L’ancien maire de Nogent-le-Rotrou, François Huwart, 73 ans part une nouvelle fois à la conquête du sénat. Pour cette deuxième tentative, l’ancien secrétaire d’État au Commerce extérieur de Lionel Jospin (MR) mène une liste de rassemblement de la gauche et du centre.
François Huwart se présente aux sénatoriales le 27 septembre 2020, en Eure-et-Loir. DR
Après une tentative infructueuse en 2014, vous êtes de nouveau en lice pour les sénatoriales avec votre liste « Ensemble pour l’Eure-et-Loir ». Pourquoi ?
François Huwart : Je crois que mon expérience peut être utile à tous. J’ai occupé beaucoup de mandats, de fonctions. J’ai une expérience très diversifiée. Et étant désormais sans autre mandat, notamment de mandat exécutif, qui sont des mandats extrêmement chronophages, je pourrais me consacrer pleinement à cette fonction si les électeurs le veulent.
A quelques jours du scrutin, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
F.H. : Je fais mon travail. Je ne me perds pas dans le calcul des pronostics. Je sais ce que j’ai à faire dans un temps très contraint comme avoir le plus de dialogues possibles avec mes interlocuteurs qui sont notamment des maires. Je pense qu’un sénateur doit être présent au sénat mais il doit aussi être présent sur les territoires qui l’ont élu. C’est indispensable.
Comment vivez-vous cette nouvelle campagne ?
F.H. : Elle est différente parce qu’elle est plus courte. Tout a été décalé avec des élections municipales retardées, l’installation de toutes les instances locales, communales, intercommunales… Différente aussi, avec cette pandémie qui est dans tous les esprits et qui impacte évidement tous ce que nous pouvons les uns et les autres penser. Il y a incontestablement une inquiétude sur l’avenir et un besoin de se rassembler pour faire face à cette pandémie et les transformations qu’elle ne manquera pas d’entraîner. Tout ceci fait que nous voyons maintenant les problèmes et l’avenir sous un angle un peu différent, sous un éclairage différent de ce qu’il a pu être il y a 6 ans. Il y a bien une prise de conscience aujourd’hui que nous devons surmonter cette épreuve et que nous devons avoir une approche différente, notamment en matière d’investissements pour tenir compte de ce genre de circonstance.
Huit listes se présentent dans le département. Est-ce trop ou pour vous cette diversité est-elle une richesse ?
F.H. : Bien sûr que la diversité est une richesse. Cela va de soi. Il faut qu’il y ait une pluralité de sensibilités politiques qui soit représentée. Il n’est pas anormal que sur trois sénateurs en Eure-et-Loir, ils ne soient pas tous de la même famille. De la même façon,il est malsain que, dans une même famille politique qui détient déjà toutes les manettes, des conflits se fassent jour qui sont juste des conflits entre grosses agglomérations, avec en arrière-plan la suprématie au conseil départemental d’Eure-et-Loir qui n’est pas le sujet des sénatoriales. Il me paraît important que l’élection sénatoriale ne soit pas manipulée par un affrontement au sein d’une famille politique pour le contrôle du conseil départemental. Je comprends bien tout cela mais c’est une sorte de dénaturation de l’élection sénatoriale elle-même que cette concurrence-là. Elle est préjudiciable à tout le monde. Elle fausse le débat, elle fausse la démarche sénatoriale et le rôle que vous êtes celui du sénateur.
Pour vous, le débat des sénatoriales serait donc pollué par l’enjeu des départementales à venir ?
F.H. : C’est une évidence. On voit bien une lutte sourde là-dessus. Et c’est malheureusement autant de combats politiciens qui ne permettent pas de parler de ce qui devrait être la cohérence de l’Eure-et-Loir. Qu’il s’agisse des plans économiques, de la transition écologique, de la santé, du logement… Ce sont autant de débats qui sont biseautés par des intentions qui au fond n’ont rien avoir avec l’objet même de l’élection d’un sénateur qui est d’élire un parlementaire à part entière, discutant des lois au sénat même si il n’a pas le dernier mot, faisant partie d’une commission de contrôle de l’action du gouvernement et étant l’interlocuteur privilégié des grands électeurs .
« Ma priorité sera l’écoute, l’écoute des territoires. Et faire entendre la voix de l’Eure-et-Loir dans sa cohérence. »
Vous pointez des divisions à droite mais il en existe aussi à gauche…
F.H. : Mais celles-là sont dépassées. En tout cas, pour ce qui me concerne en Eure-et-Loir. Aussi, je vois plutôt des divisions dans la famille politique qui depuis quarante ans fournit les sénateurs pour l’Eure-et-Loir et de façon très hégémonique. Et quand on est une famille trop puissante, on finit par trouver ses ennemis à l’intérieur plutôt que dans un dialogue avec un autre qui pourrait avoir un avis différent.
Au regard de l’histoire politique de Nogent-le-Rotrou, incontestablement liée à votre famille, votre propos peut surprendre…
F.H. : Ce n’est pas l’élection au suffrage universel d’un maire dont on parle mais de plusieurs représentants d’un territoire grand comme l’Eure-et-Loir. Cela n’a rien à voir. Là, il s’agit d’envoyer au parlement, au sénat, qui est la deuxième chambre, des représentants des territoires. Aussi, Nogent-le-Rotrou dans cette affaire est une ville parmi d’autres.
Si vous êtes élu, quelle sera votre feuille de route, vos priorités ?
F.H. : Ma priorité sera l’écoute, l’écoute des territoires. Et faire entendre la voix de l’Eure-et-Loir dans sa cohérence. Mais aussi m’intéresser à tout ce qui touche à la santé et aux questions économiques. J’ai été secrétaire d’État au Commerce extérieur et je sais quelles conséquences peuvent avoir sur notre vie quotidienne, notre agriculture, nos industries, nos PME-PMI, les accords commerciaux et autres accords économiques internationaux. J’essaierai de tenir le bout de la ficelle et surtout de ne pas perdre de vue que je devrai régulièrement aller en rendre compte en rencontrant les maires de la façon dont j’exercerai mon mandat puisque j’en aurai le temps.
Avec votre expérience passée (maire, député secrétaire d’État…), comment concevez-vous votre rôle de sénateur ?
F.H. : On voit différemment les mandats quand on en a exercé d’autres. Quand on est membre du gouvernement, on apprend vite, et malheureusement trop systématiquement, à quel point souvent le pouvoir exécutif essaie de se jouer des pouvoirs législatifs. C’est une expérience intéressante que l’on découvre-là mais c’est souvent la réalité. De la même façon quand on a été député, on perçoit bien que le rôle de député n’est pas celui du sénateur. Il a un rôle beaucoup plus politique dans ce grand conseil des communes de France qui donne du temps à la discussion, qui permet plus d’échanges de vraies débats et qui permet probablement aussi de mieux se comprendre et de mieux se tolérer.
Propos recueillis par Z.C.