Cela fait près d’un an que la plupart des acteurs du monde de la culture sont à l’arrêt et il est fort probable, après les dernières directives gouvernementales, que les choses durent encore un moment. Les artistes mais aussi toute la filière culturelle sont à la peine. Ils rongent leur frein mais sont passés en mode création, à l’image des membres du groupe berrichon de rock Blankass.
Les affiches de concerts utilisaient le visuel de la jaquette du dernier CD. ©Fabrice Simoes
Dès le début des mesures restrictives, les musicos et les techniciens qui vont avec ont dû stopper leur tournée. La rencontre directe avec le public ne se fait plus. Quant au problème financier, même si parfois le cachet habituel n’est pas forcément mirobolant, tous préféreraient être rémunérés à coups de Sacem et d’honoraires plutôt que par le régime de chômage des intermittents… même si cela permet encore de faire bouillir la marmite, pour un temps au moins.
Pour beaucoup, à peine commencées, les tournées se sont arrêtées nettes. Des stops impromptus comme pour le groupe Blankass des Berrichons Guillaume et Johan Ledoux.
Blankass venait tout juste de démarrer sa tournée CQTN, du nom de son titre phare. Le nouveau CD, lui aussi dénommé C’est quoi ton Nom (CQTN) venait tout juste de prendre son envol. Les garçons avaient bien composé un conte pour enfants, sorti pour Noël 2018, Balthazard Tête de bois, mais cela faisait huit ans que les fans s’impatientaient de ne pas avoir un album rock inédit. Ce sixième opus était donc espéré. La série de concerts qui allait de pair avec sa sortie prenait, sur le papier, une belle allure. Quelques dates avaient déjà permis de mesurer la qualité de l’attente… Alors qu’une quarantaine de dates étaient encore au programme et que d’autres allaient s’ajouter, la tournée s’est arrêtée le 14 mars 2020, juste avant un concert en Périgord. « Nous avions fait une dizaine de concerts seulement de la tournée CQTN et on partait pour Bergerac. C’est à ce moment-là que nous avons eu un appel pour nous dire que c’était annulé… », raconte Guillaume Ledoux.
Le CD-livre ” Balthazar tête de bois” sorti en 2018 a mis un peu de baume au cœur en période de Noël 2020. ©Fabrice Simoes
En passe de rejoindre La couleur des blés dans les hits, le titre a bien continué à passer sur les ondes radio mais le groupe n’a pu bénéficier de la synergie des concerts et encore moins du merchandising, liés à ces rendez-vous. Paradoxalement, ce n’est pas exclusivement dans l’aspect financier que les membres du groupe se sont retrouvés, dans un premier temps, à la peine. Le « heureusement que c’est là, sinon je ne sais pas comment on ferait » émis par le chanteur natif d’Issoudun démontre bien que le régime de l’intermittence dont il bénéficie n’est pas galvaudé. Avec la pandémie, tous ont aussi subi un dommage collatéral, celui des manques. Manque du public, manque de rendez-vous, manque de rencontres, manque de créativité.
Le retour devant le public a fait du bien
Les “Monsieur Roger” de Guillaume Ledoux, une manière de penser à autre chose qu’au confinement. ©Fabrice Simoes
La première sortie de confinement aura cependant eu le mérite de remettre le facteur sur son vélo. Au printemps, les deux frères avaient commis quelques mini-concerts à la maison, sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, Guillaume avait, lui, repris le cours des aventures de Monsieur Roger, un gros bonhomme remis en situation professionnelle et peint sur de vieilles factures trouvées dans les brocantes. Alors que Johan avait fait quelques apparitions dans l’émission de télévision Affaire conclue, au côté de Sophie Davant. Des activités qui n’étaient que pis-aller. De la biffe quoi… La période n’était vraiment pas favorable à la création.
C’est pourquoi la mini-reprise estivale a fait du bien dans toutes les têtes. « Nous avons pu faire deux autres concerts, pendant la période d’été. Un en Haute Savoie et un à Rennes. C’était devant une assistance réduite et masquée, ce qui était très bizarre ! À Rennes, pour un chapiteau de 600 places, l’organisateur avait eu le droit de vendre 184 billets. Mais c’était très chouette d’être sur scène. Et les gens étaient contents. C’était franchement hyper agréable. Ça nous a fait du bien et après on nous a reconfinés ! », rapporte-t-il.
Le Berrichon explique aussi que, entre les deux moments de confinement, l’état d’esprit a changé. « Si le premier confinement était comme du temps suspendu, le deuxième nous a rendu plus prolifique. On s’est remis à créer. Nous avons sorti la tête hors de l’eau. » Par exemple, alors que le clip C’est quoi ton nom était en ligne depuis le lancement de l’album et a été vu plus de 200 000 fois, les deux frangins se sont littéralement mouillés dans les eaux du Cher, pour tourner un second L’Arrière-saison, réalisé par un autre Berruyer, Raynal Pellicer. Mis depuis peu en ligne, sans véritable publicité, il a déjà atteint les 10 000 vues.
La fratrie s’est remise au travail d’écriture. « On était un peu en colère et déçus parce que C’est quoi ton Nom était un de nos albums préférés. On avait mis tout notre cœur dedans. Là, c’était un peu foiré. Cela nous a donné de l’énergie pour continuer l’aventure, pour composer et écrire. Nous nous sommes vus au studio et nous avons commencé à composer, bien avant Noël. On a plusieurs morceaux en boîte, déjà enregistrés. Nous avons sauvé quelques dates pour cette année ; 12 concerts sur les 35 prévus ont été reportés à partir de l’automne 2021 », affirme le co-leader du groupe.
Une bouffée d’air frais validée qui viendrait s’ajouter à un autre espoir : « Sortir un nouvel album au début 2022 ! »
Fabrice Simoes