Dr Jean Paul Briand
Depuis décembre 2019, une maladie respiratoire particulièrement contagieuse et parfois mortelle, est apparue en Chine. C’est une maladie émergente, la Covid-19, due à un nouveau coronavirus, le Sars-Cov-2. Cette pandémie a entraîné des mesures de confinement dans notre pays où l’épidémie semble s’atténuer peu à peu. Le déconfinement partiel devrait commencer le lundi 11 mai 2020. Pour certains, ce choix semble dangereux et ne plus respecter une logique sanitaire. La décision de diminuer le confinement serait économique et déraisonnable.
Nous savons tous que le virus Sars-Cov-2 met terriblement à mal notre économie. Il est souhaitable que les forces vives et productives de la nation puissent reprendre le travail le plus tôt possible. Les grands parents, personnes âgées et donc à risque, ne peuvent raisonnablement pas garder leurs petits-enfants. Les établissements scolaires serviront de garderies. Ainsi s’explique, pour les opposants au déconfinement, la réouverture des écoles, des collèges et des lycées. Les facultés resteront fermées : les étudiants sont majeurs et se garderont seuls…
L’attaque virale du porte-avion Charles-de-Gaulle
Il s’est produit un événement qui nous apprend beaucoup sur la propagation du virus Sars-Cov-2 et ses conséquences. En effet, sur notre porte-avion Charles-de-Gaulle a eu lieu une attaque virale depuis la mi-mars. Dès le 8 avril, une campagne de tests a été effectuée à bord et les marins ont été pris en charge, selon leur état, en étroite coordination avec le Service de santé des armées, sous la conduite des préfets maritimes Atlantique et Méditerranée.
Or, au-delà des souffrances et des inquiétudes légitimes vécues par les marins et leurs proches, que nous apprend l’étude, toujours en cours, sur cette flambée virale en milieu fermé ?
Tout en restant très prudent, le constat montre que :
- la contagion a été très rapide avec 60 % de matelots contaminés en moins de 5 semaines,
- plus de 50 % des contaminés n’avaient aucun symptôme,
- 24 marins ont dû être hospitalisés soit 2,3 % des personnes atteintes par le virus,
- 2 malades sont en réanimation, soit 0,2 % des contaminés (8 % des hospitalisés),
- aucun décès n’est à déplorer.
Aujourd’hui, l’épidémie au sein de l’équipage est terminée. Les hommes du Charles-de-Gaulle sont débarqués. Ils restent médicalement surveillés et en quarantaine pour deux semaines. La population du Charles-de-Gaulle est constituée essentiellement d’hommes majeurs de moins de 60 ans et a priori en bonne santé. Or, les femmes seraient moins vulnérables au Sars-Cov-2. Par ailleurs, on sait que les personnes âgées de 19 ans ou moins semblent développer, lorsqu’ils la développent, une forme plus bénigne de la maladie, avec un risque très faible d’hospitalisation et un risque quasi nul de décès.
Obtenir une immunité collective
Si les conditions climatiques, en rapport avec l’arrivée des beaux jours, n’atténue pas la vitalité du virus Sars-Cov-2, l’épidémie va poursuivre sa circulation dans la population. En l’absence d’un traitement validé et efficace, ou d’un vaccin, l’objectif prioritaire, afin que l’épidémie s’arrête, reste donc l’acquisition d’une immunité pour 60% de la population. Cette immunité collective doit se constituer très prudemment afin d’éviter que les capacités hospitalières et de réanimation soient débordées et que la population dite à risque soit atteinte. Il reste malheureusement des inconnues :
- L’immunité acquise lors d’une contamination silencieuse ou après la guérison de Covid-19 est-elle durable voire définitive ?
- Quelle sera l’incidence de la Covid-19 dans les années à venir ? Deviendra-t-elle saisonnière ?
- Le Sars-Cov-2 aura-t-il parfois de dangereuses mutations ?
Eviter une résurgence de Covid-19
Les évènements survenus sur le Charles-de-Gaulle sont plutôt rassurants. Au regard de ces dernières données épidémiologiques, déconfiner enfants, adolescents et moins de 60 ans, en bonne santé, semblent une décision judicieuse sur le plan sanitaire et moins risquée que ce que l’on craignait. Elle devrait permettre, avec un risque raisonnable, d’obtenir progressivement cette immunité collective. A ce jour, les estimations montrent que moins de 20% de la population française semblent être immunisés. Néanmoins, il conviendra de garder une « distanciation sociale » rigoureuse mais humanisée, pour les personnes âgées ou à risque. Gestes barrières conservés et tests immunologiques élargis à toute la population devraient permettre de veiller à ce qu’une résurgence de Covid-19 ne vienne submerger nos hôpitaux…
A suivre…