Tandis que coule le Cher, tandis que l’Yèvre et l’Arnon font le plein des dernières giboulées de mars, les ministres se succèdent sur leurs rives. Invités par les uns ou par les unes, évités par les autres, trois membres du gouvernement sont venus au pied de la cathédrale Saint-Étienne, la semaine dernière, mais pas tous à Vierzon. Non, surtout pas tous à Vierzon.
Nadia Essayan, la député du Cher, a passé l’après-midi avec les forces de police et le ministre de l’Intérieur. DR
Quand à 6h40, un samedi matin, tombe dans votre messagerie une invitation pour rencontrer le jour même, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et que la réponse doit être faites avant 9h00, on se dit que la grasse matinée est foutue. Surtout lorsque l’on peut lire à loisir, dans le quotidien départemental, dès potron-minet le jour même, le pourquoi de cette visite d’un membre du top cinq gouvernemental. On peut d’ailleurs se demander où le petit Gérald, qui ne paye pas de mine comme ça, trouve l’énergie nécessaire pour tout faire en une seule journée : répondre aux questions d’un journal de province avant 9 heures de confrontation, devant un juge d’instruction, avec une personne qui l’accuse de viol depuis 2017, entre autres. Là, la visite, dès le lendemain d’une journée particulièrement éreintante, interpelle. C’est à la lecture des réseaux sociaux – une mine d’or – et de l’article détaillé du Berry Républicain, de ce même samedi, que l’on prend la mesure réelle de ce début de week-end foutu pour les journalistes de permanence.
On apprend ainsi que le ministre de l’Intérieur vient, à la demande de la députée Modem Nadia Essayan, dans la suite des visites, jeudi, des ministres des niveaux 4 et 5 dans la hiérarchie gouvernementale, Brigitte Klinkert, ministre déléguée auprès de la ministre du travail et chargée de l’insertion, et Sarah El Haïry, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, chargée de la Jeunesse et de l’Engagement. Et que, pour que la fête soit plus belle, une 4e visite ministérielle est annoncée pour ce lundi. Cette fois c’est Nathalie Elimas, Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, chargée de l’Éducation prioritaire, qui doit s’y coller.
Pour la visite d’Edouard Philippe, alors 1er ministre, Nadia Essayan et Nicolas Sansu étaient ensemble sur la photo. Depuis, l’une et l’un se boudent. Photo Fabrice Simoes
Pour les deux secrétaires d’État, ce sont des copines à Nadia, c’est elle qui le dit « c’étaient mes deux voisines immédiates sur les bancs de l’Assemblée. Nous nous connaissons très bien et nous nous apprécions mutuellement… Je suis heureuse de voir que mes invitations ont trouvé de multiples réponses positives pour une densité de visite historique ! » Pour les autres, si ça peut piquer les yeux du maire Communiste de Vierzon, Nicolas Sansu, ça ne mange pas de pain !
Nadia et Nicolas ne partirons pas en vacances ensemble
D’autant que, depuis quelques temps, la députée du Cher et le maire de Vierzon, adversaires lors des dernières législatives, n’ont jamais vraiment enterré la hache de guerre. La députée Nadia Essayan s’est vue reprocher, par ses meilleurs ennemis, sa « transparence sur le terrain ». Le maire Nicolas Sansu participe à cet effacement en omettant volontairement de l’inviter lors des cérémonies d’inauguration de travaux, de bâtiments et toutes ces sortes de choses qui font le remplissage des pages de Locale. Grosso-modo, il avance pour raison principale que pour inaugurer les chrysanthèmes, il faut financer les chrysanthèmes… Ce qui n’est peut-être pas faux mais manque cruellement de principe républicain.
Nicolas Sansu, le maire de Vierzon, voulait bien accueillir le ministre de l’Intérieur, mais pas avec la député Nadia Essayan. Photo Fabrice Simoes
De plus, communiste et maladroit, ou provocateur on ne sait pas trop, des défauts associés qui font beaucoup trop pour un seul homme, Nicolas Sansu a osé écrire, Facebook oblige : « La clôture de ce bal des débutantes se terminera lundi par la venue de Nathalie Elimas, secrétaire d’État à l’éducation prioritaire, qui viendrait (la ville propriétaire des locaux n’a pas encore été approchée !) à l’école du Colombier. » De fait le terme de « bal des débutantes » n’est pas passé pour cause de sexisme… Il aurait pu expliquer que Bal des conscrits ça ne marchait pas vu que 3 ministres femmes pour un seul homme, la balance était sérieusement favorable à la gente féminine ! Même pas…
Gérald Darmanin avec des effectifs en plus
Gérald Darmanin, après être passé par la brigade de gendarmerie de Saint-Cyr-en-Val, comme quoi il ne faut jamais faire de voyage à vide, est venu annoncer verbalement samedi ce qu’il avait dit au Berry Républicain, vendredi : des effectifs en plus à Bourges et à Vierzon. Enfin, presque en plus, parce que les suppléments ne sont finalement que le retour à la normale en termes de postes. Les commissariats sont en demande, depuis plusieurs mois, de remplacements des divers départs, mutations ou retraites. Et aussi, éventuellement, l’étude d’un projet de nouveau bâtiment pour un commissariat tout neuf à Vierzon. Un projet sur lequel la municipalité de la deuxième ville du Cher a déjà fait des propositions, comme un bâtiment déjà existant – il est devenu depuis l’espace Maurice-Rollinat et accueille le Micro-folies musée- refusé pour cause de « site en zone inondable », et divers terrains dont l’un, un parking en centre-ville, a vu fleurir les clous d’arpenteur.
Le ministère est aussi au fait de la demande puisque le chiffrage des travaux, selon Gérard Darmanin lui-même, serait déjà estimé, soit 6 millions d’euros. Samedi, dans le Berry Républicain, on pouvait cependant lire, sous la plume de Geoffroy Gay, une menace à peine voilée. « Je regrette l’attitude du maire de Vierzon (Nicolas Sansu, PCF). Je ne viens pas à Vierzon demain (aujourd’hui, NDLR) car il a refusé de me recevoir en mairie avec la députée. Au moment où nous essayons de mettre des effectifs en plus, où j’allais dire que j’étais tout à fait prêt à regarder l’investissement autour du commissariat de police, son attitude est peu républicaine. Je vois comment il se comporte dans les visites ministérielles, ses propos tenus sur les réseaux sociaux. J’ai eu un échange animé avec lui, hier (jeudi soir), alors que je le connais, j’ai été député avec lui. C’est une attitude qui ne favorise pas les dossiers de la ville. C’est bien dommage… »
Alors Brigitte et Sarah sont bien venues voir Nadia, jeudi, à Vierzon, presque en catimini, après être passées par Bourges pour que ça fasse plus vrai. Alors Gérald est bien venu voir Nadia, samedi, mais que à Bourges parce qu’à Vierzon, ça craint trop la manif. Alors Nathalie n’est pas venue voir Nadia, lundi, à Vierzon et à Bourges non plus.
Si ça n’est pas encore les grandes manœuvres électorales, un an avant les échéances législatives, mais cela y ressemble beaucoup, non ?
Fabrice Simoes
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