[Reportage] Une nouvelle distribution alimentaire organisée par des bénévoles sur le campus d’Orléans a vu se presser près de 400 étudiants alors même que l’université dispose de fonds non-utilisés.
Distribution alimentaire du 30 janvier campus Orléans la Source @Mourad Guichard
Ils étaient près de 400 étudiants, ce samedi 30 janvier, à braver la pluie pour récolter les fruits d’une distribution alimentaire orchestrée par le collectif Orléans solidaire avec les étudiants du monde (OSEM). Un record absolu. Parmi eux, toujours de nombreux étudiants africains, asiatiques et maghrébins coincés depuis le premier confinement dans leur logement universitaire, mais pas seulement. On voit désormais des étudiants de toute provenance. « Mes parents n’ont clairement pas les moyens de m’aider », explique l’un d’eux originaire du Berry. « Si vous me posez la question, non, je ne pensais pas me retrouver là un jour ».
En tous cas, pas aussi tôt. Ce samedi, chacun est venu avec un cabas, une charrette à roulette ou un sac à dos. Les plus prévoyants se sont équipés de vêtements de pluie. Au fil des minutes, la file d’attente n’en finit plus de s’étirer, flirtant avec l’arrêt de tram Parc Floral distant de plusieurs dizaines de mètres du lieu de distribution. « On ne s’y attendait pas du tout », confie Lucile Mollet, animatrice d’OSEM. « À tel point, que nous avons dû envoyer des bénévoles refaire le plein dans un hypermarché voisin ». Une heure avant le début de la distribution, une centaine de personnes étaient déjà massées à proximité des lieux.
L’aide de la Région
Cette situation, qui oblige les bénévoles à mobiliser une incroyable énergie depuis près d’un an, est d’autant plus intrigante que l’université possède d’importantes ressources, notamment celles fournies récemment par la Région Centre-Val de Loire. Or, cette aide qui dépasse au total les 300.000 euros pour l’ensemble de la région, n’a pas été entièrement dépensée par l’université d’Orléans, loin s’en faut. « Je vous confirme que les aides ont été utilisées à hauteur de 40%, contre 50% à Tours », indique Anne Besnier, vice-présidente en charge de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. « Les étudiants sont un peu perdus dans toutes ces aides et il y a sans doute un réel manque d’informations. Nous travaillons à ce que la situation bouge ». Soit. Mais la crise de gouvernance que traverse l’université d’Orléans, si elle ne se règle pas dans les prochaines semaines, pourrait maintenir ce statu quo.
Distribution alimentaire du 30 janvier campus Orléans la Source @Mourad Guichard
Deux heures d’attente sous la pluie et dans le froid
Retour à la distribution, ce samedi, en milieu de journée. Après avoir attendu jusqu’à deux heures dans le froid, les étudiants s’inscrivent sur un registre de suivi, puis accèdent les uns après les autres aux stands tenus par des bénévoles. Au menu, des pâtes, du riz, des produits d’hygiène collectés par l’association Les mains tendues ; des vêtements, des couettes, des bonbons proposés par l’organisation caritative Les cœurs d’Hermès. Mais aussi des pizzas du Ristorante del Arte d’Olivet – qui réembauche les étudiants salariés dès qu’il le peut -, des portions de pot-au-feu du restaurant “Le poul et braisé” de Saint-Jean-de-Braye et également les légumes du GABOR, structure regroupant des agriculteurs bio du Loiret. À leurs côtés, une table de la Maison des ados 45 animée par Stéphanie Sobrero. « Nous sommes là pour les écouter et tenter de trouver des solutions en activant les bons leviers », précise-t-elle. Pour ce faire, la MDA est disponible téléphoniquement, physiquement, mais aussi, époque oblige, via les nombreux réseaux sociaux, comme Twitter, Snapchat ou Instagram. À proximité d’elle, une table d’Engie recueille les demandes des étudiants en matière de stage ou de matériel informatique. C’est ce distributeur d’énergie qui, avec OSEM, a participé à l’achat des produits de première nécessité permettant à cette nouvelle opération de voir le jour.
En marge de cette distribution, une bénévole, les traits tirés, avoue retenir ses larmes face à la détresse persistante de ces jeune gens. Sa colère est également palpable. Parmi les équipes mobilisées, seuls quatre administrateurs de l’université sont présents, dont deux élus des syndicats étudiants O’Campus et Unef. La trentaine d’autres devaient sans doute avoir mieux à faire.
Mourad Guichard
A lire aussi: https://www.magcentre.fr/206828-universites-le-president-de-region-descend-sur-le-terrain-a-orleans/