Le drone au chevet de la forêt d’Orléans

Les épisodes de sécheresse et de chaleur successifs de ces dernières années affaiblissent la forêt à un point tel que certaines essences, comme le chêne et certains résineux, n’y survivent pas. Mais quel est l’ampleur des dégâts ? Pour évaluer la situation l’ONF Centre – Val de Loire s’est doté d’un drone pour quantifier le dépérissement et la mortalité qui gagnent les massifs de la forêt domaniale.

Les pins sylvestres paient un lourd tribut aux canicules et manque de précipitations de ces 18 derniers mois. ©EB

À l’ouest de Vitry-aux-Loges (Loiret), au cœur du massif forestier d’Ingrannes (12 000 ha), Valentin Tripet, l’un des quatre pilotes de la direction territoriale Centre Ouest Aquitaine de l’Office national des fôrets (ONF), prépare son vol. Durant 40 minutes, il va télépiloter un drone qui va survoler les 43 ha de l’étang de Morche. Jaillissant des fougères aigles et des touffes de graminées, l’engin atteint en quelques secondes d’ascension verticale 120 m d’altitude. Sa mission : photographier la zone programmée pour constater et chiffrer la mortalité des pins sylvestres de la zone. « Un dépérissement a été signalé par des agents forestiers qui repèrent et évaluent les arbres malades ou morts sur des parcelles depuis les 18 derniers mois, explique Christophe Poupat, directeur de l’Agence territoriale Val de Loire. Suite à un inventaire au sol, on sait qu’ici il y a 25 % de mortalité… » 

Christophe Poupat et Valentin Tripet étudient en direct les images transmises par le drône. ©EB

En cause ? Les épisodes inédits de sécheresse et de chaleur intenses successifs des dernières années et notamment ces deux derniers étés qui ont affaibli les chênes et les pins sylvestres, deuxième essence de la forêt domaniale avec les pins laricios et maritimes (45 % de la surface). « Une mortalité instantanée sur les pins contrairement aux chênes mais diffuse et que nous n’arrivons pas à quantifier aujourd’hui sur l’ensemble de la forêt. Dans un premier temps, le pin va larguer ses aiguilles pour se préserver de la sécheresse mais certains n’y arrivent pas et finissent par rougir », poursuit Christophe Poupat.

Enjeux économiques et écologiques

Parcourant cinq mètres par seconde (18 km/h environ), le drone couvre une superficie de 200 ha avec une résolution de trois centimètres par pixel : c’est dire l’efficacité par rapport à un agent forestier qui, sur la forêt domaniale d’Orléans de 40 000 ha, va gérer à lui seul 1800 ha ! « Le drone est précis et réactif. Sur cette zone, on voit le niveau d’eau de l’étang à quelques centimètres près », détaille Valentin Tripet tout à ses manipulations. Au terme des 40 minutes de vol, quelque 600 photos auront été prises par le drone. « Un arbre couleur rouille est un arbre mort. Sur l’écran il apparaît en blanc. La réserve en eau du sol dépend de la hauteur d’eau de l’étang. Quand la nappe s’abaisse les arbres dépérissent ».

Une silhouette blanche sur l’écran du drône est un arbre mort. ©EB

Une fois collectées et reconstituées, les données seront alors analysées par les agents de l’ONF et la décision prise d’envoyer sur le terrain des techniciens forestiers pour étudier la nécessité de récolter les arbres avant qu’ils ne soient dépréciés. « Peut-être que ce ne sera pas grave… Mais si la mortalité venait à atteindre 30 % des peuplements ça le deviendrait. Trop de pertes provoquerait un changement de paysages, une remise en cause des équilibres et forcerait la récolte d’arbres imprévue à écouler sur le marché, et poserait la question du reboisement : que replanter ? Cet outil va permettre d’objectiver la situation », ajoute Christophe Poupat. 

Si les pins sylvestres font l’objet d’une surveillance accrue, les chênes ne le sont pas moins. Cette année, vont se faire sentir les premiers effets de la sécheresse de 2018 : « Pas d’alerte, précise Christophe Poupat, mais on est quasi sûr qu’il va se passer quelque chose. Et l’enjeu pour l’ONF, c’est de n’être ni sur ou sous la réactivité. »

Estelle Boutheloup

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