Insolentes, énigmatiques et colorées, ces fresques qui défient les crues du fleuve sont en passe, à Orléans, d’être désormais classées et sauvées des eaux. Non encore remis en cause par la crise sanitaire actuelle, l’événement Festival de Loire qui se déroulera à Orléans du 22 au 26 septembre 2021 entend offrir aux Orléanais et nombreux visiteurs extra muros une animation culturelle encore plus conséquente que celle proposée les années précédentes.
Une heureuse sauvegarde des fresques du pont Joffre
Si l’on retrouvait lors de cette manifestation les traditionnelles, festives, artisanales et gourmandes animations prévues sur les quais, le cœur de ville serait aussi gagné par l’onde festivalière et ne sera pas seulement paré d’oriflammes ligériens flottant au vent. En effet, sur une proposition du
Musée des Beaux-Arts d’Orléans, établissement qui avait en son temps fait appel au plasticien Ugo Schiavi pour effectuer des moulages du buste de la Jeanne d’Arc en prière de Marie d’Orléans, bronze accueillant le visiteur en haut des escaliers de l’Hôtel Groslot les beaux-arts ne vont plus finir dans les oubliettes des courants d’air.
Ugo Schiavi, ce créateur qui s’approprie les sculptures de l’espace public et qui avait travaillé en étroite collaboration avec les jeunes loups de
l’Ecole Supérieure d’Art et de Design d’Orléans, celui qui avait aussi ressuscité les débris de sculptures contenues dans les réserves du MBO lors de l’exposition
“Et in Arcadia” en mars 2019 a, par conséquent, avec conviction et bonheur, mis la puce à l’oreille du service culturel, de la direction de l’événementiel, et du laboratoire Ville d’art et histoire. D’un commun enthousiasme, tous ont décidé d’opérer la sauvegarde des tags colorés fleurissant sur les piles du pont Joffre.
Ce prélèvement à haut risque des peintures urbaines pour lequel sera consultée l’entreprise Roc, société qui a déjà participé à la restauration de nombreux édifices de la cité, dont la gothique Sainte-Croix, va nécessiter de moyens scientifiques de décollement des œuvres sur quelques centimètres de profondeur et de manière uniforme, tout cela pour ne pas endommager le noble bâti de béton existant.
Par petites surfaces d’un mètre sur un mètre, seront ainsi dégagées les fresques qui seront reconstituées dans leur globalité sous forme d’un puzzle géant désormais figé
au Centre culturel Vinaigreries Dessaux, espace d’expression un temps mis en berne mais qui va retrouver à deux pas des quais sa fonction promise de site culturel unissant l’art contemporain et l’histoire.
Les vinaigreries Dessaux cl JDB
Une parade annoncée début avril
Dans une proposition qui ne tardera pas à être adoptée lors d’un proche conseil municipal, il est, de source bien informée, à souligner que le coût de cette opération sera modeste puisque les artistes révolutionnaires n’ont pas demandé de rémunération et que, côté signalétique, les autres tags et graffitis de la rue Saint-Flou seront suffisamment éloquents pour attiser le regard et la curiosité du passant.
A ce jour, de nombreux acteurs culturels de la cité se félicitent de la cohérence de cette opération tout en redoutant, comme ce fut le cas à Berlin après la chute du mur, que certains galeristes profitent de l’évènement pour vendre au prix fort dans de petits sachets, des fragments colorés johanniques non signés.
De son côté, la métropole orléanaise, résolument engagée dans le projet, a tenu à rassurer les défenseurs du patrimoine et les riverains. Dans un récent communiqué à l’adresse des automobilistes et des cyclistes, elle assure que ces opérations de sauvegarde se dérouleront sans nuire à la circulation sur les berges puisque les pièces sauvegardées du pont Joffre seront acheminées , avec l’aide de techniciens , alpinistes en rappel qui ont déjà beaucoup travaillé sur le Pont Royal, par un navire à fond plat, longue barge de gros tonnage en provenance d’un chantier de construction naval nantais qui reliera le site Joffre au quartier Puellier.
Pour s’associer dès à présent à l’événement culturel, celui que soutiennent unanimement le
Musée de la marine de Loire,
la Fête des Duits, Le Mur Orléans, et l’Association protectrice des oies (APO), les mariniers d’Orléans, dans la grande tradition d’accueil du Vendée Globe, devraient début avril escorter le Cimaise et son équipage avec force musiques et clameurs. Nul doute qu’Orléans vibre ainsi, une nouvelle fois pour l’hymne au fleuve tel celui qu’avait soulevé l’arrivée de l’Inexplosible. Nul doute que la cité s’enthousiasme également pour l’apparition d’œuvres d’artistes de rue telles que celles de
MifaMosa, de
Monsieur Chat ou d’anonymes du Pont Joffre. De véritables et piquants poisons d’avril qui trouveront place un beau jour, non seulement
aux Vinaigreries Dessaux mais aussi, souhaitons le, dans les galeries d’art contemporains du Musée des Beaux-Arts d’Orléans et des
Turbulences du Frac Centre.