présidence du département du Loir-et-Cher. Avec entre autres Nicolas Forissier, il a déposé une proposition de loi * à l’Assemblée nationale le 14 octobre dernier « visant à mettre en place un moratoire immédiat sur la construction d’éoliennes terrestres, sauf avis favorable du conseil municipal et adoption d’un référendum local ». Guillaume Peltier complète les arguments des associations citoyennes et rappelle que, selon le ministère de la transition écologique et solidaire, la programmation pluriannuelle de l’énergie conduira à faire passer le parc éolien de 8 000 mâts fin 2018 à environ 14 500 en 2028, soit une augmentation de 6 500 mâts.
« Cette politique énergétique est un gouffre pour les finances publiques, détaille le numéro 2 de son parti, et n’a aucun sens dans un pays surendetté, comme le souligne l’annexe n° 18 du rapport de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018, dont le rapporteur spécial était le député Julien Aubert. En effet, selon la Commission de régulation de l’énergie, le concours total de l’État aux éoliennes serait estimé entre 72,7 et 90 milliards d’euros depuis les années 2000. À titre de comparaison, la construction de l’ensemble du parc nucléaire français aurait coûté environ 80 milliards d’euros au contribuable, pour des résultats incomparables. »
Du côté du Rassemblement National (RN), on n’est pas en reste. La tête de liste pour la région Aleksandar Nikolic a, lui aussi, pris position contre l’implantation de nouvelles éoliennes sur le territoire. Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, il assure vouloir « protéger la ruralité ». « Pour chaque éolienne, il faut près de 1000 tonnes de béton, poursuit-il. C’est évidemment un désastre écologique en raison de l’artificialisation des sols. La multiplication de ces projets éoliens a pour conséquence une augmentation du prix de l’électricité en raison d’un faible rendement de l’éolien. En plus, les éoliennes ne profitent pas à notre industrie puisque nous importons la plupart du matériel nécessaire à leur construction. » Le sujet n’a pas fini de diviser.
Delphine Toujas
* « Compte tenu du contexte sanitaire particulier dans lequel nous évoluons depuis plusieurs mois et des nombreuses propositions de lois déposées sur le sujet, ma proposition de loi sur un moratoire éolien ne fait pas, aujourd’hui, parti des priorités de la majorité et du gouvernement. Je m’attache néanmoins à valoriser quotidiennement cette proposition de loi auprès de différents acteurs afin qu’elle devienne une priorité et qu’elle soit éventuellement soumise au vote en 2022 », écrit Guillaume Peltier.