Compte de campagne de Serge Grouard : une décision totalement « incompréhensible »

La commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques vient de rendre publique sa décision relative au compte de campagne de Serge Grouard, maire LR d’Orléans. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle laisse circonspect, y compris chez les juristes consultés par Magcentre.

En motivant sa décision relative au compte de campagne des dernières municipales de Serge Grouard, maire LR d’Orléans, la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a pour le moins semé le trouble.

Alors qu’elle reconnaît clairement que l’acquisition des masques distribués avec force publicité durant la campagne des municipales pose problème, elle aboutit à l’approbation desdits comptes de campagne avec, à la clé, une simple pénalité pécuniaire.

 

“Intrinsèquement irrégulier”

« Si rien ne s’oppose à ce qu’un candidat aux élections distribue ou fasse distribuer des masques aux électeurs et à leurs familles, encore faut-il, dès lors qu’il s’agit de son initiative personnelle, que les frais correspondants soient retracés dans son compte de campagne et que leur financement soit assuré par les seules ressources énumérées à l’article L.52-8 du code électoral », indique ainsi la commission. « En l’espèce, tel n’est pas le cas », tranche-t-elle. Le concours en nature de l’association des Maires de Loiret (80.000 masques pour une somme de 41.000 euros initialement payés par des entreprises locales) « aurait dû figurer au compte, mais en tout état de cause émanant d’une personne morale, il est intrinsèquement irrégulier au regard des dispositions susmentionnées du code électoral. »

“Sans préjuger du juge d’élection”

Pour justifier de sa clémence, concernant un compte de campagne de 62.079 euros, la CNCCFP évoque la crise sanitaire sans précédent. « Sans préjuger des décisions du juge de l’élection, il y a donc lieu de tenir compte de ces éléments pour l’examen du dossier », explique-t-elle. Serge Grouard ne subit donc qu’une amputation du remboursement de ses frais de campagne à hauteur de 25.000 euros.
« La décision est vraiment curieuse et exceptionnelle », s’étonne Pierre Januel, journaliste juridique. « La CNCCFP reconnaît qu’il y a une irrégularité importante, mais au lieu d’invalider le compte, la commission considère que « eu égard à la crise sanitaire et à l’objet de l’opération », il n’y a pas lieu d’invalider le compte ». Le juriste qualifie cette décision de « vraiment atypique », indiquant qu’il n’est pas certain que la justice administrative la valide.

Même étonnement du côté de Tahar Ben Chaabane, ancien candidat centriste aux municipales, auteur de nombreux signalements, tant devant la justice que la commission nationale. « C’est une décision incompréhensible et injustifiable au regard des dispositions du code électoral qui interdit tout financement de campagne par des entreprises », affirme-t-il. Il note cependant que, sur le fond, la commission lui donne raison : « La décision de la CNCCFP valide mon signalement et dit explicitement que Serge Grouard a été élu en commettant des irrégularités ». Contactés par Magcentre, d’autres juristes font part de leur totale incompréhension.

Quelle que soit la lecture que l’on puisse faire de cette décision, il semble effectivement difficile d’y retrouver ses petits. La commission validerait-elle la curieuse conception de la justice de Florent Montillot,? En tout état de cause, cette décision illisible ne fera que renforcer la défiance d’un électorat de plus en plus enclin à déserter les urnes.

Il est d’ailleurs à parier que Serge Grouard lui-même, malgré la finesse de ses analyses, n’ait absolument rien compris au document qui vient de sauver provisoirement son élection.

Mourad Guichard

 

Commentaires

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  1. Souhaitons que la justice soit rendue et que l’indigeste distribution de masques à des fins purement électoralistes entraîne des sanctions exemplaires pour lui et sa liste.

  2. La décision de la CCNCFP est un appel du pied assez clair pour que ce soit au T.A. de porter l’estocade.

    La commission n’a pas voulu prendre seule la mesure qui s’impose et se “contente” de pénaliser déjà le candidat au portefeuille. C’est une première étape. Chacun son rôle : l’Administratif n’aura plus besoin d’aller sur ce terrain.

    En revanche, au titre de la rupture d’égalité entre les différents candidats durant la campagne, la justice administrative ne pourra qu’annuler l’élection. En première instance ou devant le Conseil d’Etat si besoin.

    Encore faut-il que le juge de l’élection, saisi je crois pour d’autres motifs, s’empare de cette grosse irrégularité pour élargir son examen. Ce serait assez énorme qu’il ne le fasse pas mais tout est possible.

    Dans tous les cas, ne vous en faites pas pour l’intéressé qui considérera toujours remporter des “victoires morales” quoi qu’il arrive…

  3. Cette situation est une nouvelle illustration du maintenant célèbre “en même temps” macronien.
    L’interdiction des manifestations culturelles est jugée illégale et (en même temps) maintenue, il n’y aura pas de vaccination obligatoire et (en même temps) un projet de loi (sorti par la porte et qui va rentrer par la fenêtre) va créer une discrimination , des mesures sanitaires limitent notre liberté et (en même temps) ça continue de fermer des hôpitaux .
    La liste est longue , très longue et s’allonge chaque jour un peu plus mais nous étions prévenu dès la campagne présidentielle Macron sera(it) en même temps jésuite et jésuite.

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