Alors qu’au nom du climat et de la transition énergétique, certains font la promotion de l’éenergie nucléaire comme étant l’énergie propre du futur, le « Collectif d’Alarme Nucléaire de l’Orléanais » (CANO) veut informer la population sur les risques encourus en vivant dans une vallée où, sur 200 km, fonctionnent quatre centrales nucléaires. En effet la région Centre Val de Loire abrite 4 des 19 centrales nucléaires françaises et 12 des 58 réacteurs. Nous interrogeons Monsieur Frédéric Tarche, un des membres du collectif.
La centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux dans le Loir-et-Cher. Photo Suaudeau/wiki
En décembre 2019 votre collectif a édité un livret : « Saint-Laurent, STOP à l’acharnement nucléaire ! » sur les menaces que fait peser l’état de la centrale nucléaire de Saint*Laurent, proche des villes de Blois et d’Orléans. Les risques nucléaires ne sont pas spécifiques à cette centrale. Quel est l’accident le plus redoutable ?
Frédéric Tarche : À l’heure actuelle, l’industrie mucléaire, sans prendre en compte son secteur militaire, est la plus dangereuse pour toute l’humanité. En cas d’explosion d’un réacteur dans une des quatre centrales (Belleville, Dampierre, St Laurent, Chinon) de notre région, avec des vents à dominante Est/Ouest et Ouest/Est, la contamination radioactive entrainera de très nombreux cancers ainsi qu’une pollution des terres pour des centaines d’années. Nous en avons malheureusement désormais la preuve après les explosions de Tchernobyl et Fukushima. La situation dans les centrales françaises, comme pour les quatre de notre région, est critique de l’aveu même de l’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN) : cuves usées, fissures, radier (dalle d’assise des cuves ) à consolider. Ce sont des travaux gigantesques, très couteux, voire techniquement impossibles pour les cuves.
Après ces deux désastres, comment des décideurs de haut niveau, des ingénieurs bardés de diplômes, peuvent encore faire prendre ces risques mortels à la population ?
F.T. : Nous sommes entrés dans un temps de l’humanité où ceux qui ont du pouvoir veulent faire croire que l’intelligence artificielle, autrement dit l’usage de formules mathématiques pour réglementer notre vie, est supérieure à l’intelligence humaine. Ils satisfont ainsi leur désir névrotique de toute puissance et ils continuent de croire dans le progrès « à tout prix » y compris celui de la vie.
Vous dénoncez toute une liste de dangers en rapport avec les centrales nucléaires de la région Centre-Val de Loire mais, en cas d’accident, que préconisez-vous afin d’en limiter les terribles conséquences ?
F.T. : Nous demandons, entre autres, que les autorités de l’agglomération orléanaise, du département, de la région, distribuent rapidement, à toute la population, par courrier postal, parce que tout le monde n’a pas un smartphone ou ne souhaite pas être une fois de plus connecté, les informations expliquant ce qu’il faut faire et ne pas faire en cas d’accident nucléaire. Il faut indiquer où seront stockés les pastilles d’iode à distribuer urgemment. Nous réclamons que les sirènes municipales soient à nouveau en fonctionnement avec des exercices d’alerte réguliers, bien au-delà des 20 km préconisés autour des centrales, calcul irresponsable qui oublie que la radioactivité se diffuse par voie aérienne et n’a pas de frontière !
Comment travaillez-vous ?
F.T. : Nous collaborons régulièrement avec de nombreuses associations, d’autres collectifs et des partis politiques. Ainsi nous échangeons des informations avec l’association Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité (CRIIRAD), le réseau « Sortir du nucléaire », « ATTAC France » et « La Loire vivra », les partis politiques la France Insoumise (LFI), le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), Europe Écologie Les Verts (EELV)…
Avec la pandémie nos actions auprès du public sont ralenties. Nous continuons néanmoins de nous réunir et diffusons une pétition exigeant des élus de la région qu’ils informent la population de ce qu’il faudra faire en cas d’explosion d’un réacteur.
Quels sont vos projets dans un proche avenir ?
F.T. : Plusieurs villes de France vont commémorer les dix ans de la catastrophe nucléaire de Fukushima. Notre collectif loue un car afin de se rendre le samedi 13 mars à Nantes qui sera une de ces villes commémoratives. D’autres livrets sont en préparation dont un sur la dernière trouvaille d’EDF : « Programme Ethos-Vivre dans un jardin nucléaire ». Le projet Ethos veut convaincre la population qu’après l’explosion d’un réacteur, vivre dans une zone irradiée est une preuve de courage et de résilience. Ces propos sous entendent que ceux qui refuseront de revenir dans ce « jardin » sont des couards « qui n’osent pas se confronter au danger en dominant leurs peurs »…
Propos recueillis par Jean-Paul Briand
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