Un élu peut-il communier à la cathédrale lors des fêtes johanniques équipé de son écharpe tricolore ? Est-ce une atteinte grave au principe de laïcité comme le pensent plusieurs élu(e)s notamment de gauche et d’En Marche ? Cette question a entaché le débat sur un charte de la laïcité qui a été adoptée par la seule droite alors qu’une ambitieuse « charte de la déontologie » a fait la quasi-unanimité.
En écho à « l’affaire des notes de frais » de Olivier Carré Serge Grouard et la gauche avaient promis durant leurs campagnes municipales d’adopter après l’élection un code d’éthique applicable à tous les élus. Sur demande de Baptiste Chapuis un groupe d’élus de toutes les sensibilités (Charles-Éric Lemaignen, Ludovic Bourreau, Gérard Gautier, Baptiste Chapuis) a donc travaillé à une « charte de déontologie des élus et élus d’Orléans ». Objectif pour le responsable des socialistes : « retrouver la confiance des citoyens dans leurs élus ».
Pour Charles-Éric Lemaignen qui considère ce document comme « le plus complet adopté en France » il faut montrer « que les élus ne sont pas tous pourris ! ». Il est vrai que ce code élaboré entièrement en interne couvre tous les champs possibles : absentéisme des élus, réception de cadeaux, conflits d’intérêt, recrutements familiaux, frais de déplacement, transparence de l’action municipale, train de vie de la mairie, prévention du harcèlement et lutte contre les discriminations, etc. Une commission de déontologie possiblement saisie par un seul élu sera amenée à examiner les cas litigieux et à réaliser des alertes. Bref rien que du bon et cela d’autant plus que cette charte sera évolutive et pourra encore être améliorée au fil de la pratique.
La laïcité oui…mais
Les chartes de déontologie et laïcité adoptées le 10 décembre
La belle unanimité exprimée lors du vote a explosé en vol lors de l’examen d’une bienvenue « charte sur la laïcité » qui reprend les grands principes de la loi de 1905 et qui réaffirme quelques engagements forts : refus de subventions à des associations qui ne respectent pas « les valeurs et principes de la République » ou la conditionnalité de l’utilisation des équipements municipaux au « respect de la laïcité et de l’égalité homme/femme ».
Mais tout a chaviré lors de l’examen de la laïcité appliquée aux élus qui doivent « adopter une attitude personnelle neutre et laïque dans l’exercice de leur mandat » L’article 7 rappelle que « dès lors qu’ils portent les effets distinctifs de leur fonction les élus s’astreindront au strict respect de la neutralité républicaine lors des cérémonies religieuses ».
Pour une hostie…
Mais la suite de cet article 7 a enflammé les esprits. Il est écrit que « le caractère national, historique et exceptionnel des fêtes johanniques constitue la seule exception à cette règle » … En clair la laïcité peut être mise entre parenthèses le 8 mai au matin lors de la messe solennelle des fêtes de Jeanne d’Arc à la cathédrale où un élu peut aller ostensiblement afficher sa foi et surtout communier revêtu de son écharpe tricolore. Bien que son nom n’ait pas été cité de nombreux élus pensaient à un adjoint réputé pour flatter l’électorat de la bourgeoise catholique orléanaise. Pour Baptiste Chapuis qui demandait, tout comme Stéphanie Rist (LREM) ou Olivier Geffroy (ex-LR), la suppression de ces quelques lignes litigieuses cette exception à la laïcité « ouvre des portes dangereuses » alors qu’il suffirait qu’un élu retire son écharpe pour aller recevoir son hostie”.
Pourquoi ne pas enlever son écharpe en communiant?
De même Olivier Geffroy pense que cette mesure va à l’opposé du nécessaire « réarmement républicain » alors que Stéphanie Rist « choquée » plaide pour une « laïcité pleine et entière ». Pour Serge Grouard et Florent Montillot cette « exception » s’explique par la « tradition » et par « des fêtes de Jeanne d’Arc qui sont nationales et où mêlent le civil, le religieux et le militaire ». Ce que résume bien l’écologiste Jean-Philippe Grand : « désormais à Orléans la tradition est supérieure à la laïcité » dont la charte a, bien sûr, été adoptée par la majorité.
Budget : dette ou pas dette ?
Les élus ont également adopté (sans la gauche) le budget 2021 de la ville qui selon Serge Grouard est « un budget de lutte contre la crise » avec 41 millions d’investissements (10 de moins que l’an passé) mais aussi des rallonges de 200 000 euros pour le CCAS ou 250 000 pour les acteurs de la culture. La gauche a notamment plaidé pour davantage d’investissements (au risque d’accroitre la datte a rétorqué Michel Martin) pour activer la relance « et investir dans les projets du futur pour la rendre attractive ». Dominique Tripet souhaite aussi davantage de moyens pour prévenir « le tsunami de précarité qui arrive ».
Alors que Baptiste Chapuis demande que l’on « renouvelle l’action sociale » (allocation énergie, bons alimentaires pour les marchés de la ville, épicerie sociale sur le campus, etc.) Florent Montillot piqué au vif a martelé plusieurs reprises, en écho à feu VGE « vous n’avez pas le monopole du social, bien au contraire… ». Serge Grouard en a profité pour réaffirmer ses choix : abandon de la cité musicale (« j’assume »), report du festival de jazz, abandon du projet « non abouti » des Vinaigreries, réhabilitation ultérieure des Halles Chatelet. « Mais vous savez a-t-il conclu, maintenir les grands équilibres budgétaires en temps de crise c’est une performance de sportif de haut niveau… ».
Jean-Jacques Talpin