Souffrant et fatigué, le célèbre astrophysicien de 88 ans n’a pu venir comme prévu à l’Arboretum national des Barres de Nogent-sur-Vernisson (Loiret) où il aurait dû animer la conférence « Écologie et Biodiversité » ce dimanche 4 octobre lors du week-end de la Fête des Plantes. Pour autant, sa passion des arbres a été mise en scène par l’ensemble Calliopée autour d’une lecture musicale touchante et intime et d’un texte visionnaire, presque prophétique, de Giono.
L’Ensemble Calliopée a proposé un après-midi entre littérature, musique et écologie. ©EB
La promotion de son nouveau livre La Fureur de vivre (ed. Seuil) dans les médias depuis cet été est sans doute à l’origine de ce coup de fatigue qui a privé une partie des visiteurs, venus nombreux ce dimanche 4 octobre à l’Arboretum national des Barres de Nogent-sur-Vernisson (Loiret), d’une rencontre privilégiée avec le célèbre astrophysicien et président d’honneur de l’association Humanité et Biodiversité. Une annonce de dernière minute qui a obligé l’Arboretum à repenser illico l’organisation de son après-midi en changeant de lieu pour permettre la projection d’un montage vidéo d’Hubert Reeves à l’Espace des Étangs dans le centre de Nogent.
C’est donc sur scène (et au sec !) qu’un bout de forêt a été reconstitué à la hâte… Un décor forestier qui plantait le décor d’une première lecture musicale, coproduite par Le TIR et la Lyre et l’Ensemble Calliopée, L’Homme qui plantait des Arbres de Jean Giono, suivie d’une autre, Arbres Aimés, produite par l’Ensemble Calliopée seul d’après l’ouvrage d’Hubert Reeves (Ed. Seuil). Lectures entrecoupées d’intermèdes musicaux.
Hubert Reeves, miroir de Giono
Hubert Reeves, souffrant, ce sont des extraits vidéos qui ont été projetés au public. ©EB
C’est d’abord l’œuvre de Giono qui nous conduit à la cause écologique… Plus qu’un manifeste, une vision presque prophétique. À 1200 m d’altitude, au cœur de la Provence « où le vent souffle avec brutalité », où règne la sécheresse et ne poussent que des lavandes sauvages autour de « squelettes de villages abandonnés », un berger va planter 10 000 chênes « là où il ne poussait rien », « où le pays mourait par manque d’arbres ». Une parabole de la générosité, de la patience et de l’action positive d’un seul homme agissant sur son milieu : la forêt, dans un cercle vertueux, allait redonner vie aux villages, faire revenir l’eau, transporter des odeurs, apporter une économie, de la jeunesse, de l’espoir, et bien-être. 67 ans plus tard, le colibri qui fait sa part, la reforestation et autres campagnes de plantations d’arbres n’ont jamais été autant au cœur des enjeux environnementaux de notre société.
Les arbres aimés d’Hubert Reeves
Hubert Reeves chez lui, à Malicorne, au milieu de ses arbres aimés. © Karine Lethiec
Bien plus au nord, en Bourgogne, un autre homme a décidé un jour de planter des arbres. Depuis 40 ans, Hubert Reeves s’y emploie dans sa propriété de Malicorne. Tout démarre par sept cèdres du Liban. Le déclic ? Des timbres qu’il admirait dans un album et « l’envie de voir lui survivre des arbres millénaires ». Sa première rencontre, c’était au Jardin des Pantes de Paris, un cèdre de 1734 planté par Cuvier, raconte t-il en bande son. Puis à Beyrouth, les cèdres de Masser el Chouf « aux troncs impérieux de plus de 3000 ans… ».
D’autres après sont venus embellir son parc : un marronnier aujourd’hui de 12 mètres de haut au port en demi-sphère végétales « dont nous avons coupé aucune branche ». Des séquoias géants de Californie « des plantules repiquées sans savoir ce qui leur serait favorable. Je fantasme qu’ils soient toujours debout quand j’aurais disparu depuis longtemps ». Mais aussi des ginkgos, chênes, ifs, tilleuls… « Je me réjouis d’avoir embelli le monde. Planter un arbre et vivre à côté est la meilleure façon de faire sa connaissance. » Un voyage dans une intimité qu’Hubert Reeves nous livre ici en partage, avec toujours ce rappel de la nécessité d’être à l’écoute de la nature, de veiller à ce que la Terre reste habitable à l’heure où nous vivons la 6e extinction massive des espèces…
Estelle Boutheloup
Photo de Une ©Karine Lethiec/Calliopée