[Billet]
Olivier Carré a-t-il coupé le cordon ombilical qui le relie à Serge Grouard depuis plus d’une vingtaine d’années ? Pas certain à en croire son attitude depuis le début de la crise et les témoignages de ses proches. Retour sur un phénomène où la sidération côtoie l’incrédulité.
Carré-Grouard, la guerre entre amis de 30 ans.
Carré et Grouard semblaient être les meilleurs amis du monde au moment de la passation de pouvoir à la tête d’Orléans, en 2015. Lorsque Serge Grouard, dans
sa lettre aux Orléanais, du 22 juin 2015, assurait qu’il quittait ses fonctions de maire et que personne n’était «
irremplaçable ».
Sauf lui, visiblement. Puisqu’après une série de très mauvais calculs politiques comme le choix de quitter la ville pour accompagner Fillon dans sa descente aux enfers ou sa propre défaite aux législatives de 2017, il n’a pas hésité à planté un coup de piolet dans le dos de son vieil ami Olivier pour retrouver enfin une place en politique. C’est donc en plein conseil municipal de juin 2019, après les révélations du
Canard Enchaîné sur les notes de frais de l’édile, que Grouard dégaine, en pleine séance, son arme favorite : l’indignation feinte. Une coutume dénoncée sur les réseaux sociaux sous le hashtag
#SergioComedyClub.
« Il sait bien que c’est fini entre eux deux »
Interrogé par MagCentre à l’occasion d’une récente conférence de presse, Carré s’en expliquait timidement. « La question des masques de l’AML et de la façon dont ils sont revenus à Serge Grouard me laisse curieux et ce sont des situations compliquées sur le plan judiciaire ». On fait plus vindicatif durant une campagne aussi tendue.
« Il a toujours de la fascination pour l’animal politique qu’est Grouard », assure un proche. « C’en est troublant, surtout quand on les voit dans la même assemblée », souligne une élue. « On a parfois l’impression qu’Olivier pense que c’est rattrapable. Mais au fond de lui, il sait bien que c’est fini entre eux deux », poursuit-elle.
Pourtant qui devrait connaître le mieux Serge Grouard qu’Olivier Carré ? Qui connaît le mieux ses ambitions politiques qui confinent parfois à la haine, comme ce fut le cas dans l’affaire Fansolo, blogueur potache qui finira par gagner une longue bataille judiciaire, en 2011? Grouard sera d’ailleurs condamné à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, par la plus haute juridiction française.
Il y a quelque chose de psychanalytique dans l’attitude de Carré. Comme ces joueurs de l’équipe de France de hockey sur glace qui vont demander des autographes à leurs homologues canadiens qu’ils sont censés affronter sans pitié quelques minutes plus tard…
Pas certain que l’état d’esprit guerrier soit au taquet pour livrer la lutte des municipales, dont l’issue est pour tous incertaine. Il reste quelques jours à Carré pour comprendre la violence de la trahison et la gravité de la situation. Et peut-être d’en tirer toutes les conclusions.
Et agir.
Mourad Guichard