Dr Jean Paul Briand
Depuis décembre 2019, une maladie respiratoire particulièrement contagieuse et parfois mortelle, est apparue en Chine. C’est une maladie émergente, la Covid-19, due à un nouveau coronavirus, inconnu jusqu’alors, qui se répand dans le monde entier.
A Magcentre, nous essayons de suivre l’évolution de cette pandémie virale, par des informations solides et vérifiées en évitant la course au sensationnel.*
Le Journal officiel, moi même et avec d’autres, commettons régulièrement une incorrection sémantique. La maladie en rapport avec l’infection par le nouveau coronavirus est la « coronavirus disease 2019 », en abréviation : la Covid-19. Elle est due au coronavirus SARS-CoV-2 (ex 2019-nCoV). Désormais, nous allons faire attention à ne pas perpétuer cette erreur…
Avec la Covid-19, pourquoi ne dit-on pas officiellement que nous sommes en présence d’une authentique épidémie ? En science épidémiologique, un seuil épidémique est définie pour chaque maladie. C’est à partir de ce seuil qu’il est considéré qu’une épidémie est médicalement en cours. Il peut être calculé différemment selon les pays. En Suisse, le seuil épidémique de la grippe saisonnière est calculé en fonction des dix dernières saisons. En France, lorsque le seuil épidémique de la grippe est franchi pendant deux semaines consécutives, l’épidémie est considérée comme installée. Pour la grippe, il est actuellement de 170 cas pour 100.000 habitants. Pour la Covid-19, aucun seuil épidémique n’est défini car c’est une maladie émergente, inconnue jusqu’à maintenant.
Le coronavirus de la Covid-19 continue sa progression en France et dans le monde (https://www.gisaid.org/epiflu-applications/global-cases-covid-19/). Le cap symbolique des 100.000 cas officiellement atteints est dépassé. Pour la France, le passage au stade 3, synonyme que « le virus circule largement dans la population » (https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus), est considéré comme incontournable. Cela ne signifie pas que l’infection est plus dangereuse, mais qu’elle touche un nombre très important de personnes.
Le seuil, pour oser prononcer le mot d’épidémie, est artificiel et discutable. Il n’est pas le plus important. Paradoxalement, l’apparition d’une épidémie ne dépend pas du nombre de personnes infectées mais du nombre de personnes susceptibles de l’être (c’est pourquoi, refuser les vaccinations est irresponsable vis à vis de la collectivité). Pour éviter une épidémie, c’est le nombre d’individus susceptibles d’attraper la maladie qu’il faut diminuer. Il existe donc, pour chaque maladie contagieuse, un taux critique en dessous duquel l’épidémie ne s’étend plus et au-dessus elle envahit le monde et devient une pandémie (ce qui est le cas pour la Covid-19). Une maladie ne devient épidémique que si ce taux est dépassé. Comme je l’expliquais dans un précédent article (https://www.magcentre.fr/191041-coronavirus-2019-ncov-episode-10/), les chercheurs travaillent sur des modèles mathématiques afin de définir ce seuil critique au plus près de la réalité. Chacun des paramètres à considérés (contagiosité, stabilité et affinité du virus, mortalité,…) expose à des imprécisions qu’une équipe de chercheurs de l’Université Carnegie Mellon (Pittsburg) essaye de minimiser (https://www.pnas.org/content/early/2020/02/26/1918529117).
Pour ceux que ça intéresse, je recommande la lecture du Hors-série N° 58 de Tangente « Mathématiques et médecine – Les maths au service de notre santé » de notre ami Bertrand Hauchecorne.
L’histoire des grandes épidémies démontre qu’elles sont révélatrices des comportements humains. Certain(e)s ont des attitudes solidaires, citoyennes et responsables, d’autres des agissements égoïstes, irresponsables et malsains.
En attendant la déclaration gouvernementale du passage en stade 3, la décision la plus sage est de décider soi-même de rester tranquillement à la maison. On limite ainsi les contacts afin d’éviter pour soi-même et les autres toutes contaminations. Pour occuper son temps, et contrôler peurs et fantasmes, on peut relire le roman d’Albert Camus « La Peste » ou « Le hussard sur le toit » de Jean Giono…
A suivre…