Les exécutifs locaux seront tous renouvelés ce dimanche avec sans doute quelques surprises à la clef. Certaines villes dans la région pourraient virer de bord et changer de couleur comme à Tours alors que des résultats sont incertains aussi dans le Loiret. La plus grosse incertitude pèse sur Orléans où les frères ennemis Olivier Carré et Serge Grouard s’affrontent, avec Jean-Philippe Grand en embuscade.
Municipales 2020 – Orléans ©JJT
L’actualité s’est focalisée ces dernières semaines sur Orléans, avec l’affrontement quasi familial Carré-Grouard. Mais c’est oublier que ces municipales peuvent aussi réserver d’autres surprises comme cela avait été le cas en 2001 avec une vague bleue qui avait balayé certaines municipalités comme celle de Jean-Pierre Sueur, à Orléans, pourtant riche d’un bon bilan.
Christophe Bouchet
Des surprises pourraient venir de Tours où le maire, Christophe Bouchet, semble en danger face à une liste unie de toute la gauche et un candidat LREM en arbitre. Dans ce département on suivra aussi le cas de Joué-lès-Tours où une liste musulmane se présente, la seule dans la région. Pour se focaliser dans le Loiret, quelques matchs ne manquent pas d’intérêt.
C’est notamment le cas de Fleury-les-Aubrais, où la majorité a volé en éclats avec six listes en présence, mais aussi à Gien, Pithiviers, Saint-Jean-le-Blanc (quatre listes concurrentes), la Chapelle Saint Mesmin. Ces résultats des communes de l’agglomération orléanaise sont évidemment cruciaux pour la définition d’une future majorité à la Métropole.
Coronavirus contre participation ?
Michel Guérin. DR
Pour l’anecdote, à Darvoy un combat de boxe entre deux générations d’élus communistes ne manque pas de piquant. A ma gauche Michel Guérin, le communiste orthodoxe, ancien maire de Saran et 88 printemps au compteur, à ma droite Marc, 67 ans, ancien adjoint communiste à La Ferté-Saint-Aubin.
Marc Brynhole. DR
Le drapeau au marteau et la faucille dans la poche, les deux ex-camarades s’affrontent donc dans ce duel fratricide chacun à la tête d’une « liste de rassemblement ».
Tous ces résultats dépendront d’une inconnue sérieuse : le taux de participation. L’épidémie de Coronavirus pourrait décourager une partie de l’électorat notamment la plus âgée. Ce sont pourtant les « seniors » qui alimentent en quantité les urnes alors que les jeunes s’en désintéressent (un sondage Ifop du 3 mars montre que seuls 33 % des jeunes de 18-25 ans déclarent vouloir aller voter alors qu’ils étaient 55% à voter au 1er tour de 2014).
L’électorat âgé étant réputé voter davantage à droite, le résultat final pourrait s’en ressentir, notamment à Orléans, exemple le plus intéressant de la décomposition politique locale avec l’affrontement de deux hommes de droite, anciens amis, anciens LR (Olivier Carré a démissionné, Serge Grouard a repris sa carte).
Serge Grouard favori ?
Discours de Serge Grouard salle Eiffel le 17 décembre 2019 – photo Jean-Luc Bouland
Curieusement on fait d’Orléans une des deux villes en France, avec Metz, qui pourrait retomber dans le giron des Républicains via Serge Grouard. Pourtant, à preuve du contraire, Orléans est toujours une ville classée à droite (divers droites), dirigée par Olivier Carré ex-LR recentré qui bénéficie du soutien de LREM et du centriste Tahar Ben Chaabane qui s’était présenté en 2014 (2 % des voix).
Olivier Carré
En 2014 Grouard et Carré en copilote avaient été élus dès le 1er tour (53,75 % des bulletins mais avec une faible participation de 53,9 %). Les amis de l’UMP de l’époque l’avaient emporté face à une gauche désunie (23,2 % pour le PS et 8,3 % pour le PCF) et face au FN (10 %), alors que cette fois le Rassemblement National est absent.
Le scrutin de ce dimanche sera naturellement différent. Un sondage, publié le 13 février dernier, place Serge Grouard à 32 % devant Olivier Carré (24 %) et Jean-Philippe Grand (22 %). Mais méfions-nous des sondages trompeurs, photographie d’un moment précis, qui ne traduisent pas les dynamiques. Depuis sa publication Tahar Ben Chaabane a rallié Olivier Carré tandis que la liste France Insoumise (6 % dans le sondage) a été invalidée avec des électeurs qui pourraient se reporter sur la liste PS-PCF (crédités de 7 %) ou sur les écologistes d’« OSE ».
22 mars incertain
Nathalie Kerrien ©Magcentre
Mais là encore la présence de Nathalie Kerrien (6 %), ovni politique local aux contours bien imprécis, pourrait rebattre quelques cartes tout comme l’absence du RN dont les électeurs devraient logiquement se reporter en priorité sur Serge Grouard.
Tout autant que le sondage, les résultats de ce dimanche donneront une indication mais vraisemblablement pas le nom du prochain maire. Car des incertitudes sont encore lourdes : certes une triangulaire (Grouard-Carré-Grand) semble inéluctable mais toute liste avec plus de 10% des bulletins peut se maintenir au second tour, tandis que 5 % suffisent pour fusionner avec une autre liste. Seules les listes Carré-Grouard-Grand semblent en mesure de dépasser les 10 %, les autres devront donc fusionner ou se retirer.
Baptiste Chapuis et Dominique Tripet ©SD
Si les retrouvailles Carré-Grouard semblent impossibles, où iront les voix de Nathalie Kerrien (en froid avec la République en marche et avec Olivier Carré et qui se réclame encore parfois de la gauche) et celles de Baptiste Chapuis et Dominique Tripet ?
Jean-Philippe Grand ©Magcentre
La liste de gauche « Faire respirer Orléans » devrait logiquement rallier Jean-Philippe Grand même si les tractations, avortées pour constituer une liste unique dès le 1er tour, ont laissé quelques traces. Au second tour, Serge Grouard semble disposer de peu de réserves de voix, moins sans doute que Olivier Carré et Jean-Philippe Grand.
Les scrutins des 15 et 22 mars s’annoncent donc incertains, avec une équation à multiples inconnues. Raisons de plus pour aller voter quitte à s’équiper de gants, de masque et de gel hydroalcoolique…
Car la démocratie est sans doute plus forte que les virus !
Jean-Jacques Talpin