Il faut un peu d’imagination et d’information pour deviner qu’un atelier de guitares électriques se cache derrière les murs du 86 bis rue Saint Marc à Orléans. Le lieu est discret, presque anonyme mais révèle un univers à découvrir.
L’atelier de Ligérie-guitare, à Orléans, conçu et réalisé par les deux associés, Clément Guéton (photo) et Silvère Boulay. ©AC Chapuis
Clément Guéton, 37 ans, y travaille depuis 4 ans avec un statut d’auto entrepreneur. Associé à Silvère Boulay, ces deux jeunes, de formation initiale en design, ont créé une marque et un atelier de fabrication de guitares françaises où tout est contraste. En effet, le calme du lieu, la prairie fleurie qu’il faut traverser pour arriver à l’atelier, la bonne odeur du bois qui saisit dès l’entrée, ne riment pas avec les idées reçues sur les guitares électriques, leurs décibels et salles endiablées !
Un parcours de luthier autodidacte
Au départ, Clément Guéton est designer d’objets. Il a toujours aimé « bricoler », sur les traces de son père. Il commence à démonter sa vieille guitare, s’intéresse aux composantes qui peuvent changer le son autant que la façon de jouer et la passion pour la fabrication prend naissance progressivement sous les doigts du designer/musicien.
Un modèle Ligérie en cours de fabrication ©AC Chapuis
Un licenciement économique du poste de designer qu’il occupe à Salon de Provence fait le déclic. Avec les indemnités, il crée l’atelier de la rue saint Marc. Toute l’installation, de la conception à la réalisation encore en cours, est « faite maison » par Silvère Boulay, architecte et partenaire du projet. L’atelier bois est au fond du jardin, mais l’établi de montage est dans l’arrière cuisine, avant que l’espace spécifique soit terminé.
Une production française
Clément Guéton parle de ses guitares avec passion, presque avec amour. Il les présente en caressant le bois, en esquissant le geste du musicien et en les regardant tendrement. Il explique ses choix inédits sur des bois de nos régions. Contrairement aux pratiques habituelles et industrielles qui utilisent des bois exotiques, il choisit l’aulne, le frêne, le tilleul ou le cormier en provenance de France. Il peut choisir ses essences sur pied ou utiliser de vieilles planches « chaque bois apporte ses caractéristiques acoustiques ».
Ce choix de produits du terroir le plus local possible est d’emblée affiché dans le nom de sa ligne de guitares : Ligérie, en référence à la Loire, et les modèles portent les noms de cépages : Sauvignon, Gamay, Lenoir.
50 à 70 heures de travail pour une guitare
Un modèle standard Ligérie présenté par son concepteur/réalisateur Clément Guéton ©AC Chapuis
Clément Guéton a fait le choix de produire des modèles standard pour petits budgets (il a trois modèles de guitare et un modèle de basse) autant que des modèles personnalisés avec options à la demande des clients. Le même soin, la même finition est apportée dans tous les cas à son travail. C’est un créatif qui adore créer, chercher, renouveler. « On apprend aussi en démontant les guitares, on voit les astuces de fabrication et les erreurs à ne pas commettre ! » Une guitare demande entre 50 et 70 heures de travail, sans compter le temps de vernissage. Tout le travail du bois est fait à l’atelier, ainsi que les couleurs. Il sous traite pour les vernis, les micros, en privilégiant les fabrications françaises. Il réalise aussi l’entretien et les réparations.
Les projets
Au début, il y a quatre ans, la clientèle était locale et les clients venaient sur le bouche à oreille, principalement pour l’entretien et les réparations. Puis, après des festivals, des journées de démonstration, un parcours sur les réseaux sociaux, la marque Ligérie est repérée. Les accueils se font sur rendez-vous, le client choisit son modèle et peut opter pour tout type de personnalisation.
L’atelier provisoire de finition/montage de Ligérie-guitare ©AC Chapuis
Les projets de développement sont menés par les deux comparses, que ce soient les événements, les salons, les stands lors de concerts où ils présentent leurs instruments. L’atelier est en passe d’agrandissement, le nombre de guitares produites est en constant accroissement et l’objectif de passer à deux salariés dans l’entreprise se rapproche.
La marque commence à être bien repérée dans les milieux spécialisés. Certains groupes professionnels ont misé sur Ligérie, comme le groupe de rock français « Skip the use » « C’est notre meilleure vitrine », conclut Clément Guéton, avec une petite fierté bien naturelle : C’est la reconnaissance d’un savoir-faire et d’une « patte » made in pays de Loire !
Anne-Cécile Chapuis