Pierre Allorant, nouveau président du Cercle Jean Zay

A la suite de l’assemblée générale de l’association, Pierre Allorant, par ailleurs membre du comité éditorial de Magcentre, a été élu président du Cercle Jean Zay, association orléanaise qui consacre son activité à la mémoire du député du Loiret et Ministre de l’Education nationale du Front Populaire, Jean Zay. Après l’hommage national que fut l’entrée de Jean Zay au Panthéon en 2015, la reconstitution organisée par le Cercle Jean Zay en 2019 du Festival de Cannes de 1939 , par son large succès public, constitua en quelque sorte l’hommage et la reconnaissance des Orléanais à l’action en faveur de la culture du jeune ministre d’alors.

Nous avons donc rencontré Pierre Allorant qui nous expose ici les projets à venir du Cercle Jean Zay,

Interview

Pierre Allorant

MC Vous exercez déjà des responsabilités en tant que doyen de la faculté de droit d’Orléans et vice-président du CESER, pourquoi avoir accepté cette nouvelle responsabilité ?

PA: D’abord parce que le Cercle Jean Zay, c’est une équipe sur laquelle je sais que je peux compter pour développer de nouveaux projets. Avec le vice président Jean Christophe Haglund , Hélène Mouchard-Zay, Myriam Guérid et les autres membres du bureau, cette équipe a montré ses capacités notamment avec la réalisation de Cannes 39 et le succès manifeste de cette initiative, même s’il reste un déficit financier qu’il faudra combler. C’est aussi un clin d’œil de l’histoire puisque je succède à Pierre Louis Emery auquel j’avais déjà succédé pour mon premier poste d’enseignant en histoire. Et puis Jean Zay c’est un souvenir familial particulier avec cette photo de mon grand-père alors préfet du Loiret recevant Jean Zay pour les Fêtes de Jeanne d’Arc en 1933 ou le récit de ma grand-mère me racontant la manifestation devant la préfecture après l’élection de Jean Zay comme député en 1932.

MC Jean Zay a été député du Loiret sous l’étiquette du parti Radical et ministre du Front Populaire, quelle est l’actualité de sa pensée politique aujourd’hui ?

PA D’abord durant une longue période Jean Zay a été oublié, voire ignoré, ici à Orléans, nous avions le Lycée Jean Zay, seule mémoire du ministre dont personne ne parlait. Il est vrai aussi que le Radicalisme est devenu un concept politique flou, des notions comme l’idée de progrès a perdu de sa signification avec un concept qui recouvre des réalités bien différentes pour Trump, Macron ou l’extrême gauche. Et pourtant, l’exigence de Jean Zay de liberté et d’égalité, on la rencontre “à tous les coins de rue”, que ce soit dans l’éducation avec l’exigence de laïcité si actuelle, mais aussi l’importance du CNRS dans la recherche, la question des élites avec son projet de formation devenu l’ENA après la guerre , et bien sur, sur le plan culturel avec la création du Festival de Cannes et de sa politique de soutien au cinéma toujours appliquée par la France.

MC Comment comptez-vous au Cercle Jean Zay continuer ce travail de reconnaissance de l’œuvre de Jean Zay ?

PA Justement pour éclairer le caractère actuel de la pensée de Jean Zay, nous souhaitons éditer un “dictionnaire contemporain de Jean Zay”, codirigé par Olivier Loubes historien grand spécialiste de Jean Zay et moi-même, avec un grand nombre de contributeurs. Les dictionnaires sont à la mode et dans celui-ci nous voudrions qu’en plus des entrées classiques comme le radicalisme, le cnrs etc…nous voudrions inclure un aspect anthologique avec des citations sur lesquelles nous ferions réagir des personnalités contemporaines. Le travail comprendra aussi un important volet iconographique avec des photos des affiches et des caricatures, avec un objectif de publication en 2024.

On a aussi récemment redécouvert Jean Zay l’écrivain, à la plume remarquable, comme le soulignait déjà Antoine Prost dans sa préface de “Souvenirs et Solitude”, mais aussi par sa correspondance, que ce soit durant la “drôle” de guerre comme dans ses lettres de prison. Il y a aussi les relations de Jean Zay, comme cette amitié forte avec Maurice Genevoix que j’ai redécouverte à l’occasion de l’entrée au Panthéon de l’écrivain avec lequel Jean Zay, alors ministre, travailla à l’élaboration de la protection du droit d’auteur, il y a aussi ses nombreuses relations avec les milieux intellectuels orléanais […]

MC Et après le succès de Cannes 39 quels sont les projets en matière de cinéma du Cercle Jean Zay ?

PA Il nous faut d’abord résorber le déficit financier de cette opération, il est important pour une petite association comme la notre mais reste absorbable par la collectivité au regard du retentissement de cette manifestation. Mais il y a à Orléans une envie collective de continuer, d’où le projet qui n’a pas pu se réaliser cette année, du festival “Récidive”, c’est à dire de prolonger cet esprit de résistance avec les films de 1940, idée reprise par l’historien du cinéma Antoine de Baecque et Michel Ferry, le directeur des Carmes. Nous allons donc décaler Récidive sur 2021, en espérant que les conditions le permettent,

Et puis nous avons le projet avec le réseau Canopé de l’Education nationale de mettre en place un partenariat qui permette de réaliser une mallette pédagogique avec les films de “Récidive”, les plus remarquables de l’année 1940, pour une utilisation par les enseignants.

MC Et en matière de recherches historiques autour de Jean Zay ?

PA On a l’idée d’éditer des “cahiers Jean Zay”, comme l’on en a, par exemple, pour Mendès France, François Mauriac ou Charles Péguy, Ce serait une publication annuelle autour des thèmes de Jean Zay que l’on connaît bien: l’éducation, la laïcité, et autour de la transmission des idées et valeurs de Jean Zay: le radicalisme, l’esprit de résistance. Cela viendrait encourager des jeunes chercheurs sur ces sujets et soutenir au travers d’un prix de thèse la publication de travaux remarquables. 

Bien sûr, l’un des vecteurs de diffusion de ces travaux pourrait être les “Rendez-vous de l’Histoire” de Blois puisque nous avons la chance d’avoir cette manifestation en région, que ce soit autour du cinéma, ou de l’aspect pédagogie développé à Blois avec les ateliers pédagogiques. On pourrait proposer ainsi un atelier sur “Qu’est ce que le métier d’enseignant aujourd’hui ?” autour de la laïcité après l’affaire Samuel Paty.

Et dès que nous le pourrons, le cercle reprendra sa tradition de “banquet” occasion de rencontres conviviales avec des personnalités éclairantes de la mémoire de Jean Zay.

Propos recueillis par Gérard Poitou

http://cerclejeanzayorleans.org/

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