Après la très belle première journée de concerts“à la pelle”, ce samedi s’annonçait radieux. Du rock, du rythme, de l’échange et du plaisir. Et il y en a eu, jusqu’à l’orage qui a mouillé la fête. Mais qui n’a pas entamé la très grande réussite de ce Hop Pop Hop 2020 qui affichait complet et dont le premier mérite a été de casser la malédiction de la Covid tout en respectant pleinement les protections nécessaires.
C’est sous un beau soleil que Kitch est monté sur scène. Peut être même trop beau, tant il est étonnant de voir en pleine lumière un groupe de rock en général habitué à des scènes plus sombres. Mais la chaleur était aussi dans le public, tout le monde se réjouissant de se retrouver dans ce lieu magique pour une fête musicale bien orchestrée.
Les quatre Lyonnais de Kitch. Photo BC
Cette formation lyonnaise de deux guitares, dont parfois une basse, un synthé-clavier et une batterie a lancé devant un public de début de festival un rock de base, comme leurs camarades de Structure l’avaient fait la veille. Leur rage débordante passe la rampe, et là encore, la voix vient vous chercher, s’enroule autour de vos oreilles et vous emmène où elle veut. Formidables dans des moments énervés, mais sans s’interdire des moments plus calmes, plus doux, de recherches au bord de la pop. Un duo de voix très réussi et une immersion (masquée) dans le public traduisent leur aisance dans le style qu’ils ont choisi et qu’ils déroulent avec talent.
Les machines à rythmes prennent le pouvoir !
A l’Evéché, les nommés Tonn3rr3 ont commencé leurs rythmes implacables. Deux synthés entraient en concurrence avec un percussionniste, le tout dans un décor minimaliste tropical. On se laisse prendre au début. Les machines tapent fort, des bruits ou plutôt des bruitages viennent agrémenter la rythmique inflexible. C’est répétitif, mais les variations modulent l’ensemble. Qui toutefois est vite fatiguant. Cette frénésie rythmique appelle à la danse, et les corps se fatiguent moins vite que l’esprit…
Mad Mad Mad, les machines à rythme cl GP
Dans la salle de l’Institut bien remplie dans le respect de la distanciation, Lucie Antunies et ses deux complices mélangent vibraphone, percussions, batterie et machines. C’est fort, très fort. Les complainte planantes des machines forment un fond sonore qui semble, au fond, prendre en otage les instruments « réels ». Les ajouts rythmiques sont parfois la seule issue pour continuer le propos sans se perdre dans l’espace sidéral. Heureusement, quelques ruptures et in(ter)ventions créent des ambiances, faute de réelle mélodie pour le faire. Prenant, même si on ne sait pas trop ce qui prend !
Le folk revisité par le trio Matt Elliott à l’Institut cl GP
Majnun, ses Sofas et le funk humaniste
Et à 18h passées, puisqu’ils avaient pris un peu de retard, Majnun est monté sur la scène du Campo Santo. On le connaît plutôt bien à Orléans, il a participé plusieurs fois à des festivals de jazz dans ces mêmes lieux. Et aujourd’hui, avec ses Sofas sofas, sa musique tranchait. Beaucoup plus émouvante, avec des messages humanistes et des mélodies comme savent si bien les faire les orchestres africains ou des îles. Textes en français ou dans sa langue natale, ce natif du Sénégal à la belle voix modulée joue aussi magnifiquement de la guitare. Et quel plaisir d’entendre des riffs de cuivres, des intros de flûte, des solo de saxo ou de trompette ! Le souffle humain qui se transforme en musique… Un moment de grande qualité musicale et scénique, qui tranchait un peu sur le reste des deux jours de festival.
Majnun and the Black Magic Sofas sofas cl GP
A nouveau le noise des machines
Comme MadMadMad qui s’est produit à 20h à l’Evéché. Trois anglais avec chacun un instrument plus une machine. Plus marqués encore que la techno, les temps forts mènent la danse, et par dessus, les trois improvisent des variations aux allures de bruitages, de l’eau qui goutte ou des crissements, des ratés. A aucun moment une mélodie ne surgit. Aucune narration, juste un rythme parfois enjolivé. Mais le public se prend au jeu. Le dance-floor, non, le dance-lawn, est rempli. Cette musique est vraiment faite pour cela. Elle n’exploite qu’une seule composante des sons, celui du rythme. C’est lassant pour ceux qui restent sur le bord.
Nathan Roche du Villejuif Underground cl GP
Et à peine terminé ce set, des trombes d’eau ont inondé les lieux. Réfugiés sous les arcades du Campo Santo, la foule a regardé les gouttes traverser les spots lumineux. Les sandales pataugeant dans les flaques n’étaient plus de mise. Masqué et trempé, le public pourtant bon enfant a commencé à jeter l’éponge dans l’eau des caniveaux et à regagner ses pénates.
Les concerts ont pourtant eu lieu jusqu’au bout de la soirée !
Mais la fête a été belle. Un grand voyage dans le post, le néo, l’hybride, le kraut, la transe trans et l’électro-disco-punk ou le cosmic-prog. Dominé quand même par les rythmes implacables qui pulsent, qui pénètrent et qui font bouger le public jeune de l’Astro.
Merci à elle.
Bernard Cassat
Et la pluie arriva cl GP