Tarquin, emblème du mal et du pouvoir, est-il vraiment mort ?

Le Centre Dramatique National d’Orléans présentait mercredi soir un « drame lyrique pour chanteurs, comédiens et orchestre de salle de bains », Tarquin. Mélange de théâtre et d’opéra, ce travail mis en musique par Florent Hubert sur un livret d’Aram Kebabdjian et mis en scène par Jeanne Candel n’a pas convaincu, même si le jeune public l’a bien accueilli.

Tarquin et sa belle fille Lucrèce

Aram Kebabdjian est parti d’images intérieures pour commencer ce qui allait devenir le drame lyrique présenté mercredi soir par le CDNO. Mengele s’est réfugié en Amérique du Sud et n’a jamais été retrouvé. Il s’est noyé vers 1980. Des os, exhumés un peu plus tard, ont été authentifiés avec une quasi certitude. Réputé mélomane, ce personnage a orienté le projet vers un travail musical. Un homme dans sa baignoire en Amérique du sud. C’est l’image de départ du récit.

Pour l’étoffer, l’histoire de Tarquin s’est très vite sur-imprimée. Il régna sur Rome par la terreur et la violence. Assassiné, il a été remplacé par la première république romaine. Devenu mythique au fil des ans, ce personnage concentre en lui le pouvoir et le mal. Comme Mengele.

Le mal est-il vraiment mort ?

Dans le spectacle, quatre personnages vont se confronter autour de ce mort, ou plutôt de celui qu’on dit mort : une juge arrivé d’Europe, sorte de tribunal international, un policiers local, la belle fille de Tarquin/Mengele et son fils génétique qui ne l’a pas connu. Leurs interrogations sur la véracité de sa mort, leurs discussions, leurs affrontements ou leurs recherches de certitude sont orchestrées par un autre quatuor, musical celui-là.

Ce qui ouvre des moments chantés comme un opéra de poche, ou plutôt de salle de bain. D’où quelques beaux moments musicaux, chantés en allemand et en espagnol. Mais assez vite, on ne voit plus très bien où le propos veut en venir, ni ce que les trouvailles scéniques peuvent signifier. Car il y a de beaux effets de mise en scène, la baignoire, le creusement, la terre. La présence de l’eau, presque constante, est sans doute le plus marquant. L’eau de la vie, nous explique le policier local quand il raconte l’histoire des momies. L’eau des tropiques, aussi. Décor magnifique, par la fenêtre, de plantes arrosées par la pluie.

Une succession de sketches

Mais les digressions continuelles, vite lassantes, paraissent assez fausses, le ton, plutôt du côté de l’humour, déplacé, injustifié. La juge devient vite ridicule, le policier hors sujet et les demi frères et sœurs inintéressants au possible. La pièce se déroule en une succession de séquences comme des sketches dont on se demande la cohérence : la nourriture en bocal, le nettoyage de la scène, la bouteille de vin. C’est long, et comme rien n’est vraiment convainquant, on s’ennuie.

Le flou, la pauvreté du texte rabaisse tout le travail à de l’esbroufe théâtrale. Avec outrance souvent, comme ce marteau piqueur qui défonce la tombe mais aussi le spectacle, en le plaçant alors au niveau d’enchaînement de gags. Dommage, il y a dans cette production un travail considérable et beaucoup d’éléments intéressants qui auraient pu être efficaces.

BC