«L’arbre de fer» ou «Le Voyage forcé d’Alice»…par Jérôme Blot

Saga familiale entre deux rives

Tout jeune il aurait aimé devenir inspecteur de police. Il est devenu directeur juridique dans une société de logistique en Lorraine. Dans son village de 500 habitants, Garrebourg, il occupe le poste de premier adjoint, fonction qui fut celle de ses deux grands-pères, maternel (en Algérie) et paternel à Blois (sa ville de naissance). Marié à une charmante Lituanienne et père d’une souriante fille de 10 ans, il s’est posé la question de lui transmettre des souvenirs de famille qu’elle retrouvera plus tard, et ce, dès qu’elle est née.

Et, en 6 ans, Jérôme Blot, 46 ans, s’est mué en enquêteur, reparti bien loin, dans le temps, et dans l’espace, loin de la vallée de la Loire. Il a mis des centaines d’heures à rassembler, recouper, remettre dans l’ordre tout ce que la famille de sa mère, et surtout cette dernière Marie-Alice, lui a expliqué sur cette tranche d’histoire commencée dans la douleur, le 1er novembre 1954, en Algérie, avec la mort (déjà) d’un instituteur, la deuxième victime d’une guerre qui allait durer près de 8 ans et qui s’est achevée par le plus grand exode humain du XXème siècle, avec près d’un million de pieds-noirs déplacés en moins de 6 mois, «entre deux rives», via la Méditerranée! Et au milieu de tout ce long temps, le 13 mai 1958, porteur d’espoirs bien vite déçus…est passé.

Boulin face à Sudreau

Premier secrétaire d’État aux rapatriés, Robert Boulin a identifié, le 30 mai 1962, dès les premiers départs d’Algérie vers La France, ces Français d’Algérie à de simples vacanciers qui repartiront, ensuite, en Algérie, et non à de véritables rapatriés.

Son collègue, Pierre Sudreau, futur maire de Blois, lui répond, du tac au tac, «Sont-ce des vacanciers, comme M. le secrétaire d’État nous le laisse entendre, ou des réfugiés, ou des rapatriés?».

O.R.

Entre oncles, tantes, cousins, pièces rapportées, dont un Solognot…, les repas de famille étaient agités et colorés chez les Gayral (partis de l’Aveyron)-NICOLAS (venus d’Espagne), avant et après le grand départ. Une bonne quinzaine de témoignages passionnés plus tard, surtout dans le cadre de Mercier-Lacombe, en Oranie (12.000 habitants, plus de 30.000 aujourd’hui), Jérôme a tissé, en enregistrements, le fil de la saga, sur une trentaine d’années, avec un nouvel havre autour de Blois, pas loin du tonton Paul T., de Mur-de-Sologne…Imaginez ce militaire d’une vingtaine d’années sous les drapeaux expliquer, à la famille qui l’avait accueilli au cours de courtes permissions, la Sologne, les étangs reliés les uns aux autres, les chasses, la cueillette des champignons, le Loir-et-Cher, tandis qu’il découvrait la plaine oranaise…Et lui expliquant l’Algérie à ses parents, en permission, et son amour naissant pour une fille de là-bas…

Une saga sur 30 ans…

En plus de 170 pages, avec de nombreuses photos et illustrations d’avant et d’après, on passe du rire aux larmes à la lecture de «L’arbre de fer» ou «El Betoun», un térébinthe, pistachier de l’Atlas, planté en plein milieu du village, qui relate «Le voyage forcé d’Alice» brusquement arrachée, à 11 ans, à sa vie idyllique pour regagner un pays où elle n’était venue qu’une fois en colonie de vacances.

Là, cette fois, ce seront des grandes vacances définitives sans trop de soleil et les premières heures sont plus que cauchemardesques. Des jours et des nuits d’attente dans un aéroport d’Oran surchargé, sous un soleil de plomb, en ne mangeant et/ou ne buvant que le strict minimum vital, dormant à terre, sans couverture…Pour se retrouver, via un avion Belge chargé des évacuations, à Genève, puis en France, où une grange accueille une partie de la famille qui avait cru trouver asile dans un château, dont l’adresse leur avait été donnée par un officier à Mercier-Lacombe…On dort à terre après avoir nettoyé un peu l’ensemble et en allant chercher l’eau dans la cour…Chaque sommeil ramène Marie-Alice à Mercier-Lacombe et elle revit ses jeunes années qu’elle narre.

Plusieurs «résidences», au confort plus que sommaire, plus tard, par la Bourgogne, le Puy-de-Dôme, Toulouse, sans meubles, ni beaucoup d’effets vestimentaires chauds, (et l’hiver 62 fut plus que rude!) la famille se retrouve, presque réunie, en Blaisois.

Jérôme reconnaît que ce livre de «secrets de famille» honorables et sans filtres, sans pudeurs cachées, sans haines, sans regrets relate des tranches de vie exceptionnelle. «Ce n’est pas mon histoire. C’est la leur. Brute. Dure et réelle. Tous s’y sont retrouvés et reconnus. Il y a moins de vides dans leur saga».

L’acteur Jean Benguigui, Oranais de naissance, de cœur et de convictions, a signé une préface dédiée «à Marie-Alice et à son pays des merveilles»…, tandis que, restant en famille, Jérôme a confié à son cousin, Patrick Gayral, l’illustration, fort réussie en couleurs plus que chaudes et chatoyantes, de la couverture, avec «L’arbre de fer» et les accroches de chaque chapitre, le tout accompagné d’un arbre généalogique qui n’est pas de fer, mais de chair et de sang, et de recettes comme là-bas…Quand il faisait si beau tous les jours que, même avec ce que l’on appelait pudiquement les événements, personne ne pensait qu’un jour la niche tomberait sur le chacal apprivoisé… 

«On a alors pris conscience de la soudaineté de la fin d’une vie de bonheur et d’un départ, sans espoir de retour, avec un très gros choc traumatisant en arrivant en France. L’insouciance de cette vie outre-Méditerranée ne reviendra jamais. Plus Jamais».

Édité à compte d’auteur, en attendant, peut-être, une adaptation au cinéma ou à la télévision, le livre est disponible en librairie sur commande ou auprès de l’auteur. Un ouvrage à lire pendant le confinement et le couvre-feu qui vont durer. Comme là-bas, entre 1954 et 1962!

Richard ODE

Prix : 23 euros (contact auprès de j.blot@sfr.fr).

Disponible à la vente chez tous les distributeurs. Demandes mail à compta@editions-sl.fr

Contacts éventuels : j.blot@sfr.fr

 

Commentaires

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  1. C’est franchement insupportable de répéter des citations complètement fausses! Boulin n’a jamais tenu ces propos, traitant les rapatriés de vacanciers. Vérifiez vos informations avant de les publier!
    Oui ils sont assez nombreux à avoir voulu salir la mémoire de Robert Boulin, notamment Alain Peyrefitte, merci de ne pas en rajouter! Fabienne Boulin

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